Armement : La France et l’Inde veulent renforcer leur coopération industrielle. Nouveau contrat Rafale en vue?
En matière de défense, les relations entre la France et l’Inde sont au beau fixe, les manoeuvres aériennes conjointes Garuda 22, organisée sur la base aérienne de Jodhpur [Rajasthan], et le déploiement d’un avion de patrouille maritime P-8I Poseidon de l’Indian Navy à La Réunion en ont d’ailleurs récemment témoigné.
En outre, et au-delà des coopérations opérationnelles, l’Inde fait partie des principaux clients – et même l’un des plus anciens – de la base industrielle et technologique de défense française [BITD], avec par exemple l’achat de six sous-marins Scorpène [avec de vastes transferts de technologie à la clef] et celui de trente-six chasseurs-bombardiers Rafale.
D’ailleurs, il n’est pas impossible que New Delhi passe une nouvelle commande auprès de Dassault Aviation, dans le cadre du programme Multi Role Fighter Aircraft [MRFA ou MMRCA 2.0], lequel vise à doter l’Indian Air Force [IAF] de 114 avions de combat de génération 4,5 supplémentaires.
D’ailleurs, à l’occasion de Garuda 22, et après avoir volé à bord d’un Rafale, son chef d’état-major, l’Air Chief Marshal Vivek Ram Chaudhari, a affirmé avoir « définitivement besoin de cinq à six escadrons d’avions de génération 4,5 » pour faire face aux menaces immédiates. La presse indienne a laissé entendre qu’il parlait du Rafale…
En tout cas, plusieurs constructeurs ont fait part de leur intérêt pour le programme MRFA, dont Lockheed-Martin [F-21, conçu à partir du F-16], Boeing [F-15EX], Saab [Gripen], le consortium Eurofighter [Typhoon] et, évidemment, Dassault Aviation. Et l’industriel français fait figure de favoris, pour plusieurs raisons.
La première est que l’IAF utilise des Rafale conformes à ses exigences. Ce qui veut dire que le prix unitaire de nouveaux appareils sera moins élevé, les coûts des modifications qu’elle a demandées étant amortis. Le seconde est que les infrastructures nécessaires pour mettre en oeuvre le chasseur-bombardier français sont déjà construites. Enfin, il n’y aurait nul besoin de mettre en place de nouvelles chaînes d’approvisionnement en pièces détachées.
Mais reste la politique du « Make in India », qui vise à réduire les dépendances de l’Inde sur le marché de l’armement tout en favorisant l’essor de sa propre BITD. D’après le quotidien Financial Express, « la partie française a déclaré que pour installer une ligne de production [de Rafale] en Inde, elle aurait besoin d’une commande d’environ 100 avions ». C’était d’ailleurs ce qu’exigeait l’appel d’offres MMRCA, abandonné en 2015 après l’achat des 36 Rafale par New Delhi.
Par ailleurs, l’Indian Navy veut se procurer 27 avions « multi-rôles », afin de remplacer ses MiG-29K qui, de fabrication russe, ne lui donne pas pleinement satisfaction. La configuration des porte-avions indien étant de type STOBAR [avec tremplin et brins d’arrêt], des essais avec un Rafale Marine et un F/A-18 Super Hornet ont été menés cette année à la base navale INS Hansa, à Goa.
À bord de l’INS Vikrant, le nouveau porte-avions de la marine indienne, conçu et fabriqué en Inde.
La France et l’Inde se rejoignent dans leur volonté de défendre leurs souverainetés maritimes et de garantir les libertés de circuler en mer dans la zone Indo-Pacifique. pic.twitter.com/tpD0UwNBQY
— Sébastien Lecornu (@SebLecornu) November 27, 2022
Le résultat de ces évaluations ne devait pas tarder à être rendu public… D’autant plus qu’il s’agit d’équiper l’INS Vikrant, le premier porte-avions de conception indienne admis en service en août dernier. Le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, a-t-il évoqué le Rafale Marine après s’être rendu à bord de ce navire, alors qu’il devait rencontrer Rajnath Singh, son homologue indien, à l’occasion du 4e dialogue annuel indo-français sur la défense, le 27 novembre?
En tout cas, M. Singh a dit avoir eu des « discussions chaleureuses et fructueuses » avec M. Lecornu, qui s’est rendu en Inde dans le cadre d’une tournée diplomatique l’ayant précédemment mené aux Émirats arabes unis et en Indonésie. Et d’ajouter, via un message diffusé sur Twitter : « Un large éventail de questions de coopération industrielle bilatérale, régionale et de défense » ont été évoquées au cours de cette rencontre.
4th India-France Annual Defence Dialogue was held in New Delhi today. Several important bilateral, regional, defence & defence industrial cooperation issues were discussed.
Watch the video for more information 👇🏻@rajnathsingh @AjaybhattBJP4UK @giridhararamane @IndiaembFrance pic.twitter.com/WN8YF4tpXh
— A. Bharat Bhushan Babu (@SpokespersonMoD) November 28, 2022
Le ministère indien de la Défense a donné plus de détails. « Les ministres ont reconnu leur convergence sur un certain nombre de questions stratégiques et de défense » et « ont pris l’engagement de travailler ensemble pour renforcer la coopération dans les forums bilatéraux, régionaux et multilatéraux, en mettant l’accent sur la région indo-pacifique ». Et les questions industrielles n’ont pas été oubliées, l’accent ayant été mis sur la politique « Make in India ».
« Des collaborations futures et des opportunités potentielles de coproduction ont été discutées. Les ministres sont convenus que les groupes techniques des deux pays devraient se réunir au début de l’année prochaine et faire avancer les questions clés de coopération », a en effet conclu le ministère indien. Avec une nouvelle commande de Rafale en vue?