L’Otan et l’Union européenne vont coopérer sur la protection des infrastructures critiques

S’il est beaucoup question des infrastructures critiques sous-marines ces derniers temps, les menaces qui pèsent sur elles ne sont pas nouvelles. Dans le dernier numéro de la revue Conflits, le capitaine de frégate François-Olivier Corman rappelle en effet que le premier acte de sabotage contre un câble sous-marin fut commis durant la guerre du Pacifique de 1879-83, le Chili ayant sectionné celui qui reliait alors Lima à San Francisco afin d’empêcher le Pérou de communiquer avec le reste du monde.

Les États-Unis en firent de même avec Cuba, lors de la guerre hispano-américaine de 1898. Et l’une des premières actions des Britanniques aux premières heures de la Première Guerre Mondiale fut de sectionner les câbles télégraphiques sous-marins qui reliaient l’Allemagne avec le reste du monde.

Les câbles de communication ne sont pas les seules cibles possibles, comme l’a montré le sabotage des gazoducs Nord Stream1 et Nord Stream2, en septembre dernier. À ce jour, les enquêtes en cours n’ont pas permis d’identifier avec certitude le coupable. Et les analyses des éléments récupérés sur les lieux [comme les traces d’explosifs] n’a pas réussi à lier « de manière concluante la Russie à l’attaque », a récemment indiqué le Washington Post.

Cela étant, le domaine des infrastructures critiques est vaste dans la mesure où il concerne « tout système essentiel à la fourniture de fonctions économiques et sociales vitales » [santé, énergie, services financiers, alimentation, sécurité, transport, systèmes d’information…]. Et celles gisant au fond des mers ne sont donc pas les seules à entrer dans cette définition.

Reste que l’Union européenne s’est emparée du sujet dès 2004, avec une communication intitulée « Protection des infrastructures critiques dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ». Puis celle-ci a été suivie par la directive « recensement et désignation des infrastructures critiques européennes et évaluation de la nécessité d’améliorer leur protection », adoptée quatre ans plus tard. D’autres initiatives ont été prises par la suite, en particulier dans le domaine de la cybersécurité.

Mais, avec la guerre en Ukraine et le sabortage des gazoducs Nord Stream 1 et Nord Stream 2, il est désormais question de renforcer davantage les infrastructures critiques des pays membres de l’UE. Le 18 octobre dernier, la Commission européenne a communiqué une proposition de recommandation visant à réaliser des « tests de résistance », en commençant par le secteur de l’énergie, à tenter de détecter les menaces potentielles au moyen de satellites et à renforcer la coopération avec l’Otan.

D’où l’annonce faite le 11 janvier. Alors qu’elles venaient de faire part de leur volonté de porter leur « partenariat à un niveau supérieur » en élargissant leur coopération à de nouveaux domaines, l’Otan et l’UE ont indiqué qu’ils allaient mettre en place un « groupe de travail » sur la résilience et les infrastructures critiques.

La président de la Commission européenne, Ursula von der Leyen a fait valoir que le sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et Nord Stream 2 avait souligné la « nécessité de faire face à ce nouveau type de menace.

« Il s’agit d’une équipe spéciale au sein de laquelle les experts de l’Otan et de l’Union européenne travailleront main dans la main afin d’identifier les principales menaces pesant sur nos infrastructures critiques et d’examiner les vulnérabilités stratégiques dont nous disposons », a expliqué Mme von der Leyen.

« La résilience et la protection des infrastructures critiques sont un élément clé de nos efforts conjoints, comme nous l’avons vu avec la militarisation de l’énergie par le président Poutine et […] le sabotage des gazoducs North Stream », a abondé Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan. « Nous voulons examiner ensemble comment rendre nos infrastructures critiques, nos technologies et nos chaînes d’approvisionnement plus résilientes aux menaces potentielles et prendre des mesures pour atténuer les vulnérabilités potentielles », a-t-il ajouté.

Ce « groupe de travail » aura à formuler des propositions en vue d’améliorer la protection des infrastructures énergétique, numériques, spatiales ainsi que celles liées au transport. Reste à voir si elles seront suivies d’effet…

En effet, en mars 2021, l’Otan avait lancé un examen sur les investissements de la Chine dans certaines infrastructures de ses membres, en particulier dans les ports, les ports, les aéroports et les télécommunications. Et cela afin de voir dans quelle mesure celles-ci pourraient être utilisées par Pékin pour réduire les capacités de l’Alliance à déplacer ses troupes. Or, plus d’un an après, le gouvernement allemand a autorisé le groupe chinois Cosco à prendre une participation au capital du port de Hambourg… Malgré les critiques suscitées par cette transaction.

Photo : Marine nationale

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