Selon un rapport, le déficit d’entraînement des pilotes de l’armée de l’Air et de l’Espace est « préoccupant »

Lors d’un exercice récent, des Eurofighter Typhoon et des F-35B de la Royal Air Force [RAF] ont vidé les stocks de missiles air-air AIM-132 ASRAAM [Advanced Short-Range Air-to-Air Missile] devant être bientôt remplacés par des modèles plus modernes. L’objectif était de « développer » la confiance des pilotes et de plonger ceux-ci dans une situation réelle de combat.

Sans doute que les pilotes français ont envié leurs homologues britanniques étant donné que les occasions de tirer des missiles air-air sont rares. Très rares même, d’après le député Frank Giletti [RN], rapporteur pour avis sur les crédits destinés à l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] pour 2023.

D’abord, M. Giletti estime que, dans la perspective d’un engagement de haute intensité et au regard de l’attrition constatée durant la guere en Ukraine et des exercices récemment menés, le format « Rafale Air » mériterait d’être porté à 225 exemplaires [au lieu de 185, comme le prévoit l’actuelle Loi de programmation militaire, ndlr] afin de gagner en crédibilité. « Seul ce format permettrait de sanctuariser les aéronefs dédiés à la posture de dissuasion nucléaire tout en conférant la capacité à l’armée de l’air et de l’espace à pleinement accomplir ses autres missions », soutient-il.

En outre, fait-il observer, les équipements dits « missionnels » sont « en nombre largement insuffisant alors qu’ils sont pourtant essentiels au bon accomplissement des missions de combat ». Ainsi, « le faible nombre actuel des pods de désignation laser – une trentaine aujourd’hui pour l’armée de l’air et de l’espace et la marine, 67 à l’horizon 2025 – implique pour les aviateurs des opérations de montage-démontage de ces pods d’un avion à l’autre », relève M. Giletti.

Enfin, il est aussi nécessaire de « rehausser significativement les stocks de missiles, notamment les missiles air-air de type Mica ou Meteor », selon lui. Et cela d’autant plus, avance-t-il, que le « le stock actuel de missiles est si faible que les aviateurs ne peuvent en tirer qu’un seul en entraînement dans toute leur vie d’aviateur, comme cela [lui] a été indiqué […] dans le cadre de ses travaux ».

Qui plus est, poursuit le parlementaire, il « est également notoire que les aviateurs français ont pu être contraints par le niveau des stocks de munitions lors de certains engagements. Ceci n’est naturellement pas tenable dans un conflit de haute intensité ».

Cela étant, au-delà des occasions pour les pilotes de l’AAE de tirer des missiles air-air dans le cadre de leur préparation opérationnelle, M. Giletti s’est inquiété de la réduction – drastique – du nombre d’heures de vol que ceux-ci doivent effectuer chaque année. Ce qui avait d’ailleurs été prévu par le général Frédéric Parisot, le numéro deux de l’AAE, lors d’une audition parlementaire, en juillet. Et cela, en raison de la cession d’un total de 24 Rafale à la Grèce et à la Croatie ainsi que du retrait des Mirage 2000C.

Quoi qu’il en soit, selon les normes édictées par l’Otan, un pilote de chasse doit effectuer un minimum de 180 heures de vol par an.

Or, un pilote de combat de l’AAE ne devrait voler que pendant 147 heures en 2023 [voire aussi en 2024], contre 162 heures en 2022. Les pilotes de transport ne sont pas mieux lotis, avec 189 heures prévues pour l’an prochain, alors que la norme Otan est de 320 heures.

« L’activité aérienne par pilote diminue pour la chasse et l’aviation de transport en 2023. Cette situation résulte d’une part de la cession-export des Rafale à la Croatie qui limite le nombre de cellules disponibles et la capacité de production d’heures de vol, et d’autre part des aléas techniques sur des flottes [C130H] ou en montée en puissance [A400M]. L’activité des hélicoptères est maintenue. De fait, ces contraintes ont conduit à repousser la rejointe des normes [cible LPM] », a expliqué le ministère des Armées au député, qui, au passage, a dit n’avoir pas pu obtenir les chiffres relatifs à la disponibilité technique des aéronefs, malgré sa qualité de rapporteur.

En tout, pour M. Giletti, ce « déficit d’entraînement est particulièrement préjudiciable, alors que le contexte stratégique actuel requiert bien au contraire un durcissement de la préparation opérationnelle » et que les derniers engagements [Sahel, Levant] « ne mobilisent guère les compétences requises dans des combats de haute intensité, de sorte que ces dernières ne peuvent s’acquérir que par l’entraînement ».

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