Un navire militaire russe aurait tiré un coup de semonce vers un petit bateau de pêche norvégien

Petit bateau de pêche de 34 tonnes pour 15 mètres de long, le Ragnhild Kristine naviguait au large de la péninsule de Varanger, dans la zone économique exclusive [ZEE] de la Norvège, quand, le 12 septembre, l’imposant « destroyer » russe Amiral Levtchenko [classe Oudaloï] a sommé son « patron », Øystein Orten, de quitter le secteur lors d’un appel radio.

« J’ai répondu qu’il était hors de question que nous partions car nous avions des palangres à relever », a raconté ce dernier, dans les pages du journal Fri Fagbevegelse.

Pour rappel, au moment des faits, la marine russe venait de lancer l’exercice Ocean 2024, censé être le plus important depuis trente ans et devant se dérouler pendant quatre jours, dans les mers Méditerranée, Caspienne et Baltique ainsi que dans les océans Atlantique et Pacifique. Il devait permettre de vérifier l’état de préparation de ses unités, de tester des armes de « haute précision » et de « renforcer la coopération avec les marines partenaires ». Des avertissements concernant des tirs avec des munitions réelles avaient été préalablement émis.

L’incident évoqué par le « patron » du Ragnhild Kristine s’est produit à la limite entre les ZEE norvégienne et russe.

Quoi qu’il en soit, après avoir répondu qu’il ne quitterait pas la zone en question tant qu’il n’aurait pas relevé ses filets, l’équipage du bateau de pêche norvégien a vu le « destroyer » russe venir à lui, en donnant un coup de sirène.

S’étant arrêté à seulement 200 mètres du Ragnhild Kristine, le navire militaire russe a ensuite tiré un coup de semonce. « L’explosion, puissante, a secoué notre bateau », raconte Øystein Orten.

En tout cas, cela a fini par le convaincre de quitter la zone pour se mettre hors de danger. Puis « les garde-côtes norvégiens sont arrivés et ont parlé [par radio] avec le navire russe », poursuit le patron du Ragnhild Kristine.

Sep 12 NO fishing boat Ragnhild Kristine was chased away from their fishing gear in NO exclusive economic zone by a Russian warship who after some threats fired its gun.

NO MOD calls the incident "a dialogue" and points out that it is legal to have drills in intl water. pic.twitter.com/PLAqBu9wmK

— auonsson (@auonsson) September 24, 2024

« Nous avions un navire des garde-côtes dans la zone et nous savons qu’il y a eu une conversation entre la marine russe et le bateau de pêche », a expliqué le lieutenant-colonel Vegard Finberg, le responsable de la communication du quartier général interarmées norvégien, au Barents Observer. Mais il n’a été en mesure de corroborer les récit d’Øystein Orten. « Il n’y a rien dans nos observations qui puisse confirmer un quelconque coup de semonce », a-t-il dit. Toutefois, a-t-il admis, « les pêcheur ont peut-être vécu la situation différemment ».

Reste que ces manœuvres récurrentes des forces navales russes dans cette zone située à la limite des ZEE de la Norvège et de la Russie posent un problème. Dans l’entretien qu’il a donné à FriFagbevegelse, le patron de pêche norvégien estime qu’Oslo doit « faire pression » sur la Russie « pour qu’elle cesse de saboter la pêche et la navigation ». Et d’ajouter : « Idéalement, les Russes pourraient placer leurs zones de tir plus au nord, à l’est, dans leur propre ZEE. Ils ne devraient pas être autorisés à fermer les zones de pêche norvégiennes ».

Citée par le Barents Observer, une étude récemment publiée dans le Scandinavian Journal of Military Studies souligne que, ces dernières années, la Russie a étendu ses zones d’exercices navals, au point que « beaucoup d’entre elles sont situées de part et d’autre de la ligne de délimitation maritime russo-norvégienne, en dehors des eaux territoriales des deux États ».

« En d’autres termes, ils se situent en partie dans la zone économique exclusive de la Russie et en partie dans celle de la Norvège », a résumé Kristian Åtland, un chercheur à l’Institut norvégien de recherche de défense [FFI] qui a pris part à cette étude.