Safran a finalisé le rachat de Preligens, spécialiste de l’intelligence artificielle pour la défense
Créée en 2016, l’entreprise Preligens a très vite suscité l’intérêt de la Direction du renseignement militaire [DRM] – pour ses algorithmes d’intelligence artificielle [AI] permettant de repérer automatiquement des équipements militaires et d’identifier des mouvements inhabituels sur des sites d’intérêt grâce à l’imagerie satellitaire.
Après avoir été soutenue par le fonds Definvest, mis en place par le ministère des Armées avec le concours de Bpifrance, alors qu’elle était convoitée par In-Q-tel, le fonds d’investissement de la CIA, l’entreprise fut notifiée par la Direction générale de l’armement [DGA] d’un contrat-cadre d’une valeur maximale de 240 millions, dans le cadre du programme TORNADE [Traitement Optique et Radar par Neurones Artificiels via Détecteur], mené au profit de la DRM, du Commandement des opérations spéciales [COS] et du Commandement de la cyberdéfense [COMCYBER].
Seulement, en mars dernier, il fut rapporté que deux « contrats clés » concernant l’imagerie radar et optique n’avaient pas été reconduits par le ministère des Armées… alors qu’ils représentaient près de la moitié du chiffre d’affaires de Preligens. Aussi, pour être en mesure de poursuivre son développement, l’entreprise s’était alors mise en quête d’un repreneur.
Un temps intéressé, Thales se mit finalement en retrait. Puis, en juin, le groupe Safran fit savoir qu’il venait d’entrer en « discussions exclusives en vue d’acquérir 100 % du capital de Preligens. Et la trêve estivale aura été mise à profit pour les finaliser.
En effet, ce 2 septembre, Safran a annoncé qu’un accord venait d’être finalisé pour une valeur de 220 millions d’euros. Et cela alors que, en 2023, Preligens, qui prendra le nom de Safran.AI, a réalisé un chiffres d’affaires de 28 millions d’euros.
« Avec ce rapprochement, Safran Electronics & Defense, expert reconnu dans les domaines de l’optronique, de la communication spatiale et de la navigation inertielle, confirme son engagement dans le domaine de l’IA », se félicite le groupe, via un communiqué. Et d’ajouter que cette opération, grâce aux solutions de Preligens, lui permettra « d’accélérer le développement » de l’intelligence artificielle dans « ses produits et services ».
En outre, Safran entend faire bénéficier sa nouvelle filiale de sa « présence internationale », en particulier sur le marché américain.
Si ses algorithmes concernent essentiellement les applications militaires, Preligens [ou Safran.AI] devrait avoir les moyens de se diversifier en développant des solutions dédiées à « l’industrie 4.0 ». Ainsi, explique Safran, « l’analyse d’images automatisée par l’IA peut assister les contrôleurs en charge de l’inspection de pièces critiques en les orientant vers des anomalies à partir de clichés numériques ».
« Rejoindre Safran marque une nouvelle étape dans [notre] développement. Nous sommes très fiers de contribuer à créer un centre de compétences en intelligence artificielle au meilleur niveau mondial pour l’un des fleurons de l’industrie française. Les nombreuses complémentarités avec Safran vont nous permettre de développer de nouvelles lignes de produits d’intelligence artificielle et d’accélérer notre développement international ce qui constitue d’excellentes nouvelles pour nos activités et nos salariés », confirme Jean-Yves Courtois, le PDG de Preligens.
Photo : Preligens
C’est heureux que ce rachat ait lieu. La puissance et le dynamisme de Safran alliés à Peligens et sa maîtrise innovante de l’AI vont en faire probablement un fleuron de notre BITD et de la BITD européenne. La taille résultante de l’entreprise devrait l’éloigner d’autant plus de la taille critique pour éviter un rachat par de plus gros concurrents.
A charge pour notre pays de l’alimenter en projets pour le plus grand bien stratégique de notre défense et pour lui permettre de vendre son savoir-faire à d’autres partenaires et alliés.
Une bonne nouvelle pour la préservation de nos pépites industriels. À l’avenir les mécanismes régaliens devront se renforcer pour protéger les industries, startup et chercheurs essentiels des marchés sous domination.
Si la CIA dispose de fonds spéciaux, il y en a bien d’autres aussi…
HS pour LL qui nous gratifie généralement de beaux hommages à nos anciens. L’ex patron du commando Georges est décédé en juillet :
https://www.snemm.fr/articles/153688-deces-du-general-georges-grillot-medaille-militaire
« l’analyse d’images automatisée par l’IA peut assister les contrôleurs en charge de l’inspection de pièces critiques en les orientant vers des anomalies à partir de clichés numériques »
Excellente idée. Que ce soit pendant la production ou l’entretien.
