Une alliance entre EADS et Boeing dans les hélicoptères lourds se précise

Que ce soit lors d’un conflit de contre-insurrection ou une opération de maintien de la paix, l’apport des hélicoptères lourds peut être déterminant. En effet, il permet de déployer des troupes ainsi que de les ravitailler en un temps réduit tout en s’affranchissent des contraintes du terrain (montagneux, désertique, urbain).

En clair, lorsqu’il est besoin d’une forte mobilité opérationnelle, il est difficile de se passer de ces types d’engins, à tel point que ceux qui sont actuellement engagés en Afghanistan, à savoir les Sikorsky CH-53E de l’US Marine Corp sont utilisés trois fois plus par rapport à ce qui avait été prévu.

Cela étant, les hélicoptères lourds ont leurs défauts. A commencer par leur manque de discrétion à cause du bruit produit par leurs puissants moteurs. Les rotors de ses appareils créent de fortes turbulences au sol au moment de l’atterrissage, en raison de la poussière qu’ils soulèvent, créant ainsi un phénomène de « brownout », pouvant faire perdre à l’équipage ds repères à un moment délicat de la phase de vol. Enfin, ces machines sont aussi vulnérables aux tirs de petits calibres et aux missiles air-sol mobiles du type Stinger.

Néanmoins, les armées occidentales manquent d’hélicoptères lourds. Et à commencer par la France, qui n’en a pas du tout. Plusieurs solutions sont ou seront disponibles sur le marché. En effet, le Mi26T du russe Mil, capable de transporter 20 tonnes sur 500 km aurait pu en être une. Son évaluation par la Direction générale de l’armement (DGA) à Istres en novembre 2007, avait d’ailleurs été satisfaisante. Seulement, des difficultés de compatibilité avec les normes Otan et les susceptibilités des industriels européens ont fait que cette option a été mise de côté.

Outre le Mi26T, il y a également le CH-53E Super Stallion de Sikorsky. La version K de cet appareil, navalisé, aura une capacité d’emport accrue par rapport au dernier modèle (55 hommes ou deux blindés en cabine). Seulement, cet appareil est toujours en cours de développement et il se révéle trop cher pour les budgets européens.

Reste la solution du CH-47 Chinook, un appareil que Boeing a toujours fait évoluer depuis son lancement dans les années 1960. Les appareils actuellement en service au sein de l’armée américaine, la version D, ont été « reconstruits » il y a un peu moins de 30 ans. L’US Army attend le prochain modèle, le CH-47F, dès 2018. Mais ce n’est pas un appareil totalement nouveau car sur les 464 appareils commandés, 246 seront en fait des CH-47D modifiés.

Finalement, c’est une initiative franco-allemande qui a été retenue par les ministres de la Défense de l’UE en mai 2009. Il est ainsi question de développer un appareil de 30 à 40 tonnes sous l’égide de l’Agence européenne de défense (AED). Selon les besoins exprimés par l’armée de Terre française, cet engin devrait être capable de transporter 10 à 13 tonnes de matériel et parcourir une distance de 1.000 km.

Ce projet, appelé « Future Transport Helicopter » (FTH) intéresse au premier chef Eurocopter, la filiale d’EADS, lequel pourrait s’allier à Boeing pour l’occasion. Lors du récent salon ILA de Berlin, l’hélicoptériste européen a exposé une maquette présentant les grandes lignes de ce que sera ce futur hélicoptère lourd. En clair, il ressemblera à un Chinook, en reprenant la formule des deux rotors en tandem. A la différence de son aîné, le FTH aura une masse de 33 tonnes (soit 11 tonnes de plus par rapport au CH-47F) et pourra transporter 56 soldats au lieu de 40.

Du côté de Boeing, on se fait très discret sur cette éventuelle coopération. L’on parle de « concept » sans entrer trop dans les détails. La raison tient à ce que l’opinion d’outre-Atlantique ne comprendrait pas pourquoi le constructeur américain attaque son rival EADS (et en particulier Airbus) sur les subventions de l’OMC et l’appel d’offres portant sur les avions ravitailleurs de l’US Air Force tout en s’alliant avec lui sur le segment bien particulier des hélicoptères lourds.

Pour EADS, cette coopération avec Boeing est à la fois logique et économique. Le constructeur américain ayant l’expérience des grands fuselages et l’européen celle des commandes électriques, le développement d’un tel hélicoptère pourrait être rapide, d’autant plus qu’il n’est question de faire appel qu’à des technologies existantes afin de limiter les coûts de développement.

« Si alliance il y a , ça ne sera qu’une alliance de raison, parce que le marché visé est trop petit pour qu’on le fasse tout seul » a indiqué un cadre du groupe européen à BFM Radio. « Il serait dommage de passer à côté d’un marché de plusieurs dizaines de millions juste parce que l’on ne veut pas se parler » à précisé une « source proche du dossier ».

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