Artillerie : L’armée de Terre voudrait remplacer ses lance-roquettes unitaires d’ici 2027
En matière d’artillerie de longue portée, la capacité de l’armée de Terre est réduite à la portion congrue… Et plus encore depuis que deux Lance-roquettes unitaires [LRU] sur les treize qu’elle possédait jusqu’alors ont été cédés à l’Ukraine. Et ces exemplaires ne seront pas remplacés dans l’immédiat.
En effet, en janvier 2021, dans une réponse à une question écrite posée par le député Patrick Hetzel, le ministère des Armées avait expliqué que le renouvellement de cette capacité, à l’horizon 2030, devait se faire dans le cadre d’un « dialogue » avec l’Allemagne, celle-ci étant également dotée d’un système similaire. Et il avait aussi souligné l’importance des projets européens FIRES [Future Indirect fiRes European Solutions] et E-COLORSS [European COmmon LOng Range indirect Fire Support System], lesquels visent à accroitre la portée et la précision des pièces d’artillerie tout en réduisant leurs vulnérabilités.
Ces projets, en particulier E-COLORSS, pourraient « notamment permettre de préparer une solution européenne pour le remplacement du châssis et de la conduite de tir LRU à l’hozizon 2030 », avait indiqué le ministère. Ce qui suggérait alors qu’une « régénération » de ces systèmes d’artillerie serait privilégiée… En outre, rien n’avait été dit au sujet des munitions, alors que, outre-Rhin, des travaux étaient en cours dans ce domaine. Travaux dont les résultats ont depuis été présentés lors du dernier salon EuroSatory, avec le Joint Fire Support Missile [JFS-M] de MBDA Deutschland…
Quoi qu’il en soit, la guerre en Ukraine a changé la donne… bien que la prédominance de l’artillerie dans les combats peut s’expliquer par l’absence de supériorité aérienne pour les deux belligérants. Cela « a eu pour conséquence un retour au combat classique pour les forces au sol, avec la violence et l’attrition associées », a récemment estimé le général Stéphane Mille, le chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace [CEMAAE], prechant ainsi pour sa « paroisse ».
Le général Charles Brown [son homologue américain, ndlr] « l’analyse de façon simple et un caricaturale en disant qu’en l’absence de maîtrise du ciel, la guerre reprend les caractéristiques de la première guerre mondiale, marquée par la prédominance de l’artillerie », a dit le CEMAAE aux députés, lors de son passage devant le commission de la Défense, en octobre.
En tout cas, s’agissant du LRU, la « guerre en Ukraine montre combien les feux dans la profondeur prennent de l’importance, l’arme aérienne intervenant également en complémentarité », a fait valoir le général Thierry Burkhard, le chef d’état-major des armées [CEMA], lors d’une audition au Sénat. « Le programme de l’armée de Terre prévoyait de remplacer le LRU, déjà vieux d’une vingtaine d’années, et que les États-Unis ont déjà remplacé [par le M142 HIMARS]. Il est essentiel que nous disposions d’une capacité de feux dans la profondeur », a-t-il ajouté.
Devant la même commission sénatoriale, le général Pierre Schill, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT] a été plus précis dans ses attentes, évoquant également les CAESAr [Camions équipés d’un système d’artillerie], dont le renouvellement est également prévu dans le cadre d’une coopération avec l’Allemagne, avec le programme « Common Indirect Fire System » [CIFS], lequel ne se concrétisera pas avant… 2045.
« Tout d’abord, le champ de bataille peut devenir transparent en fonction des moyens en notre possession », a d’abord souligné le CEMAT. Ensuite, a-t-il continué, « dès que la transparence est acquise, l’enjeu est celui de la létalité », c’est à dire qu’il faut « frapper » dès que l’information sur une cible est reçue.
« Notre objectif est fixé à 109 canons CAESAr couplés à l’acquisition de munitions ciblées », a enchaîné le général Schill. Quant aux « feux à longue portée », ils « devront être remplacés par des capacités similaires » quand les LRU « arriveront en fin de vie en 2027 », a-t-il précisé. « La guerre en Ukraine nous enseigne que les feux très longue portée sont décisifs : il nous faut réfléchir sur la solution à retenir », a-t-il conclu, avant de souligner l’importance de disposer de drones armés, de munitions téléopérées et de capacités « consolidées » d’infiltration et de frappe longue portée des hélicoptères de l’Aviation légère de l’armée de Terre [ALAT].