En complément de l’article de Laurent LAGNEAU, je vous propose une synthèse personnelle issue de la lecture de sources multiples dont en particulier : Preligens, Le Monde, Les Echos, Safran, LeMagIT, ActuIA, ABCBourse,…
Preligens est à sa fondation une startup créée en 2016 sous le nom d’EarthCube (Initialement basée à Toulouse et Paris). Devenue rapidement un leader mondial de l’IA, employant 220 employés (dont 140 scientifiques qui forment la plus grande équipe d’IA sur imagerie satellite du monde occidental), propose -grâce à l’IA- des solutions pour analyser des images HD, des vidéos « full motion » (cad une vidéo combinant le flux vidéo et -pour rendre la vidéo géospatiale- des métadonnées telles la position de pointage de la caméra, la position et l’altitude de la plateforme, ainsi que d’autres données connexes encodées), mais aussi l’analyse de signaux acoustiques (et donc vibratoires) qui permet la création et le suivi de données échantillonnées et identifiées…
Pour donner un exemple d’application, Mme Hélène Humbert [communication manager chez Preligens] déclare « Une modification de l’environnement d’un aéroport à la frontière russo-ukrainienne va être repérée par notre logiciel et provoquer une alerte …/… L’analyste missionné par notre client va immédiatement constater qu’une flottille de chasse a pris la place des 5 hélicoptères habituellement stationnés sur le site… ». Ce travail était jusqu’à présent réalisé manuellement, rendant extrêmement compliqué et chronophage le traitement de la masse de données récupérées. « En couplant l’automatisation des tâches par l’intelligence artificielle au savoir-faire des analystes, notre produit fait gagner un temps précieux aux services de renseignement ! ».
Ses principaux clients sont la DGA, le Renseignement militaire (DRM), l’OTAN-Intelligence Fusion Center (NIFC), la Sécurité civile, et la société a ouvert des filiales au Royaume-Uni, aux États-Unis, en Allemagne, en Belgique et à Singapour et créée à Pacé (près de Rennes) en 2022 le “CEDIA“ [Centre d’entraînement et de développement d’Intelligence Artificielle], le premier centre dédié à l’IA géospatiale souveraine en France.
En octobre 2022, la DGA a attribué à Preligens le marché dit “TORNADE“ (Traitement Optique et Radar par Neurones Artificiels via DEtecteurs) pour équiper le Renseignement militaire français en logiciels “géo-int“ (des logiciels de géo-intelligence qui permettent la visualisation et l’analyse de données géospatiales pour en faciliter la compréhension perspicace, la prise de décision et la prédiction ; dont le logiciel “ROIM Robin“ [Renseignement d’Origine IMage] qui surveille des sites stratégiques), et ce pour une valeur de 240 millions € sur sept ans. Par ailleurs, Preligens développe également le programme “Xerus“, qui est un outil de cartographie permettant de « détecter et vectoriser automatiquement les routes, les bâtiments et les protections passives » ; en clair, il s’agit d’un outil de reconnaissance aidant les forces armées à préparer leurs interventions dans les zones de conflit…
Preligens bénéficie également d’un contrat-cadre avec le centre de commandement de l’OTAN et divers clients dont les services de renseignement du Japon.
Son intégration à la branche Electronics & Defence du groupe Safran (acquisition pour une valeur de 220 millions €, alors que certains l’estimaient aux environs de 350 millions €), résulte de difficultés avec les représentant de “360 Capital“ (un fonds d’investissement d’origine italienne qui a assuré le fonds d’amorçage des activités) qui ont décidé de revendre leurs parts au sein de la société tant en raison des pertes accumulées (4 millions €, pour un CA de 28 millions € en 2023) que des difficultés à élargir la clientèle [Preligens n’aurait pas obtenu suffisamment tôt les agréments pour travailler avec les armées étatsuniennes… Il se murmure que cela serait la conséquence des pressions du Pentagone (CIA) qui lorgnait sur cette pépite française… Tant et si bien qu’à la vue de ces résultats, la société a licencié 26 personnes, et Jean-Yves COURTOIS, président de Preligens, reconnaît que « le business plan de l’entreprise était trop optimiste »].
