Le navire espion russe Yantar a de nouveau été repéré en mer d’Irlande, près de câbles sous-marins critiques

Le 9 novembre, la Royal Navy a surveillé les mouvements de la frégate russe Amiral Golovko [censée emporter des missiles hypersoniques Zircon] et du pétrolier-ravitailleur Vyazma. Même si cette flottille, partie de Severomorsk une semaine plus tôt, a effectué un exercice « antiterroriste » durant son transit, une telle opération de surveillance est désormais devenue banale. Sauf qu’elle a été rejointe par le Yantar, un navire espion régulièrement repéré à proximité des câbles sous-marins de télécommunications depuis quelques années.

Par la suite, arrivée à la hauteur de Douvres, la frégate Amiral Golovko et le pétrolier-ravitailleur Vyazma ont mis le cap vers le sud-ouest, sous l’œil vigilant de la Marine nationale. Du moins si l’on en croit des sources britanniques car aucune communication n’a été faite à ce sujet par les autorités françaises pour le moment. Quant au Yantar, après avoir éteint son dispositif AIS [Automatic Identification System], qui permet d’identifier et de localiser les bateaux, il a pris la direction de la mer d’Irlande, en étant suivi à distance par le chasseur de mines HMS Cattistock.

Puis, le 13 novembre, ayant brièvement activé son AIS, le Yantar a été repéré au sud de l’île de Man. Et ce n’est sans doute pas pour y chercher les fées si chères à l’écrivain de marine Sylvain Tesson étant donné que la zone où il se trouve est traversée par une vingtaine de câbles sous-marins de télécommunications, des interconnexions électriques ainsi que des gazoducs qui relient l’Irlande au Royaume-Uni.

Selon le quotidien « The Telegraph », le Yantar est toujours surveillé de près par le HMS Cattistock, rejoint par le navire de surveillance des fonds marins RFA Proteus ainsi que par des avions de patrouille maritime P-8A Poseidon de la Royal Air Force. Étant donné que le bateau espion russe navigue dans sa zone économique exclusive [ZEE], l’Irlande a déployé le patrouilleur LÉ James Joyce et un CASA CN-295 dédié à la surveillance maritime. Un navire hydrographique américain, l’USNS Bruce Heezen, navigue aussi dans le secteur.

À noter que les moyens mis en œuvre par les forces irlandaises sont plutôt inhabituels. Lors d’une précédente mission du Yantar au large des comtés de Mayo et de Donegal, en août 2021, elles s’étaient gardées d’intervenir au motif que le navire espion russe n’était pas entré dans les eaux territoriales de l’Irlande…

'Russian spy ship confirmed to be operating off Dublin near cables'

The Irish Naval Service is understood to be monitoring the activity of the Yantar, which has a crew of 60 and is ostensibly a Russian navy research vessel.

READ: https://t.co/CBUj17lcsM#rtept | @RTENews

— RTÉ Prime Time (@RTE_PrimeTime) November 15, 2024

« Conformément à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, tous les navires, y compris ceux de nature militaire, sont autorisés à transiter par les eaux territoriales des États côtiers en vertu du principe de passage inoffensif. Les navires transitant dans les eaux irlandaises sont tenus de se conformer au droit international et peuvent être soumis à une observation par les forces de défense afin de vérifier cette conformité », ont, cette fois, justifié les autorités irlandaises.

Pour rappel, navire océanographique [telle est son appellation officielle] affichant un déplacement de 6 000 tonnes, le Yantar est exploité par la Direction principale de la recherche en eaux profonde [GUGI] du ministère russe de la Défense. Il est notamment équipé de deux mini-sous-marins [un AS-37 Rus et un AS-39 Konsul]. Son comportement, notamment près des infrastructures sous-marines critiques, a régulièrement été qualifié de « suspect ».

Quoi qu’il en soit, la ZEE irlandaise est souvent « visitée » par les navires espions et les sous-marins russes. Cette attention particulière dont elle fait l’objet de la part de Moscou s’explique par le fait que l’Irlande constitue le point faible de l’Otan [dont elle ne fait pas partie] en raison de la faiblesse de ses capacités militaires… alors que les trois-quarts des câbles sous-marins de l’hémisphère nord transitent par ses eaux.