La Pologne pourrait se passer de l’autorisation de Berlin pour livrer des chars Leopard 2 PL à l’Ukraine

Pour contrer une éventuelle nouvelle offensive russe de grande ampleur d’ici le printemps prochain, l’Ukraine espérait obtenir des chars occidentaux – en particulier les Leopard 2 de conception allemande – lors de la réunion des cinquante pays qui la soutiennent, tenue le 20 janvier à Ramstein [Allemagne], sous la présidence de Lloyd Austin, le secrétaire américain à la Défense. Elle devra encore attendre, même si le Royaume-Uni et la France lui avaient déjà respectivement promis 14 Challenger 2 et des AMX-10RC [considérés comme des « chars légers »].

Pourtant, avant cette réunion, la Pologne s’était dit prête à livrer 14 Leopard 2PL à l’armée ukrainienne… Et la Finlande n’avait pas écarté l’idée d’en faire de même. Seulement, pour qu’un tel transfert puisse se faire, il faut l’accord du gouvernement allemand. Or, le chef de celui-ci, le chancelier Olaf Scholz, ne souhaite pas le donner. Du moins pour le moment.

D’après des sources gouvernementales allemandes citées par le Wall Street Journal, l’Allemagne pourrait accepter la livraison de Leopard 2 à l’Ukraine qu’à la condition que les États-Unis en fassent autant avec leurs chars M1 Abrams.

Mais pour les responsables de la défense américaine, l’armée ukrainienne n’aurait pas la capacité, en l’état actuel de sa situation, de mettre en oeuvre des Abrams. Car il ne suffit par de donner des armes… Encore faut-il pourvoir se les approprier, les entretenir et les réparer le cas échéant. C’est un « char très compliqué et cher, qui requiert une formation difficile », a ainsi résumé Colin Kahl, le nuiméro trois du Pentagone. Aussi, Washington a préféré mettre l’accent sur l’artillerie et les véhicules de combat d’infanterie [VCI], comme les Bradley et les Stryker.

Cela étant, la réunion de Ramstein était l’occasion de faire bouger les lignes. Et le président ukrainien, Volodymyr Zelenski, avait préalablement mis la pression sur Berlin. « Il y a des moments où l’on ne devrait pas hésiter ou se comparer », avait-il dit, en visioconférence, en marge du forum de Davos.

Seulement, l’Allemagne, où la coalition gouvernementale est divisée sur cette question, a maintenu sa position… Et aucun accord n’a pu être trouvé sur la livraison de chars à l’armée ukrainienne.

« Nous ne pouvons pas dire aujourd’hui quand [une décision sera prise] et quelle sera la décision sur les chars Leopard », a déclaré Boris Pistorius, le nouveau ministre allemand de la Défense, à l’issue de la réunion. « Nous n’hésitons pas, nous pesons simplement le pour et le contre […] Nous avons la responsabilité de réfléchir attentivement aux conséquences pour toutes les parties au conflit », a-t-il ensuite justifé, avant d’assurer que « l’impression » selon laquelle l’Allemagne serait la seule à s’opposer à livrer des chars à l’Ukraine est « fausse ».

« Beaucoup d’alliés partagent [notre] opinion » et « il y a de bonnes raisons d’être pour et de bonnes raisons d’être contre ces livraisons », a ensuite expliqué M. Pistorius. « Il était tout à fait clair que les avis ne sont pas aussi uniformes que l’impression donnée jusqu’à présent », a-t-il conclu.

En tout cas, la Pologne s’impatiente… au point d’envisager de se passer d’une autorisation allemande pour céder ses Leopard 2 à l’Ukraine. « Nous offrons 14 chars. Mais en même temps, nous devons avoir la garantie que d’autres en feront autant. Et les moins proactifs, jusqu’à présent, pour ne pas dire plus, sont les Allemands. C’est pourquoi nous continuerons à faire pression sur la chancellerie allemande pour qu’elle réponde à notre proposition dans les plus brefs délais », avait affirmé Mateusz Morawiecki, le Premier ministre polonais, quelques heures avant la réunion de Ramstein.

Et celui-ci de prévenir : « Le consentement [de Berlin] est une question secondaire ici. Soit nous obtenons cette autorisation rapidement, sout nous ferons ce qu’il faut nous-mêmes » car la « capacité de défendre la liberté en Ukraine peut en dépendre, et donc la sécurité de toute l’Europe en dépendra ».

En attendant, Kiev ne perd pas l’espoir d’arriver à ses fins. « Oui, nous devrons encore nous battre pour la livraison de chars modernes, mais chaque jour, nous rendons plus évident le fait qu’il n’y a pas d’autre solution que la prise d’une décision concernant les chars », a en effet déclaré M. Zelinski, lors de la réunion de Ramstein.

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