Safran s’impose devant le franco-italien Telespazio (une filiale détenue à 67 % par Leonardo et à 33 % par Thales), et le suédois Hexagon AB (une société spécialisée dans la géo-intelligence).
Fort heureusement cette pépite n’est pas partie “ailleurs“…
Merci pour cette synthèse.
Le tout sans citer Grégoire DE SAINT-QUENTIN ?
^^
Félix, difficile de citer tous les collaborateurs…
Alors commençons par les fondateurs. La startup a été créée en 2016 par deux jeunes ingénieurs français qui ont eu du nez : Arnaud Guérin et Renaud Allioux.
Je vous passe tous les collaborateurs…
Voici une mention particulière sur le site de Preligens qui, je l’espère vous fera plaisir. Je cite :
Élevé au grade de général d’armée le 1er juillet 2020 après avoir été nommé au cabinet en tant que conseiller du gouvernement, il quitte cette dernière fonction après une carrière exceptionnelle de service actif d’une quarantaine d’années, au cours de laquelle il a occupé les fonctions de sous-chef d’état-major opérations au sein du chef d’état-major de l’armée de terre (2016 – 2020), de chef du commandement des opérations spéciales (2013-2016) et de commandant du 1er régiment de parachutistes de marine (2004-2006).
A travers son cabinet de conseil, Petra Advisors, Grégoire de Saint-Quentin souhaite mettre son expérience unique acquise sur le terrain et au plus haut niveau de commandement opérationnel de l’armée de terre, au service d’Earthcube et de sa capacité d’innovation et d’excellence technologique. Il accompagnera notamment l’entreprise dans les grands défis de souveraineté auxquels ses solutions sont confrontées dans les secteurs de la défense et de la sécurité et aidera les dirigeants à développer et sécuriser les actifs de l’entreprise.
Et voilà que nous retrouvons ce général cinq étoiles, en 2024, à la présidence de GEOS, la société de sécurité privée du groupe ADIT (Il succède à Didier Castres). Selon leur site, GEOS est une société privée de sécurité, de services industriels et d’assistance technique, le Groupe GEOS fournit de manière responsable des services de sécurité, de sûreté et de défense dans des environnements complexes ; depuis 1998, GEOS est la référence des entreprises et des institutions dans l’accompagnement et le développement de leurs projets en zones sensibles. Afin de permettre aux entreprises d’exploiter leur potentiel quels que soient les risques encourus, GEOS intervient directement ou via ses filiales principalement dans des contextes sensibles ou en zones de crise…
Voilà, voilà M’sieur Félix.
SAFRAN a fait une belle prise, visant avec le marché américain.
Puisque nous sommes sur un sujet « intelligence artificielle », je suis surpris du silence pour le domaine militaire (mais pas seulement) au sujet de la vente à la découpe par ses créanciers de la société ATOS…
https://www.usinenouvelle.com/article/atos-abaisse-ses-previsions-de-ca-et-de-flux-de-tresorerie.N2217643
Personne n’est dupe, le copinage a joué à plein pour le rachat d’une coquille vide qui sert à convertir de l’IA en pognon, et encore, ne s’agit’il pas de véritable IA mais juste d’un automatisme commun de reconnaissance de forme plutôt basique et sans intérêt car non compétitif avec l’humain qui reste très au dessus de ça en capacité d’identification et analyse.
Un vilain tour de passe passe financier, sans intérêt pour le domaine de la défense.
Qu’on nous dise précisément ce qui vaut 200 millions, les locaux ??? le personnel ???l’outillage ??? rien de tout ça, juste des algorithmes déjà dépassé dont la conception n’a requis que quelques dizaines de milliers d’euros. C’est de l’hyper spéculation financière, un racket contre les actionnaires de Safran, qu’est le gouvernement français qui détient 12% des parts et d’autres entreprises françaises…
Tant pis pour les pigeons qui se font plumer de leur plein gré !
Thierry, vous devriez postuler comme analyste pour l’Autorité de surveillance des marchés financiers… C’est ballot, même eux se trompent !
Vous devriez allez le dire à la CIA cela devrait les soulager quelque peut d’avoir échouer à s’emparer de cette coquille vide. Au passage vous pourriez peut-être leurs proposer vos services en matière d’intelligence non artificielle.. N’oubliez pas de le dire également aux Italiens et aux Suédois qui semblaient eux aussi intéressés par cette entreprise. C’est étrange cet intérêt soudain pour de simple algorithmes prétendument dépassés.
Encore ne s’agit-il pas.
Votre hargne à vilipender certains secteurs de la BITD française est pour le moins suspecte.