La France n’exclut pas de former des pilotes de chasse ukrainiens

« La Russie ne peut ni ne doit gagner cette guerre… L’agression russe doit échouer », a déclaré le président Macron, lors de la Conférence sur la sécurité de Munich, le 17 février. Puis, plus tard, face à la presse, il a précisé son propos.

« Je veux la défaite de la Russie en Ukraine, et je veux que l’Ukraine puisse défendre sa position. Mais je suis convaincu qu’à la fin ça ne se réglera pas militairement. Je ne pense pas, comme certains, qu’il faut défaire la Russie totalement, l’attaquer sur son sol. Ces observateurs veulent avant tout écraser la Russie. Cela n’a jamais été la position de la France et cela ne le sera jamais », a en effet M. Macron, pour qui aucun des deux belligérants « ne peut l’emporter entièrement ».

De son côté, dans un entretien accordé au quotidien Le Parisien, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a fait valoir que « l’agression russe » en Ukraine « doit échouer » car « c’est dans notre intérêt, pour notre sécurité collective, en Europe comme d’ailleurs en Afrique », au-delà du fait que « la Russie de Vladimir Poutine est source de
crimes et de désordre bien au-delà du territoire ukrainien ».

D’où l’aide militaire que Paris apporte à Kiev. Actuellement, celle-ci prend la forme d’un fonds de soutien doté de 200 millions d’euros, afin de permettre aux forces ukrainiennes d’acquérir les matériels dont elles ont besoin auprès de l’industrie française de l’armement. Et elle passe évidemment par la cession de carburants, de munitions, d’équipements individuels et d’armements, comme les CAESAr, les canons TRF1, les lance-roquettes unitaires [deux ont été livrés, nldr] les systèmes sol-air CROTALE et Mamba ou encore les chars légers AMX-10RC, dont les premiers exemplaires arriveront très bientôt en Ukraine.

« Les formations [des militaires ukrainiens] sont sur le point de s’achever, ces blindés [les AMX-10RC] vont être livrés dès la fin de la semaine prochaine », a en effet indiqué M. Lecornu dans les pages du Parisien. Combien seront cédés à l’Ukraine? Il n’a pas souhaité le dire, afin de ne « pas donner une information stratégique à la Russie ».

En revanche, le ministre a confirmé qu’aucun char Leclerc ne sera livré à l’armée ukrainienne. Pour rappel, Kiev avait fait une demande en ce sens… Seulement, les critères pour y apporter une réponse favorable ne sont pas réunis.

« Malgré ses performances exceptionnelles, le char Leclerc a eu un succès limité à l’export, c’est une réalité. Il ne peut donc pas être livré en masse à l’Ukraine pour créer un effet de levier », a explique M. Lecornu. En outre, le don de tels chars à l’Ukraine aurait affaibli les capacités de l’armée de Terre… qui n’en disposera que de 200 à l’horizon 2030.

Quant à la question des avions de combat, que Kiev réclame avec insistance après avoir fait céder l’Allemagne au sujet de la livraison de chars Leopard 2 [et Leopard 1], le président Macron a régulièrement dit que rien n’était exclu, sous réserve de respecter les mêmes critères mis pour la livraison éventuelle des Leclerc.

Or, la France pourrait éventuellement céder à la force aérienne ukrainienne des Mirage 2000C récemment retirés du service… Mais à la condition qu’une telle aide « n’affaiblisse pas les capacités militaires françaises », ne soit « pas escalatoire » et « ne permette pas de viser le territoire russe ».

Interrogé à ce sujet par le Parisien, M. Lecornu a répondu qu’il « n’y a pas de tabou ». Cela dit, a-t-il rappelé, le « transfert d’avions pose des questions logistiques et pratiques complexes ». Et d’ajouter : « La demande ukrainienne reflète un besoin de protection de leur ciel, avec des dispositifs de défense sol-air – sur lesquels la France est en pointe – et s’inscrit dans la même logique : créer une bulle de protection autour du champ de bataille ou des villes ».

La livraison d’avions de combat à l’Ukraine ne peut s’inscrire que dans le long terme… Et elle suppose d’abord de former des pilotes et des techniciens. La France serait-elle prête à aller dans cette voie, comme, du reste, le Royaume-Uni? « Rien n’est exclu », a répondu M. Lecornu.

Pour rappel, le cursus pour devenir pilote de chasse au sein de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] dure plus de trois ans. Il débute sur la BA 701 de Salon-de-Provence [instruction théorique et formation initiale en vol], puis sur la BA709 de Cognac, avec un tronc commun [sur Grob 120], suivi par une phase de spécialisation chasse [ou transport]. Et, après l’obtention du « macaron » de chasseur, vient ensuite la phase de transformation opérationnelle.

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