La Belgique dit enquêter sur la présence d’un navire espion russe près de ses infrastructures sensibles

Cinq mois après les faits, les investigations menées par le Danemark, la Suède et l’Allemagne sur les explosions ayant mis hors service les gazoducs NordStream 1 et NordStream 2, chargés d’acheminer le gaz naturel russe vers l’Europe via la Baltique, sont au point mort. C’est en effet ce qu’ont admis ces trois pays auprès du Conseil de sécurité des Nations unies, réuni le 21 février à la demande de la Russie, qui réclame une « enquête indépendante » sur ce sabotage.

« Ces enquêtes ne sont pas encore terminées. À ce stade, il n’est pas possible de dire quand elles le seront », ont en effet fait valoir les autorités des trois pays concernés.

Lors de cette réunion du Conseil de sécurité, l’ambassadeur de Russie auprès des Nations unies, Vassily Nebenzia, a déclaré que Moscou demandait une « enquête indépendante » en raison de ses « doutes sur l’intégrité et la transparence du Danemark, de l’Allemagne et de la Suède ». Le secrétaire général de l’ONU « est quelqu’un en qui nous avons confiance » pour mener les investigations sur ce sabotage, a-t-il ajouté.

En outre, le diplomate russe n’a pas manqué de reprendre à son compte les affirmations du journaliste d’investigation américain Seymour Hersh, selon qui les explosions ayant visé les deux gazoducs auraient été provoquées par les États-Unis, avec la complicité de la Norvège. Seulement, ses allégations ne reposent sur aucune preuve et se basent sur les confidences d’une seule source…

Cela étant, la Russie a fait témoigner deux personnalités [de nationalité américaine], dont l’économiste Jeffrey Sachs, directeur du Centre pour le Développement Durable de l’Université Columbia de New York, et Ray McGovern, ancien analyste de la CIA devenu activiste politique. L’un et l’autre ont défendu la thèse de Seymoyr Hersch.

De son côté, John Kelley, l’homologue américain du diplomate russe, a répondu que cette réunion était une « tentative flagrante de détourner l’attention du débat à venir à l’Assemblée générale sur l’impact de l’invasion de l’Ukraine par la Russie ».

Et d’ajouter : « Ce n’est pas la première fois que la Russie utilise son siège au sein de ce Conseil pour amplifier les théories du complot sur Internet. Nous souhaitons qu’elle applique la même urgence dont elle a fait preuve ces trois derniers jours à la multitude de rapports incroyables sur les violations des droits de l’homme et du droit humanitaire international causées par ses forces d’invasion ».

En outre, le diplomate américain a aussi qualifié de « fausses » les préoccupations de Moscou au sujet des infrastructures civiles, que ses troupes prennent pour cibles en Ukraine. Et il aurait pu également citer la présence régulière de navires russes près des câbles de télécommunications et des réseaux énergétiques sous-marins…

Ainsi, pendant que le Conseil de sécurité débattait de la demande d’une enquête « indépendante » sur le saborage de NordStream 1 et de NordStream 2, la Belgique a dit avoir ouvert une enquête sur le comportement suspect d’un navire espion russe près de zones où sont localisés des parcs éoliens, des gazoducs sous-marins et des câbles de communication. L’annonce a été faite non pas par la Défense belge… mais le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne.

Ainsi, répéré en novembre dernier, ce bateau russe « aurait eu l’intention de répertorier des infrastructures sensibles, telles que des parcs éoliens, des gazoducs sous-marins et des câbles de communication et de transmission de données », a expliqué le ministre belge.

« Tout est mis en oeuvre pour contrer ce genre d’activité(s) suspecte(s), notamment via l’achat cette année d’un nouveau logiciel spécial ainsi que via une nouvelle loi sur la sûreté maritime entrée en vigueur début 2023 et qui permet entre autres la surveillance par caméra en mer », a-t-il par ailleurs assuré, sans préciser si une action avait été menée pour chasser ce navire espion de ces zones sensibles.

« La présence de navires russes en mer du Nord n’est pas interdite en soi, mais nous surveillons cela de près. Nous ne connaissons pas les motivations exactes de ce navire russe, mais ne soyons pas naïfs. Surtout s’il se comporte de manière suspecte à proximité de nos parcs éoliens, de nos gazoducs et câbles de données sous-marins et d’autres infrastructures critiques. Nous prenons d’ailleurs les mesures nécessaires pour mieux les sécuriser », a seulement commenté M. Van Quickenborne.

Le navire en question serait le même dont le général Jan Swillen, le chef du renseignement militaire néerlandais [MIVD] a décrit les activités lors d’uin conférence de presse donnée le 20 février. Pour rappel, celui-ci a affirmé « qu’il y a quelques mois », un bâtiment russe avait été « escorté » par la marine royale des Pays-Bas après avoir tenté de « cartographier » des parcs éoliens offshore. « Ce que nous avons vu ces derniers mois, c’est que des acteurs russes essaient de comprendre comment l’approvisionnement énergétique en mer du Nord est organisé, avec l’intention de le perturber », a-t-il ensuite accusé.

Évidemment, quand il est question d’infrastructures sous-marines, on pense au navire russe « Yantar »… Mais, a priori, ce ne serait pas lui que les autorités belges et néerlandaises mettent en cause. En revanche, il est possible que le bateau en question soit « l’Amiral Vladimirsky », un navire de recherche océanographique affecté à la flotte de la Baltique. En novembre denrier, celui-ci s’était en effet attardé au large de l’Écosse, après avoir navigué près de champs pétroliers et gaziers. Un autre bâtiment, l’Akademik Boris Petrov, appartenant à l’Institut russe d’océanologie PP Shirshov, avait également été repéré en mer du Nord, quasiment au même moment.

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