Attachée à sa neutralité, l’Autriche refuse d’apprendre aux soldats ukrainiens à utiliser le char Leopard 2

Au début du mois, l’Union européenne [UE] a décidé de renforcer son soutien militaire à Kiev avec le déblocage d’une nouvelle enveloppe de 500 millions d’euros au titre de la Facilité européenne pour la paix [FEP] et un effort supplémentaire de 45 millions d’euros en faveur de la Mission d’assistance militaire de l’UE en soutien à l’Ukraine [EUMAM Ukraine], avec l’objectif de porter à 30’000 le nombre de soldats ukrainiens formés par les États membres.

« L’Ukraine devrait disposer de tous les équipements militaires et de la formation dont elle a besoin pour défendre son territoire et son peuple contre la guerre d’agression menée par la Russie. Les Ukrainiens ne se contentent pas de défendre leur pays ; ils défendent également nos valeurs communes et les principes fondamentaux du droit international », a justifié Josep Borrell, le Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.

Seulement, les pays membres de l’UE ne sont pas tous sur la même longueur d’ondes. Évidemment, en disant cela, on pense à la Hongrie, dont le ministre des Affaires étrangères, Peter Szijjarto, s’est rendu en Biélorussie… alors que ce pays accord des facilités aux forces russes pour leur offensive en Ukraine. « Evidemment, beaucoup de gens vont me critiquer pour cette visite, mais notre position est claire : les canaux de communication doivent rester ouverts » et « si nous n’avions pas fait cela, je ne pourrais pas être le messager d’un appel à la paix », s’est-il défendu, le 13 février.

Mais un autre pays tient à rester à l’écart de toute aide militaire apportée à l’Ukraine [ce qui ne l’empêche cependant pas de participer au soutien financier dont bénéficier Kiev, ndlr]. En effet, l’Autriche a fait savoir qu’elle ne participera pas à la formation des militaires ukrainiens, en particulier ceux appelés à utiliser les chars Leopard 2 promis par l’Allemagne, la Pologne, la Norvége [qui a annoncé le don de 8 exemplaires, ce 14 février] ainsi que par d’autres pays membres de l’UE et/ou de l’Otan.

Pour rappel, l’armée autrichienne dispose de 48 Leopard 2, mis en oeuvre par le Panzerbataillon 14. Et celui sait s’en servir… comme en témoigne les résultats obtenus lors du Strong Europe Tank Challenge, qui était encore récemment organisé à Grafenwoehr [Allemagne] par l’US Army.

Le refus de former les soldats ukrainiens est une « décision souveraine » prise « dans le cadre de la loi », a fait valoir Claudia Tanner, la ministre autrichienne de la Défense, selon le quotidien « Kurier ». En clair, cela tient à la neutralité de l’Autriche… Neutralité à laquelle elle n’entend pas faire la moindre entorse.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, ce concept de neutralité est mis à mal… La Suède et la Finlande ont l’intention d’y renoncer dès que les portes de l’Otan leur seront ouvertes. Et l’Irlande a proposé de former des sapeurs ukrainiens au déminage.

Quant à l’Autriche, elle s’interdit de livrer des armes ou de fournir des services « militaires » à des pays en guerre. Comme la Suisse [non membre de l’UE, ndlr], qui a encore récemment refusé d’autoriser l’Espagne à livrer à l’Ukraine des canons anti-aériens de facture suisse.

Quoi qu’il en soit, la position du gouvernement est soutenue par l’opposition, dont la Parti social-démocrate autrichien [SPÖ]. « Nous devons prendre au sérieux le principe de neutralité. Nous ne fournissons pas d’armes aux parties belligérantes, il serait absurde de proposer maintenant une formation à des systèmes d’armes tels que les chars de combat », a commenté Robert Laimer, son porte-parole pour les affaires de défense.

Cela étant, la formation des soldats ukraniens devrait revenir exclusivement aux pays qui ont proposé de fournir des Leopard 2. D’ailleurs, la Pologne – qui en a promis 14 exemplaires – vient d’accueillir son premier contingent à cette fin.

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