L’Allemagne enquête sur le survol d’un site industriel stratégique par des drones présumés russes

En septembre 2022, peu après le sabotage des gazoducs NordStream 1 et NordStream 2, commis au moment où devait être inauguré le « Baltic Pipe », une conduite ayant la capacité d’acheminer 10 milliards de mètres cubes de gaz par an entre la Norvège et la Pologne, via le Danemark, les autorités norvégiennes signalèrent l’apparition de drones non identifiés près des plateformes off-shore exploitées par le groupe norvégien Equinor. En conséquence, elles décidèrent de « renforcer la préparation aux situations d’urgence en ce qui concerne les infrastructures, les installations à terre et en mer sur le plateau continental norvégien ».

Depuis, l’origine de ces drones demeure encore inconnue… Pratiquement à la même époque, il fut rapporté que plusieurs sites militaires allemands avaient été survolés par des appareils « suspects ».

Ce phénomène s’est poursuivi par la suite. Ainsi, en juin 2023, au moins 65 incidents liées et à la sécurité et impliquant des drone à proximité de bases de la Bundeswehr avaient été constatés, celles accueillant les formations données aux troupes ukrainiennes étant plus particulièrement visées. Fallait-il y voir la main de la Russie ? Pour le moment, les autorités allemandes n’ont pas été en mesure de le prouver…

Qu’en sera-t-il avec les survols réguliers – à « grande » vitesse – de la zone industrielle « ChemCoast Park », à Brunsbüttel [Schleswig-Holstein], par des drones suspects ?

Depuis le 8 août, plusieurs survols non autorisés de ce site industriel, qui abrite notamment un nouveau terminal GNL et une centrale nucléaire désaffectée, ont été constatés par l’Officie régional de police criminelle. Et certaines de ces incursions ont impliqué jusqu’à cinq drones à la fois.

Le 23 août, le parquet de Flensbourg a indiqué qu’une enquête portant sur une « suspicion d’activité d’agents à des fins de sabotage » était en cours, avec l’appui de l’Office fédéral de la police criminelle [BKA] et celui de la Bundeswehr.

D’après le quotidien Bild, le comportement de ces drones suggère qu’il s’agit d’appareils militaires. Du moins, c’est ce que pensent les enquêteurs, qui soupçonnent l’un d’eux d’être un « Orlan-10 » russe, capable de voler à la vitesse maximale de 150 km/h et de parcourir 600 km de distance en mode autonome, à 5000 mètres d’altitude. Il peut être lancé au moyen d’une catapulte ou à la main.

Aussi, l’hypothèse que ces aéronefs puissent être mis en œuvre depuis des navires civils croisant en mer du Nord serait privilégiée par les enquêteurs.

Évidemment, pouvoir mettre la main sur l’un de ces drones permettrait de déterminer leur origine… Seulement, en Allemagne, il revient à la police de s’occuper de la lutte anti-drone, dès que des sites civils sont concernés. La « Task Force Drones », créée en novembre dernier par la Bundeswehr, ne s’occupe que de la protection des emprises militaires… à moins qu’elle ne soit requise par les autorités civiles.

« Dans le cadre de l’assistance administrative, la Bundeswehr peut également, sur demande, soutenir les autorités civiles en matière de lutte antidrone si elles ne disposent pas de ressources humaines ou matérielles propres à cet effet », rappelle en effet le quotidien Handelsblatt.

Photo : Orlan 10 – Mike1979 Russia – CC BY-SA 4.0