Le ministère allemand de la Défense confirme l’achat de 105 chars Leopard 2A8 supplémentaires

Avec le retour à la rigueur budgétaire, via le « frein à l’endettement » qui, inscrit dans la Loi fondamentale, limite le recours à l’emprunt par l’État fédéral, le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, semble avoir gagné une manche après avoir obtenu une hausse des crédits de la Bundeswehr de 1,2 milliard d’euros pour l’exercice fiscal 2025. Cela d’autant plus que d’autres ministères n’ont pas bénéficié d’un tel traitement de faveur. Mais au regard des exigences qu’il avait précédemment exprimées, il a en réalité perdu son bras de fer avec le libéral Christian Lindner, son collègue des finances.

En effet, M. Pistorius avait demandé une rallonge de 6,7 milliards d’euros et de « sortir » les dépenses militaires allemandes du « frein à l’endettement ». Même si, l’an prochain, l’Allemagne respectera encore la norme de l’Otan en consacrant 2 % de son PIB à sa défense, ce sera essentiellement grâce au fonds spécial de la Bundeswehr, doté de 100 milliards d’euros.

En attendant, en 2025, la Bundeswehr devra se « contenter » d’un budget ordinaire de 52 milliards d’euros. « Oui, j’ai obtenu nettement moins que ce que je souhaitais. C’est ennuyeux pour moi, car je ne peux pas lancer certaines choses à la vitesse requise par le changement d’époque et l’état de la menace », a commenté M. Pistorius, alors qu’il assistait à l’exercice Arctic Defender 2024, en Alaska, le 8 juillet. « Nous verrons ce qui se passera dans les semaines et les mois à venir. Je dois m’y adapter et en tirer le meilleur parti », a-t-il ajouté.

L’Allemagne parviendra-t-elle à maintenir le niveau de ses dépenses militaires à 2 % du PIB une fois que le fonds spécial sera épuisé ? Telle est la question… « Compte tenu de l’état de la menace, nous avons besoin d’une pérennisation », a déclaré le général Carsten Breuer, le chef de la Bundeswehr, dans les pages de la Süddeutsche Zeitung. D’autant plus que l’achat de nouveaux équipements implique une hausse des coûts de fonctionnement. « A quoi sert un nouvel équipement si les soldats ne peuvent pas les utiliser ? », a-t-il ainsi demandé.

Quoi qu’il en soit, le ministère allemand de la Défense a multiplié les contrats ces dernières semaines, notamment dans les domaines des munitions [accord-cadre de 8,5 milliards d’euros attribué à Rheinmetall pour des obus de 155 mm], de la logistique [accord-cadre de 3,5 milliards pour des camions] ou encore l’espace [marché de 2,1 milliards confié à Airbus pour des satellites de télécommunications SatcomBw 3].

Cette liste exhaustive vient d’être complétée par le feu vert accordé par la commission des Finances du Bundestag [chambre basse du Parlement] à la commande de 105 chars Leopard 2A8 supplémentaires. C’est en effet ce qu’a annoncé le ministère allemand de la Défense, ce 12 juillet.

Pour rappel, ce projet d’achat avait opportunément « fuité » dans la presse le 20 juin dernier, soit au moment où M. Pistorius négociait la hausse du budget de la Bundeswehr.

À noter que, selon le communiqué du ministère, cette autorisation a été accordée par les députés le 3 juillet, soit deux jours avant les arbitrages budgétaires annoncés par Olaf Scholz, le chancelier allemand.

Le montant du contrat pour ces 105 Leopard 2A8 s’élève à 2,9 milliards d’euros. Il sera financé à la fois par le fonds spécial de la Bundeswehr et le budget ordinaire du ministère de la Défense. Devant principalement être affectés à la brigade blindée allemande déployée en Lituanie, ils entreront en service entre 2027 et 2030. Selon des documents budgétaires évoqués par l’agence Reuters, le coût de possession de ces chars a été estimé à 750,53 millions d’euros pour la période 2032-40.

« Avec le Leopard 2 A8, le bataillon de chars de la brigade stationnée en Lituanie disposera du meilleur équipement possible pour protéger le flanc nord-est de l’Otan », a assuré le ministère.

Au total, la Bundeswehr disposera de 123 Leopard 2A8, 18 ayant été commandés en 2023 afin de remplacer les Leopard 2A6 fournis à l’armée ukrainienne.

Pour rappel, dérivé du Leopard 2A7HU acquis par la Hongrie, le Leopard 2A8 est doté d’un nouveau groupe motopropulseur, d’un système de protection active, de capteurs optroniques améliorés et d’une numérisation plus poussée.