Otan/Kosovo : Au moins 30 soldats de la KFOR ont été blessés lors de heurts avec des manifestants serbes

En septembre 2021, l’intervention de la police kosovare pour faire lever des barrages érigés par les Serbes du Kosovo pour protester contre l’obligation de remplacer les plaques minéralogiques de leurs véhicules délivrées par la Serbie donna lieu à de vives tensions, au point que Belgrade déploya une force de réaction rapide à la frontière.

« Ce dont nous avons été témoins dans le nord du Kosovo pourrait être qualifié d’épisode d’ecchymose, mais aurait pu se transformer en une véritable hémorragie », commenta, plus tard, Zahir Tanin, le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo, devant le Conseil de sécurité.

Depuis, la situation demeure explovise. Fin 2022, la décision prise par plusieurs partis politiques serbes de boycotter les élections locales, l’arrestation d’un policier serbe soupçonné d’être impliqué dans la contestation contre le mesure relatives aux plaques d’immatriculation et l’impossibilité pour le patriarche de l’Eglise orthodoxe serbe, Porphyre, de se rendre au monastère patriarcal de Peć, relancèrent les tensions. Et, à nouveau, Belgrade mit ses forces armées en état d’alerte à la frontière, la cheffe du gouvernement serbe, Ana Brnabic, ayant même évoqué l’éventualité d’un « conflit armé à cause des mesures unilatérales de Pristina ».

Cela étant, la KFOR [la force déployée par l’Otan au Kosovo depuis 1999, ndlr], la MINUK [Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo] et la Mission civile État de droit de l’Union européenne [EULEX Kosovo] contribuèrent à la « désescalade », les États-Unis et l’UE ayant alors appelé les parties à « faire preuve du maximum de retenue » et à « s’abstenir de toute provocation, menace ou intimidation ».

Toujours est-il que le feu couve toujours. La semaine passée, l’intervention des forces spéciales de la police kosovare pour permettre à trois maires albanophones, récemment élus à la faveur d’un scrutin controversé, de prendre leurs fonctions dans les localités majoritairement serbes de Zvecan, de Leposlavic et de Zubin Potok, a de nouveau mis le feu aux poudres. Et, encore une fois, Belgrade, où le pouvoir est par ailleurs contesté, a mis ses forces armées en état d’alerte « maximale » jusqu’à nouvel ordre et leur a ordonné de « se mettre en mouvement » en direction de la frontière avec son ancienne province.

Via un communiqué diffusé le 27 mai, les États-Unis, l’Allemagne, le Royaume-Uni, la France et l’Italie ont enjoint à Pristina de « revenir immédiatement sur sa décision » de déployer les forces spéciales de sa police. Quant à l’Otan, sa porte-parole, Oana Lungescu, a appelé « les institutions au Kosovo à une désescalade immédiate » et exhorté « toutes les parties à résoudre la situation par le dialogue ».

Mais, visiblement, le Premier ministre kosovar, Albin Kurti, n’entend rien céder. S’il a dit comprendre les « préoccupations » des « partenaires occidentaux » de Pristina, celui-ci a affirmé que « toute autre option reviendrait à ne pas remplir les obligations constitutionnelles ». Et d’ajouter : « J’invite tout le monde, en particulier les citoyens serbes du Kosovo, à coopérer avec les nouveaux maires et leurs cabinets, qui seront multiethniques, multiculturels, multilingues ».

Cela étant, la KFOR a depuis déployé des troupes pour assurer la protection des trois mairies concernées contre les manifestants serbes. Ce qui, le 29 mai, à Zvecan, a donné lieu à des heurts, au cours desquels une trentaine de soldats de l’Otan et une cinquantaine de Serbes – selon Belgrade – ont été blessés.

« Alors qu’ils combattaient les franges les plus actives des manifestants, plusieurs soldats des contingents italien et hongrois de la KFOR ont fait l’objet d’attaques et subi des blessures traumatiques avec des fractures et des brûlures dues à l’explosion d’engins incendiaires », a en effet dénoncé la force de l’Otan.

Le ministre hongrois de la Défense, Kristof Szalay-Bobrovniczky, a ensuite précisé que vingt soldats ont été blessés, dont sept grièvement, au point qu’ils seront rapatriés en Hongrie pour y être soignés.

De son côté, et alors que onze militaires transalpins ont été blessés [dont trois seraient dans un état grave], la présidente du Conseil italien, Georgia Meloni, a condamné une situation « absolument inacceptable et irresponsable ». Et d’estimer qu’il est « vital d’éviter de nouvelles actions unilatérales de la part des autorités kosovares » avant de demander à « toutes les parties concernées de prendre immédiatement du recul pour apaiser les tensions ».

Seulement, on n’en prend pas vraiment le chemin… ainsi, la présidente kosovare, Vjosa Osmani, a accusé son homologue serbe, Aleksandar Vučić, de chercher à déstabiliser le Kosovo.

« Des structures serbes illégales transformées en gangs criminels ont attaqué la police du Kosovo, des militaires de la KFOR et des journalistes. Ceux qui exécutent les ordres de Vučić de déstabiliser le nord du Kosovo doivent faire face à la justice », a en effet affirmé Mme Osmani.

En réponse, M. Vučić s’en est pris au Premier ministre kosovar, en l’accusant de « créer des tensions ». Et s’il a appelé les Serbes du Kosovo à éviter les affrontements avec la KFOR, il a également ordonné de relever la préparation au combat des forces serbes au « plus haut niveau ». C’est à dire qu’il a donné des « instructions supplémentaires pour le déploiement d’unités dans des positions spécifiques et désignées », a expliqué Milos Vucevic, le ministre serbe de la Défense.

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