La FDA Forbin tire un Aster 15 en mode dégradé tandis que la FREMM Bretagne s’initie au combat collaboratif

Dans son plan stratégique « Mercator », actualisé en janvier 2021, la Marine nationale avait souligné la nécessité d’intensifier la préparation opérationnelle de ses unités afin de « mener et gagner des combats navals », tout en développant de nouveaux concepts adaptés à l’évolution des menaces. « Nous avons l’ambition de poursuivre et de valoriser toujours davantage les tirs de munitions complexes au cours d’exercices réalistes », avait ensuite expliqué l’amiral Pierre Vandier, son chef d’état-major [CEMM].

Parmi les nouveaux concepts devant lui permettre de faire la différence en cas d’engagement, la Veille coopérative navale [VCN] vise à établir une situation tactique grâce à l’échange de données collectées par différents capteurs installés à bord de plusieurs navires… afin d’effectuer un « tir en réseau » pour écarter une menace ou détruire un adversaire.

La VCN « permet à une force d’échanger désormais en temps immédiat les détections de ses radars. Chaque navire [qui en est] équipé peut bénéficier en quelques millisecondes des données radar des autres navires, élargissant sa connaissance de la situation tactique. Cette capacité vise à améliorer très significativement la performance de détection et le préavis de mise en œuvre des moyens de défense anti-aérienne face aux nouvelles menaces de plus en plus rapides ou furtives, ainsi qu’en environnement brouillé », avait ainsi expliqué la Direction générale de l’armement [DGA].

En 2019, la Frégate de défense aérienne [FDA] Forbin avait expérimenté une première capacité de tir en réseau en se basant sur des données communiquées par la FREMM Languedoc. Puis, deux ans plus tard, elle en avait fait autant avec, cette fois, la frégate De Zeven Provincien, de la Marine royale néerlandaise lors de l’exercice Formidable Shield 21. À cette occasion, elle avait tiré un missile surface-air Aster 30 et détruit une cible représentative d’un missile anti-navire supersonique.

« Cette capacité de rupture repose sur un protocole d’échange de données radar conçu par la DGA et Naval Group », avait alors souligné le ministère des Armées. Et d’ajouter : « L’expérimentation binationale réalisée avec les Pays-Bas, inédite avec un navire allié, constitue donc une première en Europe. Elle démontre également que le protocole employé est un standard d’interopérabilité pour les échanges VCN ».

Cela étant, cette expérimentation impliquant un navire allié n’a pas été renouvelée par la suite. En revanche, elle a été rééditée… mais avec la FDA Chevalier Paul et la FREMM Bretagne, durant l’édition 2023 de l’exercice Formidable Shield.

« L’objectif était de tester la capacité de la FREMM à traiter une cible particulièrement rapide, évoluant quelques mètres au-dessus de la surface, et d’évaluer in situ l’apport de la Veille coopérative navale. Ce système de VCN a permis à la Bretagne d’utiliser la vision radar du Chevalier Paul pour augmenter le préavis de détection et améliorer la probabilité d’interception de la cible supersonique », a en effet indiqué la Marine nationale, le 31 mai.

Les FDA sont équipées du radar de veille air tridimensionnel S1850M de Thales, lequel permet de suivre jusqu’à un millier de cibles dans un rayon de 400 km.

Comme l’explique la Marine nationale, la cible a été détectée quelques secondes après son lancement par le radar du Chevalier Paul, puis par celui de la Bretagne. Immédiatement classée comme étant hostile, elle a été « automatiquement assignée au système d’armes » et la FREMM a ensuite « tiré un missile Aster 30 ralliant aussitôt la trajectoire d’interception de la cible ».

Cette séquence a atteint plusieurs objectifs puisqu’elle a permis de vérifier les performances du système Aster 30 de la FREMM Bretagne, de valider l’apport de la VCN, d’entraîner les équipages et de « démontrer les performances » des deux navires engagés « à nos compétiteurs ».

Par ailleurs, et dans un autre contexte, le Forbin a également pris part à un entraînement « complexe » au large de Toulon, avec l’assistance de la DGA. En effet, la FDA a tiré un missile Aster 15 [d’une portée de 30 km] pour neutraliser une « menace aérienne à trajectoire complexe, dans une situation tactique de vulnérabilité de la frégate en raison d’un emploi volontairement restreint de ses radars de détection aérienne », fait savoir la Marine nationale, ce 1er juin.

La cible en question était un drone Banshee Jet 80 de la DGA Essais de Missile, mis en oeuvre depuis le site du Levant.

Évidemment, pour rendre cet exercice le plus réaliste possible, l’équipage du Forbin n’avait pas été prévenu de ce qui allait arriver. Et, malgré des capteurs mis hors service [et donc le fonctionnement en mode dégradé], il a « réagi avec une grande efficacité », se félicite la Marine nationale. « Le travail conjoint des équipes du central opérations, notamment l’officier de quart opérations [OQO] et l’officier de désignation d’objectifs [ODO] ayant permis le déclenchement du tir du missile Aster 15 », conclut-elle.

Photo : Marine nationale

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