La British Army veut aller vite pour moderniser son artillerie et s’interroge sur le nombre de ses chars

Publiée en mars 2021, la dernière revue stratégique de défense britannique prévoyait de réduire, une fois de plus, le format de la British Army, afin de la rendre plus « plus légère, plus meurtrière, plus agile et mieux adaptée aux menaces actuelles et futures », l’idée étant qu’elle aurait dorénavant à se concentrer principalement sur les menaces dites « hybrides », c’est à dire sur les actions menées sous le seuil d’un conflit, tout en misant sur les évolutions technologiques, en particulier dans le domaine de la robotique.

Cette orientation devait notamment se traduire par une nouvelle déflation de ses effectifs [ceux-ci passant de 82’000 à 72’500] ainsi que par la mise au rancart de 79 chars Challenger II sur les 227 qui était encore en sa possession. Quant à son artillerie, le remplacement de ses obusiers AS-90 dans le cadre du programme MPF [Mobile Fires Platform] allait attendre la prochaine décennie pour se concrétiser.

Seulement, la guerre en Ukraine a rebattu les cartes… Celle-ci « a mis en évidence le fait que la masse et la taille sont importantes », confié le général Carleton-Smith, le chef d’état-major de la British Army, à quelques jours de son départ en retraite. Et de confier qu’il n’était « pas à l’aise avec une armée de seulement 73’000 hommes », un seuil qui, selon lui, aurait été défini de façon un « peu arbitraire ».

Son successeur, le général Patrick Sanders, annonça la couleur peu après avoir pris son commandement, en affirmant que son objectif serait « d’accélérer la mobilisation et la modernisation » de la British Army afin de « renforcer l’Otan et empêcher la Russie d’aller plus loin en Europe ». Et d’insister : « Nous sommes la génération qui doit préparer l’armée à se battre à nouveau en Europe ».

Seulement, avec les ponctions faites dans sa dotation afin d’aider l’Ukraine, la British Army n’en prend pas le chemin pour le moment. D’ailleurs, dans un message adressé à ses troupes, le général Sanders l’a reconnu, après l’annonce de la livraison prochain à Kiev de 14 Challenger 2, de 30 obusiers AS-90 et d’une centaine de blindés, dont des « Bulldog ».

« L’armée ukrainienne a besoin de plus d’armes et d’équipements si elle veut maintenir son élan [contre les forces russes]. L’Ukraine a besoin de nos chars et de nos canons maintenant. Je sais qu’elle en fera bon usage. Et il ne peut y avoir de meilleure cause », a d’abord déclaré le général Sanders. Cependant, a-t-il ajouté, il est « vital de restaurer la capacité de combat » de la British Army. Aussi, a-t-il continué, l’aide fournie à Kiev « offre également l’opportunité d’accélérer sa modernisation et sa transformation ».

D’où l’annonce faite par Ben Wallace, le ministre britannique de la Défense [MoD], à la Chambre des communes. « J’ai décidé d’accélérer le programme MPF afin qu’il aboutisse dans la décennie en cours et non plus dans les années 2030. J’ai également ordonné que, sous réserve de négociations commerciales, une capacité d’artillerie provisoire nous soit livrée », a-t-il déclaré, le 16 janvier. Et d’ajouter : « Ma principale préoccupation est notre déficit en matière de tir dans la profondeur. Nous sommes à peu près dépassé par tout le monde. La portée de nos AS-90 est d’environ 23 ou 24 km. La France et tous les autres ont [des systèmes] ayant des portées de 55 km ».

Le fait que M. Wallace ait cité la France ne veut pas forcément dire que la British Army adoptera le CAESAr MkII de Nexter. D’autres industriels s’étaient mis sur les rangs en vue du programme MPF, dont le sud-coréen Hanwha Systems, avec son K-9 « Thunder », et Krauss-Maffei Wegmann, avec son système RCH155, qui peut s’adapter sur le véhicule blindé de combat d’infanterie Boxer, dont la British Army attend 623 exemplaires [après la commande de 100 unités supplémentaires en avril 2022].

Quant aux Challenger 2, les 148 qui devaient rester en dotation afin d’être portés au standard Challenger III ne paraissent désormais plus suffisants…

« Même si nous donnons des Challenger 2 [à Kiev], je vais aussi examiner le nombre qu’il nous faudra convertir en Challenger 3 et voir, en fonction des leçons de l’Ukraine, si nous avons besoin d’une flotte de chars plus importante », a affirmé M. Wallace.

Pour rappel, le Challenger 3 sera quasiment un nouveau char au regard des modifications apportées par Rheinmetall BAE Systems Land [RBSL]. Il sera en effet doté d’un canon L55A1 à âme lisse de 120 mm [et non plus d’un canon rayé incompatible avec les normes de l’Otan], d’une nouvelle tourelle, d’un blindage modulaire, d’équipements optroniques de dernière génération et d’un groupe motopropulseur amélioré.

« L’arrivée du Challenger 3 [en 2027…] signifie que nos régiments blindés disposeront de l’un des chars les plus performants au monde, doté d’une puissance de frappe bien supérieure et d’une meilleure protection », a d’ailleurs fait valoir le général Sanders.

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