Le Pentagone évalue le rapport « bénéfice/risque » de ses vols de drones au-dessus de la mer Noire

La vidéo produite par le Pentagone est formelle : la perte d’un drone MALE [Moyenne Altitude Longue Endurance] MQ-9 Reaper, alors en mission de renseignement dans l’espace aérien international de la mer Noire, a bien été causée par le comportement des pilotes des deux Su-27 « Flanker » venus l’intercepter. Et contrairement à ce qu’a pu avancer Moscou, l’un des deux avions est bien entré en collision avec l’appareil américain.

Reste à voir si la manoeuvre des pilotes russes était intentionnelle. Dans son communiqué relatif à cet incident, le commandement militaire américain en Europe [US EUCOM] a écarté cette hypothèse, en laissant entendre que la collision était accidentelle. Mais sans doute qu’il a soigneusement choisi ses mots pour éviter une possible « escalade ».

En attendant, les deux pilotes russes impliqués dans la perte du drone ont quant à eux été récompensés par leur ministre, Sergueï Choïgou, au motif qu’ils auraient empêché une « violation de l’espace aérien de la Fédération de Russie » par le MQ-9 Reaper… qui évoluait à environ 40/50 nautiques des côtes de la Crimée au moment des faits.

Quoi qu’il en soit, M. Choïgou a fait valoir que les « causes » de cet incident étaient liées à la « non-observation par les États-Unis de la zone de limitation des vols » établie unilatéralement par la Russie pour ses opérations militaires en Ukraine ainsi qu’au « renforcement des activités de renseignement contre les intérêts de la Russie ». Et d »ajouter : « La Russie ne souhaite pas une telle évolution des événements mais elle réagira désormais proportionnellement à toute provocation ».

Cela étant, l’incident du Reaper n’est pas le premier du genre… L’automne dernier, un Su-27 Flanker avait tiré un missile air-air à proximité d’un RC-135 Rivet Joint britannique, alors en mission dans l’espace aérien international de la mer Noire. Moscou mit cela sur le dos d’un « dysfonctionnement technique »… Ce qui ne convainquit par Londres, qui fit ensuite escorter avions « espions » par des chasseurs Eurofighter Typhoon, quitte à consommer le potentiel de ces derniers [et à poser des soucis à la Royal Air Force].

Qu’en sera-t-il pour les drones américains? Prendre une mesure identique à celle des Britanniques n’aurait pas de sens, sauf à considérer qu’elle en vaut vraiment la chandelle. Un Reaper ou Global Hawk [de type HALE, pour Haute Altitude Longue Endurance] pouvant rester des heures dans une zone « d’intérêt », cela supposerait, en plus des chasseurs supposés les escorter, des avions ravitailleurs. Ce qui serait d’autant plus onéreux et insoutenable que les drones doivent justement permettre d’économiser le potentiel des forces aériennes américaines.

Quoi qu’il en soit, selon CNN, le Pentagone est en train d’évaluer le rapport « bénéfice/risque » des missions menées par ses drones dans la région de la mer Noire… et de chercher des solutions pour éviter un nouvel incident avec les forces russes. Ce qui passerait, par exemple, par une modification des plans de vol afin de ménager la suceptibilité de Moscou. Seulement, deux arguments s’y opposent.

D’après un « haut responsable militaire » américain cité par CNN, le premier serait que des plans de vol ainsi modifiés pourraient avoir un « impact sur la collecte de renseignements liés à la guerre en Ukraine ». Quant au second, cela reviendrait à légitimer le comportement des pilotes russes.

En attendant, les vols de drones au-dessus de la mer Noire continuent. Ainsi, ce 17 mars, et selon les données fournies par les sites de suivi du trafic aérien, un RQ-4 Global Hawk [qui vole plus haut qu’un Reaper, soàt 18’000 mètres d’altitude, ndlr] a décollé de Sigonella [Italie/Sicile] et mit le cap vers la Crimée. Mais, a priori, sa mission a été « plus courte que d’habitude ».

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]