Le Service interarmées des munitions ploie sous le poids croissant des normes, selon un rapport

Créé en 2011 et rattaché au chef d’état-major des armées [CEMA], le Service interarmées des munitions [SIMu] a pour mission de mettre à la disposition des forces armées, où qu’elles se trouvent et en tout temps, des « munitions conventionnelles en quantité et en qualité, tout en assurant la sécurité d’emploi par les utilisateurs ». Pour cela, il dispose d’une vingtaine de dépôts [dont dix en outre-Mer et à l’Étranger] et emploie environ 1350 militaires et civils.

En outre, le SIMu vient d’entamer une nouvelle phase de sa modernisation, dans le cadre du plan SIMu 2025, lequel doit lui permettre de renforcer sa résilience et d’optimiser le cycle de vie des munitions.

Plusieurs projets ont été lancés à cette fin, comme celui consistant à développer un nouveau système d’information logistique interarmées. En outre, le SIMu a fait l’acquisition d’équipements pour améliorer l’environnement thermique et hygrométrique des munitions et pris des mesures pour optimiser les flux logistiques.

Enfin, le service a obtenu le renouvellement de la certificiation ISO 9001, laquelle correspond à une norme définissant des exigences pour la mise en place d’un système de gestion de la qualité. En clair, et selon la définition qu’en donne l’Association française de normalisation [AFNOR], elle mesure l’aptitude d’une entité à « fournir régulièrement un produit ou un service conforme aux exigences des clients et aux exigences légales et réglementaires applicables ».

Justement, s’agissant des normes, le député [LFI] Bastien Lachaud, rapporteur pour avis sur le soutien et la logistique interarmées à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances 2023, estime qu’elles sont désormais « trop contraignantes au regard de l’impératif opérationnel ».

« De nombreuses normes s’imposent au SIMu dans l’exercice de ses missions », écrit le député. Or, poursuit-il, « ces ‘normes de temps de paix’ pourraient s’avérer être des contraintes dans l’éventualité d’un conflit de haute intensité et ne pas correspondre aux exigences opérationnelles d’un conflit de ce type ». Et de souligner que « la réflexion du militaire ne se concentre pas prioritairement sur les normes mais plutôt sur la maîtrise des risques ».

Dans son rapport, le parlementaire pointe les « normes imposées par le code du travail » ainsi que par « le code de l’environnement ».

S’agissant de ces dernières, M. Lachaud explique qu’elle pèsent « sur la modernisation des dépôts et provoquent des retards de chantier ». En outre, continue-t-il, « le surcoût que représentent les normes environnementales lors de la mise en conformité des dépôts, de la remise à niveau des infrastructures et du remplacement des magasins en tôle par des igloos est considérable, notamment parce que nombre de ces sites se trouvent dans des zones classées au titre de la protection des espèces protégées ».

Cela étant, le député donne deux exemples de normes qu’il estime trop restrictives [au point d’en être absurdes?]. « Un camion acheminant des munitions n’est pas considéré comme dangereux lorsqu’il roule mais, lorsqu’il stationne, une zone de sûreté doit être délimitée tout autour, même dans l’enceinte d’un camp militaire. La question se pose donc de la cohérence de la norme et de son apport par rapport à la maîtrise du risque », avance-t-il.

Le second exemple concerne le « décret n° 2013-973 du 29 octobre 2013 relatif à la prévention des risques particuliers auxquels les travailleurs sont exposés lors d’activités pyrotechniques ». Selon le député, « lorsqu’un soldat s’entraîne sur le territoire national », c’est ce texte qui s’applique… Mais quand il est en opération, ce sont les normes fixées par l’Otan qui sont prises en compte.

« Dans un souci de cohérence, il conviendrait que les normes auxquelles le militaire est soumis sur le territoire national soient assouplies. Si tel était le cas, les gains de productivité pour les armées seraient d’environ 15 %. Les équipes du SIMu capables de travailler simultanément sur le territoire national pourraient ainsi passer à 6, contre 3 aujourd’hui », estime M. Lachaud.

Enfin, le député a également jugé que les normes des constructeurs au sujet de la durée de vie des munitions, qui « résultent d’un travail strictement technique réalisé entre la Direction générale de l’armement [DGA] et les industriels de la défense », sont « trop contraignantes et onéreuses ».

« Une étude de sécurité du travail par le contrôle général des armées serait nécessaire afin de réévaluer l’efficacité et la cohérence de l’application des normes en vigueur. Ces contraintes ne s’imposent pas dans un pays tel que les États-Unis. Comme l’armée américaine tire beaucoup plus de munitions réelles que la France, elle dispose d’un retour d’expérience bien supérieur au nôtre quant à la performance des munitions », a-t-il conclu.

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