Dissuasion nucléaire : Deux SNLE des forces navales américaines et britanniques manoeuvrent ensemble

Depuis que la guerre en Ukraine a commencé, le président russe, Vladimir Poutine, a averti, à plusieurs reprises, qu’il utiliserait « tous les moyens à [sa] disposition » pour défendre « l’intégrité territoriale et l’indépendance » de la Russie. Et de menace ceux qui tenteraient « d’interférer » dans l’offensive russe de « conséquences que vous n’avez encore jamais connues »… Difficile d’y voir autre chose qu’une allusion au feu nucléaire…

D’ailleurs, les forces stratégiques russes avaient été mises en alerte peu après le début de l’invasion de l’Ukraine… et elles ont depuis pris part à une nouvelle édition de l’exercice nucléaire Grom, en octobre… alors que l’Otan venait de lancer le sien, appelé « Steadfast Noon ».

Quoi qu’il en soit, le Kremlin ne se prive pas de recourir à la réthorique nucléaire, comme cela a encore été le cas la semaine passée. « La menace d’une guerre nucléaire grandit » mais « la Russie ne les utiliserait en premier en aucune circonstance », a dit M. Poutine. Et d’ajouter : « Mais si elle ne les utilise en premier en aucune circonstance, elle ne sera pas la deuxième à les utiliser non plus, car les chances de les utiliser dans le cas d’une frappe nucléaire contre notre territoire sont très minces ».

La diplomatie américaine a condamné le propos de M. Poutine, estimant que « toute discussion, même vague, sur les armes nucléaires est absolument irresponsable ».

Aussi, le chef de Kremlin a précisé sa pensée peu après. « Tout d’abord, les États-Unis ont développé le concept d’une frappe préventive. Deuxièmement, ils développent un système de frappe visant à désarmer » [l’ennemi] », a-t-il déclaré, en marge d’un déplacement au Kirghizstan. Moscou devrait « sans doute penser à adopter les idées développées par les Américains pour assurer leur propre sécurité », a-t-il ajouté. « Nous ne faisons qu’y réfléchir », a-t-il conclu, en faisait référence à l’ambiguïté affichée par Washington concernant sa doctrine nucléaire.

En attendant, les démonstrations de force se poursuivent, notamment avec des essais de missiles balistiques à capacité nucléaire ainsi qu’avec des vols de bombardiers stratégiques, comme en effectuent régulièrement les forces aériennes russes aux abords des pays de l’Otan et du Japon. Cela étant, l’US Air Force n’est pas en reste non plus, avec les fréquents déploiements de B-52H Stratofortress ou de B-2 Spirit en Europe et dans l’Indo-Pacifique.

Ces démonstrations de force ont aussi lieu en mer, comme en témoigne la photographie qui, publiée le 13 décembre par la Force sous-marine Atlantique de l’US Navy, montre deux sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] – l’un américain [il s’agit de l’USS Tennessee], l’autre britannique – naviguer de conserve.

Ceux-ci sont survolés par un avion de type E-6B Mercury du Fleet Air Reconnaissance Squadron [VQ] 4, dont le rôle consiste à transmettre les ordres, notamment de tir nucléaire, aux sous-marins en plongée, ainsi que par un hélicoptère MH60R « Sea Hawk » appartenant à l’escadron d’attaque maritime [HSM] 72.

L’USS Tennessee [classe Ohio], un SNLE de type Vanguard de la Royal Navy, un E6-B Mercury […] et un MH-60R Sea Hawk […] ont mené un exercice bilatéral en mer visant à valider les tactiques, les techniques et les procédures qui renforcent les relations entre deux alliés proches, en soutien à la dissuasion et à la sécurité collective », explique la marine américaine.

Pour rappel, les SNLE britanniques et américaines mettent en oeuvre le même type de missile balistique, à savoir le Trident D5. Un Vanguard a la capacité d’en emporter 16 unités tandis qu’un Ohio peut en compter 24 à son bord. « Les États-Unis et le Royaume-Uni ont un accord de coopération de longue date dans le développement et le déploiement d’armes stratégiques », rappelle d’ailleurs l’US Navy.

À noter que l’USS Tennessee avait été désigné en 2020 pour emporter la tête nucléaire W76-2, de faible puissance [5 kilotonnes soit 5’000 tonnes de TNT]. Celle-ci avait été développé selon les orientations de la posture nucléaire américaine publiée en 2018.

« La stratégie et la doctrine russes mettent l’accent sur les utilisations coercitives et militaires potentielles des armes nucléaires. Elle évalue à tort que la menace d’une escalade nucléaire ou d’un premier usage effectif des armes nucléaires servirait à ‘désamorcer’ un conflit à des conditions qui seraient favorables. Ces perceptions erronées augmentent les risques d’erreur de calcul et d’escalade », était-il avancé dans ce document.

Pour le moment, la Royal Navy n’a fait aucun commentaire sur cet exercice mené conjointement avec son homologue américaine. D’ailleurs, la communication de cette dernière est surprenante, dans le mesure où les missions des SNLE sont confidentielles.

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