L’École du personnel navigant d’essais et de reception utilise un avion électrique pour former ses stagiaires

Même si le trafic aérien ne représente que 2 à 3% des émissions mondiales de CO2 d’origine humaine [soit un niveau inférieur au transport maritime] alors qu’il a connu une croissance annuelle de 5,3% depuis 1990, la filière de l’aéronautique n’échappera pas à la « décarbonation » de ses activités afin d’arriver à une « neutralité carbone » à l’horizon 2050.

Selon un rapport de l’Institut Montaigne, quatre pistes sont privilégiées pour atteindre cet objectif : l’optimisation des opérations au sol et en vol [7% de l’effort], des mesures de compensation [6%], les carburants alternatifs [53%] et les développements technologiques [34%]. Et sur ce dernier point, le document avance que « plusieurs concepts sont à l’étude, les plus emblématiques portant sur la propulsion [hybride] électrique d’une part et sur la propulsion à l’hydrogène d’autre part ».

S’agissant des aéronefs militaires, l’accent est surtout mis sur le développement de « carburants d’aviation durables » [SAF – Sustainable Aviation Fuel], élaborés à partir de sources autres que le pétrole. En février, la Direction générale de l’armement [DGA] a d’ailleurs fait voler un hélicoptère NH-90 utilisant ce type de produit, fourni par TotalEnergies.

Cependant, une telle approche peut avoir des limites pour les avions de combat. Du moins, pour le moment. C’est en effet ce qu’a souligné Éric Trappier, le Pdg de Dassault Aviation, lors d’une récente audition au Sénat.

« La question est de savoir s’il faut décarboner le militaire. Si on arrêtait les guerres, on y gagnerait dans ce domaine. Mais malheureusement l’idée est plutôt d’essayer de les éviter. Pour cela, il faut être prêt, en se dotant d’avions de combat qui coûtent cher à développer et à fabriquer. Le but est qu’ils soient efficaces. Le sujet n’est donc pas la décarbonation et l’empreinte de CO2 des avions de combat. Peut-être pourront-ils utiliser du fioul alternatif un jour, dès lors que ça ne dégrade pas leurs performances. En effet, si pour des raisons de décarbonation vous dégradez la performance qui vous a coûté cher, il y a un problème de cohérence », a-t-il expliqué.

Pour rappel, les aéronefs représentent actuellement environ 50% des besoins énergétiques du ministère des Armées. Aussi, toute initiative qui permettrait de faire baisser cette consommation tout en maintenant l’activité aérienne est bonne à prendre.

En 2021, à l’issue d’un vol entre Toussus-le-Noble et Villacoublay à bord d’un Pipistrel Alpha Electro de la Fédération française aéronautique [FFA], le général Philippe Lavigne, alors chef d’état-major de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE], avait affirmé que l’avion électrique allait « très certainement » représenter un « complément intéressant dans le syllabus de formation » des futurs pilotes tout « en s’inscrivant dans la transition écologique » du ministère des Armées.

En attendant, la DGA Essais en Vol [DGA EV] a pris de l’avance dans ce domaine puisqu’elle vient de recevoir, à Istres, un avion électrique Velis Electro, produit par Pipistrel. « Il est destiné à former les stagiaires de l’École du personnel navigant d’essais et de réception [EPNER] », a-t-elle indiqué, via Twitter.

Propulsé par un moteur alimenté par accumulateurs lithium-ion thermorégulés par liquide, le Velis Electro est un avion biplace configuré pour le vol en double commande. D’une masse de 428 kg à vide [600 kg avec sa charge utile], il peut parcourir 200 km à la vitesse de croisière de 90 noeuds et à l’altitude maximale de 16’000 pieds [théorique]. Son endurance est d’une heure, avec une réserve de 30 minutes supplémentaires.

La DGA EV n’a pas donné de détails sur le retour d’expérience [RETEX] des stagiaires et des instructeurs de l’EPNER. Cependant, utilisant des Velis Electro depuis juin 2021, l’École nationale de l’aviation civile [ENAC] a récemment indiqué que cet avion électrique présente plusieurs avantages : il est « particulièrement silencieux » et, évidemment, il n’émet pas de gaz à effet de serre. En revanche, à cause de « sa très faible autonomie », il est nécessaire d’adapter la formation des stagiaires « aux temps de charge ».

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