Pour le Délégué général de l’armement, les câbles posés au fond des mers ne permettent pas la détection des sous-marins

L’histoire des sous-marins se confond avec celle des moyens imaginés pour les détecter… Ainsi, durant la Première Guerre Mondiale, la Royal Navy avait imaginé une « boucle de détection » [c’est à dire un câble posé en boucle au fond de la mer] dont le principe reposait sur l’induction électromagnétique. Ce procédé fut ensuite constamment amélioré lors de la Seconde Guerre Mondiale.

Dans les années 1950, l’US Navy déploya un réseau d’hydrophones, appelé SOSUS [SOund SUrveillance System] afin de repérer les sous-marins soviétiques s’approchant du territoire américain. Au moins quatre lignes « SOSUS » furent mises en service : CAESAR [côte occidentale des États-Unis], COLOSSUS [côte orientale], BARRIER [pour la zone dite GIUK – Groenland, Islande, Royaume-Uni – fréquentée par les navires soviétiques pour rejoindre l’Atlantique] et BRONCO [vers la Sibérie et l’Asie orientale].

Pour autant, si les moyens de détections ont progressé, les sous-marins ont aussi évolué sur le plan technologique, ceux-ci étant toujours plus discrets. Notamment ceux à propulsion nucléaire. D’ailleurs, l’existence du système SOSUS n’a jamais remis en cause les patrouilles de sous-marins soviétiques… Et elle n’a pas non plus été un frein au développement de la composante océanique française, qui assura sa première patrouille avec le sous-marin nucléaire lanceur d’engins [SNLE] Le Redoutable en 1971.

Cela étant, la question qui peut se poser est de savoir si le progrès technologique assurera toujours à un SNLE [ou à un sous-marin nucléaire d’attaque] d’échapper à de nouveaux moyens de surveillance plus élaborés. Durant la dernière élection présidentielle, le candidat de la La France insoumise [LFI], Jean-Luc Mélenchon, avait évoqué la « fin de l’indétectabilité des sous-marins », estimant que la « crédibilité à vingt ou trente ans » de la dissuasion française était « incertaine ».

« Selon certains, l’immense réseau des câbles sous-marins qui traversent le monde pourrait constituer un excellent support à des moyens clandestins de détection des objets sous-marins. L’utilisation massive de drones pourrait aussi atteindre cet objectif », avait-il expliqué dans son programme dédié aux affaires de défense.

Sauf que cette « menace » évoquée par l’ex-candidat à l’Élysée n’est pas fondée. Un an plus tard, lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le Délégué général pour l’armement [DGA], Emmanuel Chiva, lui a en effet tordu le cou.

« Nous cherchons à améliorer notre connaissance des technologies de surveillance utilisées par les autres nations. Cette démarche, pilotée par le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale [SGDSN], concerne tous les dispositifs – fixes ou non – qui permettraient de détecter nos sous-marins », a d’abord précisé le DGA.

« Je sais que certaines tribunes ont évoqué le fait que nos sous-marins pourraient être détectés par des câbles ou d’autres dispositifs. Ce n’est pas le cas. D’un point de vue technologique, de telles détections ne sont pas crédibles au plan pratique. Ce serait comme de chercher ses lunettes sous un lampadaire parce qu’il y a de la lumière », a ensuite affirmé M. Chiva. Et d’ajouter : « Il faudrait peupler massivement l’ensemble des fonds marins de systèmes d’écoute passive pour parvenir à trouver des sous-marins aujourd’hui dilués dans la profondeur des océans ».

Qui plus est, il faudrait que les sons puissent parvenir à ces câbles de télécommunications, qui reposent parfois à plusieurs milliers de mètres sous la mer. Et c’est sans compter sur le « bruit de fond » et autres sons « parasites »…

Cela étant, M. Chiva n’a pas répondu sur « l’utilisation massive de drones ». Mais ceux-ci seraient dotés des mêmes capacités de détection dont disposent les navires de lutte anti-sous-marine… Et les SNLE et les SNA sont justement conçus pour échapper à leur vigilance.

Cependant, a assuré le DGA, les évolutions technologiques font l’objet d’un veille rigoureuse. Et une vulnérabilité potentielle de la composante océanique de la dissuasion concerne les… transmissions.

« Nous veillons à ce que nos systèmes de transmissions ne soient pas vulnérables à un déchiffrement par un ordinateur quantique. De la même manière, nous prenons en compte ce que l’intelligence artificielle pourrait permettre, notamment en matière de précision des systèmes d’armes », a expliqué M. Chiva.

« En ce qui concerne la capacité à mieux traiter l’information pour obtenir une meilleure précision en matière d’alerte avancée, nos compétiteurs comme nos adversaires utilisent déjà ce type de techniques, sans que cela ne remette en cause les fondements de notre dissuasion. Nous devons néanmoins poursuivre cette veille active en matière d’innovation, en gardant à l’esprit l’horizon 2050 ou 2060 », a conclu le DGA.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]