L’acquisition de 35 chasseurs-bombardiers F-35A pourrait coûter 10 milliards d’euros à l’Allemagne

Lors d’une conférense sur la sécurité organisée à Berlin, le 30 novembre, le chancelier allemand, Olaf Scholz s’est dit déterminé à boucler rapidement l’acquisition de 35 chasseurs-bombardiers F-35A auprès du constructeur américain Lockheed-Martin. Si possible d’ici la fin de cette année… car au regard du contexte actuel, marqué par la guerre en Ukraine, la Bundeswehr doit avoir les moyens de participer aux plans nucléaires de l’Otan.

« Tant que des États comme la Russie possèdent des armes nucléaires, l’Otan a naturellement besoin d’un potentiel de dissuasion crédible » afin de ne pas être « vulnérable au chantage », a estimé M. Scholz. « C’est pourquoi le gouvernement fédéral a décidé d’acheter des F-35 », a-t-il justifié. Et cela grâce au fonds spécial de 100 milliards d’euros destiné à remédier aux lacunes des forces armées allemandes.

Pour rappel, la base aérienne de Büchel [ouest de l’Allemagne] abrite des bombes nucléaires tactiques B-61 mise à la disposition de l’Otan par les États-Unis selon le principe dit de la double clé. En clair, si les chasseurs-bombardiers allemands [des Panavia Tornado actuellement, ndlr] sont appelés à mettre en oeuvre de telles armes, le contrôle de ces dernières [et donc leur code d’armement] est exclusivement américain. Or, le seul appareil qui puisse convenir à l’heure actuelle est le F-35…

Aussi, faute de pouvoir faire jouer la concurrence, la note s’annonce particulièrement salée pour Berlin… En juillet, la Defense Security Cooperation Agency [DSCA], l’agence chargée des exportations d’équipements militaires américains dans le cadre de la procédure dite des « Foreign Military Sales » [FMS] avait estimé à 8,4 milliards de dollars [un peu moins de 8 milliards d’euros au taux de change actuel, ndlr] la facture pour les 35 F-35A destinés à l’Allemagne, dans un avis remis au Congrès. Un montant à comparer aux 5,3 milliards de dollars que la Suisse a accepté de payer pour acquérir 36 avions du même type…

Or, d’après l’hebdomadaire Der Spiegel, qui s’appuie sur des documents du ministère allemand des Finances, le coût d’achat de ces 35 F-35A pourrait avoisiner les 10 milliards d’euros, selon des « projections prudentes ». Pour le même prix, la Finlande disposera de 64 exemplaires de l’appareil américain.

Par ailleurs, il n’est pas précisé si les avions qui seront mis en oeuvre par la Luftwaffe seront portés au block 4, c’est à dire le standard censé donner au F-35 toutes les capacités prévues dans son cahier des charges. Or, son développement a pris du retard et généré d’importants surcoûts. Se pose également la question du moteur F-135, qui devra être remplacé, ou à défaut amélioré.

En outre, il faudra également adapter les infrastructures de la base aérienne de Büchel afin qu’elle puisse accueillir les F-35A à partir de 2026. Et selon Der Spiegel, ce chantier s’annonce « ambitieux »…

Qui plus est, il n’est pas question, à ce stade, de compensations industrielles, notamment au niveau du Maintien en condition opérationnelle [MCO] des F-35… Ce que l’Association de l’industrie aéronautique et spatiale allemande [Bundesverband der Deutschen Luft- und Raumfahrtindustrie e.V. – BDLI], a dénoncé, le mois dernier, pointant le risque d’une perte de compétences et d’autonomie.

« En ce qui concerne la souveraineté allemande, nous devons nous assurer que nous ne nous remettrons pas complétement entre les mains des Américains pendant les 30 ou 50 prochaines années », fit valoir Martin Kroell, le vice-président de la BDLI, dans la presse d’outre-Rhin.

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