La Marine nationale a mené sa première campagne de surveillance des câbles sous-marins lors de la mission Calliope

Il fut un temps où la Marine nationale était à la pointe de l’exploration des fonds marins, avec notamment le groupe des bathyscaphes du commandant Georges Houot… Puis, à partir des années 1970, ses capacités en la matière entamèrent leur déclin et finirent par disparaître… alors que, dans le même temps, ses homologues américaine et russe surent non seulement conserver mais aussi développer leurs moyens dans ce domaine, désormais vu comme un nouveau champ de conflictualité, les câbles sous-marins de communication ainsi que les infrastructures de transport d’énergie pouvait être la cible d’attaques.

D’où la stratégie ministérielle de maîtrise des fonds marins, dévoilée en février dernier par Florence Parly, alors ministre des Armées. Et parmi les mesures annoncées, il était question de doter la Marine nationale de moyens pouvant atteindre une profondeur de 6000 mètres.

« En cohérence avec la stratégie de maîtrise des fonds marins, la Marine va se doter d’une capacité propre d’intervention par grands fonds, reposant sur des drones et des robots sous-marins. Sans attendre, nous nous engageons parallèlement dans une démarche expérimentale pour tester, apprendre et développer dès à présent des compétences à partir de robots et de drones existants », a expliqué l’amiral Pierre Vandier, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], dans un entretien paru dans le dernier hors-série de DSI.

D’où la récente expérimentation du drone sous-marin « Hugin » [conçu par le norvégien Kongsberg, ndlr], depuis le bâtiment hydrographique et océanographique [BHO] « Beautemps-Beaupré », dans le cadre de la préparation du programme CHOF [capacité hydrographique et océanographique future], laquelle avait été précédée, quelques mois plus tôt, par celle du drone A18D d’ECA Group, lors d’une mission du Bâtiment de soutien et d’assistance métropolitan [BSAM] Rhône.

À noter que ce drone sous-marin a visiblement tenu ses promesses puisqu’il a fait l’objet, en août, d’un contrat de 4 milions d’euros attribué par la Direction générale de l’armement [DGA] à Kongsberg.

Pour rappel, disposant d’une autonomie de 100 heures [en naviguant à 4 noeuds], le Hugin est équipé d’un sonar à synthèse d’ouverture [ou d’un sonar à balayage latéral], d’une caméra et d’un échosondeur multifaisceaux. Il peut en outre évoluer à 6000 mètres de profondeur.

Quoi qu’il en soit, les menaces visant les infrastructures stratégiques sont devenues une réalité, avec le sabotage des gazoducs NordStream 1 et NordStream 2 en mer Baltique. Ce qui a d’ailleurs conduit la président Macron à décider une « inspection de sécurité » des câbles sous-marins de communication concernant la France, sachant que la marine russe, via son navire « Yantar », s’y intéresse particulièrement.

C’est ainsi quen entre les 6 et 14 octobre, la Marine nationale a mené l’opération Calliope [du nom de la muse grecque, mère des Sirènes, ndlr], c’est à dire sa première campagne de maîtrise des fonds marins. Selon les explications données par l’État-major des armées [EMA], l’enjeu était « d’explorer une première capacité pour surveiller le fond des océans en mettant en œuvre, directement depuis le BHO Beautemps-Beaupré, le drone sous-marin grands-fonds HUGIN Superior ».

Cette opération a ainsi permis d’assurer la « reconnaissance et la surveillance de certains câbles sous-marins en faisant plonger le drone à plus de 4’500 mètres de profondeur dans les plaines abyssales du golfe de Gascogne », poursuit l’EMA. Au passage, une épave reposant à 4600 mètres sous la surface a pu être observée [aucun détail supplémentaire n’a été donné à son sujet, ndlr].

« Calliope […] a atteint ses différents objectifs : capacité à surveiller les infrastructures sensibles sur les fonds marins et affiner le concept d’emploi d’un drone de ce type par la Marine. Elle a ainsi contribué à la montée en compétence des armées et à la poursuite des travaux capacitaires dans le domaine de la maîtrise des fonds marins », souligne l’état-major.

Justement, durant le salon Euronaval, la DGA a indiqué qu’elle venait de notifier à Exail [ex-iXblue] un marché de 500’000 euros pour une nouvelle expérimentation du DRIX [drone hydrographique de surface supervisé] depuis le BHO Beautemps-Beaupré. Celle-ci doit avoir lieu en février 2023, afin de valider les performances de cet engin observées lors d’essais réalisés en mer d’Iroise, il y a deux ans.

Photo : Kongsberg

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