NordStream : L’Otan met en garde contre toute attaque visant les infrastructures critiques de ses membres

Un temps considérée comme très probable, l’hypothèse d’un sabotage avancée pour expliquer les quatre fuites de gaz constatées sur les gazoducs NordStream1 et NordStream2 au large de l’île danoise de Bornholm, ne semble désormais plus faire de doute.

Pour rappel, ces deux gazoducs, exploités par le groupe russe Gazprom pour livrer du gaz à l’Allemagne via la mer Baltique, ont été touchés par deux explosions sous-marins, le 26 septembre. Cela étant, l’inspection de ces deux conduites n’est pas possible pour le moment, faute de pouvoir les approcher en raison des bouillonnements provoqués par les fuites.

En outre, objet de tensions depuis le début de la guerre en Ukraine [voire avant], ces deux gazoducs n’étaient pas opérationnels au moment des faits. En effet, sous la pression des États-Unis, NordStream2 n’est jamais entré en service tandis que NordStream1 ne fonctionne plus depuis le début du mois de septembre à cause, selon Gazprom, de problèmes techniques.

Quoi qu’il en soit, pour certains, et parce qu’elle en a les capacités et qu’elle pourrait y trouver un avantage [comme le commerçant malhonnête qui met le feu à des marchandises invendables pour toucher la prime d’assurance], la Russie fait figure de principal suspect. Ce que Moscou a évidemment nié avec force. « Stupide et absurde », quoique « prévisible », ainsi répliqué Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, avant d’évoquer les « énormes bénéfices réalisés par les fournisseurs américains de gaz naturel liquéfié, qui ont multiplié leurs approvisionnements sur le continent européen ».

Le 28 septembre, le Parquet général russe a indiqué avoir confié au FSB [renseignement intérieur] le soin de mener une « enquête criminelle » pour « acte de terrorisme international ». Et d’ajouter : « Près de l’île de Bornholm, des actions intentionnelles ont été commises pour endommager les gazoducs Nord Stream 1 et Nord Stream 2 situés au fond de la mer Baltique. […] La Fédération du Russie a subi un grave préjudice économique du fait de ces actes ».

En outre, à la demande de Moscou, qui pointe par ailleurs le rôle d’un « État étranger », le Conseil de sécurité des Nations unies se réunira le 30 septembre pour évoquer cette affaire. Et probablement que la diplomatie russe interpellera son homologue américaine sur ce qu’elle appelle les « provocations concernant les gazoducs Nord Stream 1 et 2 ».

Cela étant, l’Union européenne [UE], par le voix de Josep Borrell, son Haut représentant pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, a parlé de probables « actes malveillants » et prévenu que « toute perturbation délibérée de l’infrastructure énergétique européenne […] ferait l’objet d’une réponse robuste et unie ». Laquelle? Il ne l’a pas précisé…

De son côté, alliance militaire dont les membres sont liés par une clause de défense collective, prévue par l’article 5 du Traité de l’Atlantique-Nord, l’Otan est plus catégorique.

« Les dommages subis par les gazoducs Nordstream 1 et Nordstream 2 dans les eaux internationales de la mer Baltique sont particulièrement préoccupants. Les informations actuellement disponibles portent à croire qu’ils sont la conséquence d’actes de sabotage délibérés, inconsidérés et irresponsables. […] Nous soutenons les enquêtes en cours qui cherchent à déterminer l’origine des dommages », ont dénoncé les trente États membres, dans une déclaration commune, publiée ce 29 septembre.

Et d’ajouter : « Nous, les Alliés, nous sommes engagés à assurer la dissuasion, à nous prémunir et à nous défendre face à l’utilisation, à des fins coercitives, du levier de l’énergie ou de tout autre procédé hybride par des acteurs étatiques ou non étatiques ». Dans ces conditions, préviennent-ils, « toute attaque délibérée contre les infrastructures critiques de pays de l’Alliance se verrait opposer une réponse unie et déterminée ».

À noter que si Moscou pointe la responsabilité d’un « État étranger », l’Otan n’exclut pas celle d' »acteurs non étatiques »…

Cette déclaration concerne d’abord la Norvège, dont la production de gaz est désormais cruciale pour l’UE [dont elle ne fait pas partie, ndlr], d’autant plus qu’elle vient d’inaugurer le gazoduc Baltic Pipe, lequel la relie à la Pologne via la mer Baltique. Or, ces derniers jours, des drones non-identifiés ont été aperçus à proximité de certains de ses sites pétroliers et gaziers, ce qui a conduit son ministère du Pétrole et de l’Énergie à appeler à la plus grande vigilance.

Reste que le sabotage des deux gazoducs n’a pas nécessairement exigé des moyens permettant d’opérer dans les abysses, comme en disposent notamment la Russie et les États-Unis. Et cela pour la simple raison que la mer Baltique est peu profonde… D’où l’hypothèse d’une source militaire britannique, évoquée par le journal The Guardian. Ainsi, selon elle, des « mines ont pu être discrètement posées à partir d’un navire commercial déguisé avant d’exploser des jours, voire des semaines plus tard. Si une telle opération doit être menée avec un certain soin, elle ne requiert pas de ressources militaires spécialisées ».

Photo : Otan

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