Devant réduire la voilure en Afrique, l’armée de Terre va renforcer sa présence aux Émirats arabes unis

Comme l’avaient suggéré quelques indiscrétions commises ces derniers mois, le rapport que vient de remettre Jean-Marie Bockel au président Macron recommande de revoir drastiquement à la baisse la présence militaire en Afrique. Ce qui est d’ailleurs dans la ligne fixée par l’Élysée en février 2023, laquelle prévoyait de reconfigurer le dispositif actuel tout en confortant une logique de partenariat avec les forces armées locales.

D’après des chiffres évoqués au début de l’été dernier, les effectifs des forces françaises prépositionnées en Afrique [excepté Djibouti, qui relève de la stratégie pour l’Indopacifique] devraient être réduits de 2 300 à seulement 600 militaires [300 au Tchad, 100 au Gabon, 100 en Côte d’Ivoire et 100 au Sénégal].

En octobre, lors d’une audition au Sénat, dont le compte rendu vient d’être publié, le chef d’état-major des armées [CEMA], le général Thierry Burkhard, a une nouvelle fois justifié cette évolution.

« En Afrique, notre dispositif précédent était performant mais la balance était négative entre les effets produits par notre présence et le retour dans le champ des perceptions », a-t-il dit. « Nous transformons donc notre présence et les structures de commandement, notamment avec la création d’un commandement pour l’Afrique. La réorganisation en cours porte déjà ses fruits », a-t-il ajouté.

Pour autant, il est toujours question de « lutter contre le terrorisme », de « participer à la maîtrise de l’immigration clandestine », de « contrer les influences de nos compétiteurs stratégiques » et de contribuer à « la protection de l’environnement et à la lutte contre les effets du changement climatique ».

Or, pour cela, a continué le CEMA, il « convient de baisser la visibilité de la présence française en évitant de localiser des bases dans les capitales et en réduisant tant l’empreinte au sol que les adhérences ». Aussi, « nous passons donc d’une logique de déploiement permanent à des déploiements temporaires de forces exécutant des missions, avec l’appui d’un socle beaucoup plus réduit et moins visible », a-t-il expliqué, avant de préciser que « nos déploiements [devront] être guidés par les demandes des pays concernés et par nos capacités à y répondre ».

Si elles sont appelées à réduire la voilure en Afrique, les forces françaises vont cependant renforcer leur présence sous d’autres latitudes, en particulier aux Émirats arabes unis. Telle est en effet l’annonce faite par Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, dans les pages du quotidien L’Opinion, ce 27 novembre.

Dans le cadre d’un accord de défense signé en 2008, les Forces françaises aux Émirats arabes unis [FFEAU] comptent entre 650 et 700 militaires. Elles ont la jouissance d’une base navale ainsi que celle de la base aérienne 104 d’Al Dhafra, laquelle abrite les six Rafale de l’Escadron de chasse 1/7 Provence. Enfin, le 5e Régiment de Cuirassiers [RC] a pris ses quartiers à Zayed Military City, à 65 km d’Abou Dhabi.

Cette unité comprend un escadron de commandement et de logistique, un escadron doté de 16 chars Leclerc, une section d’infanterie équipée de VBCI et un sous-groupement d’artillerie mettant en œuvre cinq CAESAr [Camions équipés d’un système d’artillerie]. Il est donc question de l’étoffer.

« La France offre des réponses, en matière d’entraînement et de matériels. C’est l’occasion pour moi d’annoncer que dès 2025, la France va renforcer sa présence militaire aux Emirats, où nous disposons d’une base terre – air – mer à Abu Dhabi. Nous avons décidé d’y déployer en permanence une compagnie d’infanterie – une centaine d’hommes – au sein du 5e Régiment de Cuirassiers, qui dispose déjà de chars Leclerc et de CAESAr », a en effet affirmé M. Lecornu, qui a aussi confié que « des capacités en matière de génie » pourraient être envoyées à Zayed Military City.

« C’est une manière de faire vivre opérationnellement notre accord de défense avec les Émirats arabes unis », a justifié M. Lecornu.

Selon l’État-major des armées, trois missions sont assignées aux FFEAU : appuyer les déploiements opérationnels français dans la région, développer la coopération avec les forces émiriennes et accueillir les « troupes venues de métropole et les contingents étrangers pour parfaire leur aguerrissement en milieu désertique et en zone urbaine moyen-orientale ».