La Grèce envisage de céder ses systèmes russes de défense aérienne S-300 à l’Arménie

À la fin des années 1990, alors en très bons termes avec Moscou, Nicosie fit l’acquisition de deux batteries russes de défense aérienne S300… Ce qui provoqua une crise régionale, la République turque de Chypre Nord [RTCN] et la Turquie ayant menacé de lancer une intervention militaire si Chypre persistait à vouloir mettre en service de tels systèmes. Finalement, pour apaiser les tensions, ces derniers furent repris par la Grèce, qui les plaça dans un dépôt situé en Crète.

Ces batteries S-300 ne firent plus parler d’elles jusqu’à l’exercice « Lefkos Aetos 2013 », au cours duquel elles furent testées par les forces grecques. « C’est peut-être paradoxal, mais le tir réussi du système S-300 est un message de paix et de stabilité dans l’Europe du Sud-Est, dans les Balkans et dans la Méditerranée orientale », avait commenté Athènes, à l’époque.

Plus tard, il fut avancé que ces S-300 auraient servi discrètement à entraîner les pilotes de chasse israéliens, à un moment où la Russie envisageait de déployer de tels systèmes en Syrie [ce qui est le cas depuis 2018, ndlr].

Cela étant, ces S-300 sont devenus encombrants. Surtout depuis que la Russie a envahi l’Ukraine, le 24 février 2022. Pendant un temps, Athènes a pensé les céder aux forces ukrainiennes… Mais à la condition d’obtenir un système américain Patriot en échange.

« Si les États-Unis installent un système Patriot sur l’île de Crète, alors les S-300 que nous possédons pourront être retirés [du service] et envoyés à Kiev », avait en effet expliqué déclaré Nikolaos Panagiotopoulos, alors ministre la Défense, en décembre 2022.

Seulement, la réponse de la Russie ne se fit pas attendre. « Ce serait une violation flagrante des accords russo-grecs sur la coopération militaire et technique », fit valoir Maria Zakharova, la porte-parole de la diplomatie russe. « Piétiner ses engagements en vertu des traités [de 1995 et de 2013] ne peut qu’avoir des conséquences », avait-elle ensuite prévenu, après avoir rappelé que la Grèce n’était pas autorisée à réexporter les équipements militaires que lui avait fournis Moscou.

Que dira la Russie du projet grec de céder ces S-300 à l’Arménie, pays avec lequel elle est en froid depuis l’offensive de l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabakh ?

En effet, selon le site d’information Enikos, l’état-major général de la défense nationale grecque [GEETHA] a l’intention de se séparer de tous les équipements d’origine russe. Aussi, en relation avec la France, il envisage de livrer à l’Arménie non seulement les S-300 mais aussi les systèmes antiaériens Tor-M1 et Osa-AK. Ce transfert ne se fera qu’après que de systèmes de remplacement auront été commandés. Pour rappel, la Grèce a fait part de son intérêt pour les dispositifs israéliens « Fronde de David », Barak MX et SPYDER MR.

Au-delà des aspects culturels, « pour Athènes, renforcer Erevan plutôt que Kiev est un choix stratégique. […] Une Arménie forte constituera un formidable contrepoids à l’intransigeance turque, qui renforce ouvertement l’Azerbaïdjan », écrit Enikos.

Reste à voir dans quelle mesure ces S-300 renforceront la défense aérienne de l’Arménie, sachant que celle-ci, selon l’édition 2023 de la publication « The Military Balance », en possèderait une cinquantaine d’exemplaires… Mais il n’est pas certain qu’ils soient tous opérationnels.