ANTARES : Selon M. Macron, le groupe aéronaval a été au contact de forces russes au « comportement inamical »

Lors du départ du porte-avions Charles de Gaulle, le 15 novembre, la Marine nationale avait insisté sur le profil « imprévisible » de la mission ANTARES à laquelle il devait alors participer avec son groupe aéronaval [GAN]. Conformément à de nouvelles directives édictées dans le cadre de la lutte infomationnelle, comme celle consistant à effacer le numéro de coque de certains bâtiments, la composition de ce dernier n’avait pas été précisée.

Cependant, avec quelques déductions, on pouvait avancer sans prendre le risque de se tromper que la frégate de défense aérienne [FDA] Forbin allait en être. Même chose pour le Bâtiment de commandement et de ravitaillement [BCR] Marne. Cela étant, le dossier de presse de la mission ANTARES évoquait la présence d’une frégate multimissions, d’un sous-marin nucléaire d’attaque [SNA], dont on avait quelques raison de penser qu’il s’agissait du Suffren, et d’un « Bâtiment escorteur polyvalent » bien mystérieux.

Finalement, la composition actuelle du GAN aura été donnée par le président Macron, à l’occasion du traditionnel Noël avec les troupes [tradition qui avait été mise entre parenthèses en 2020 et en 2021, à cause de la pandémie de covid-19 et des relations dégradées avec le Mali, où le chef de l’Élysée avait l’intention de se rendre, l’an passé].

« Cette mission ANTARES est importante pour de nombreuses raisons », a d’abord souligné M. Macron en s’adressant aux marins du Charles de Gaulle. « Les missions accomplies, les zones de patrouille, les vols ont renforcé la posture défensive et dissuasive de l’Otan à l’est de l’Europe, à proximité de l’Ukraine en guerre », a-t-il ajouté.

« La composition même du groupe aéronaval avec le Forbin, l’Alsace [Frégate multi-missions à capacité de défense aérienne renforcée ou FREMM-DA, ndlr], la Provence [FREMM, ndlr], la Marne, le Suffren, le détachement de patrouille maritime stationné à la Sude [avec un Atlantique 2, ndlr] mais aussi le destroyer américain Arleigh Burke, et avant lui, Roosevelt, la frégate italienne Virgilio Fasan et, il y a quelque temps, la frégate grecque Adrias », a détaillé le président Macron.

À noter que, en général, la Marine nationale ne donne que très rarement [voire jamais] l’identité du SNA qui accompagne le porte-avions Charles de Gaulle. En outre, la composition du GAN peut évoluer au gré de la mission. Ce qui fait que la liste donnée par M. Macron sera peut-être caduque d’ici quelques jours…

« La composition multinationale du groupe aéronaval a permis de montrer que nous sommes des alliés résolus, fiables, démontrant un haut niveau d’intégration et d’interopérabilité », s’est félicité le locataire de l’Élysée, avant d’aborder l’opération Chammal, à laquelle le GAN a récemment participé.

« Votre participation aux opérations de lutte contre le terrorisme au-dessus de la Syrie rappelle aussi au monde que notre résolution et notre capacité à combattre ce fléau en coalition restent intactes dans ce contexte », a dit M. Macron.

Est-ce durant cette phase de la mission ANTARES que des rencontres « musclées » avec les forces russes ont eu lieu? Probablement… puisque selon le président, cette résolution et cette capacité ont « aussi permis de montrer aux compétiteurs présents dans la région qu’il faut compter avec la France ».

Puis M. Macron s’est fait encore plus précis en adressant ses félicitations aux équipages du GAN pour le « professionnalisme » dont ils ont fait preuve « lors des différentes interactions avec les aéronefs et les bâtiments russes aux comportements quelques fois inamicaux ».

Dans un rapport publié par l’Assemblée nationale seulement quelques jours avant la guerre en Ukraine, les députés Jean-Jacques Ferrara et Philippe Michel-Kleisbauer expliquèrent que les militaires russes se gardaient d’avoir avec leurs homologues français le comportement « rugueux » dont ils avaient l’habitude de témoigner aux forces américaines et britanniques.

« Alors que le contact est rugueux avec les Américains et les Britanniques […], ils restent très professionnels vis-à-vis des marins français. Ce respect a des conséquences très pratiques. En septembre 2018, la frégate Auvergne a été accusée d’avoir abattu un avion russe. Grâce à ce respect, à cette confiance et aux canaux de discussion directs, la vérité a pu être rétablie et la France disculpée », avait en effet avancé M. Michel-Kleisbauer.

Depuis, la donne a changé. En juillet, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], l’amiral Pierre Vandier fit savoir, lors d’une audition parlementaire, que les Russes illuminaient « régulièrement nos bâtiments avec leurs radars de conduite de tir ». Ce qui revient à mettre un navire « en joue »… Et c’est un acte évidemment considéré comme hostile.

« Il faut avoir à l’esprit que, pour un navire de combat, la différence entre basse et haute intensité ne tient qu’aux ordres reçus », souligna le CEMM.

Sans doute finira-t-on par en savoir un peu plus sur ces « interactions » inamicales évoquées par le président Macron… En tout cas, celui-ci a donné la suite du programme de la mission ANTARES [sans en donner les échéances]. Ainsi, sans grande surprise, le GAN prendra la direction de la mer Rouge pour se rendre dans l’océan Indien, puis en Inde. Ce « sera aussi l’illustration de notre capacité à peser dans notre zone d’intérêt stratégique », a-t-il dit. Et là encore, « nos alliés seront à nos côtés mais […] avec toujours notre autonomie d’appréciation et en maîtrisant nous mêmes toute escalade », a-t-il conclu.

Photo : Marine nationale

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