Les forces britanniques et américaines s’associent pour couler l’ex-frégate USS Boone lors d’un exercice inédit

Durant la Seconde Guerre Mondiale, le Coastal Command de la Royal Air Force [RAF] s’était vu confier la mission de surveiller les côtes britanniques et de protéger les convois maritimes alliés contre les avions et les navires [à commencer par les sous-marins U-boote] allemands. Puis son rôle évolua vers des opérations plus offensives afin de perturber l’approvisionnement de l’Allemagne.

Par la suite, ayant perdu ses avions de combat [Spitfire, DH.98 Mosquita], le Coastal Command se concentra sur la patrouille maritime et la traque des sous-marins soviétique, avant d’être dissous en 1969, ses missions étant alors reprises par le No.18 Group du RAF Strike Command [qui cédera la place à l’Air Command, en 2007].

Cependant, la RAF garda une capacité anti-navire de surface avec des escadrons de chasseurs-bombardiers Panavia Tornado armés de missiles Sea Eagle et basés dans le nord de l’Écosse. Seulement, au début des années 2000, considérant que les besoins en la matière devaient être réduits après la fin de la Guerre Froide, le Sea Eagle fut retiré du service sans être remplacé.

Quoi qu’il en soit, et même si elle dispose d’unités pouvant opérer depuis un porte-avions [comme la Fleet Air Arm, de la Royal Navy, ndlr], cela fait bien longtemps que la Royal Air Force ne s’est plus exercée à la lutte contre les navires de surface… avec des avions de combat basés à terre.

D’où le caractère inédit de l’exercice Atlantic Thunder 2022, organisé au large des côtes écossaises par les États-Unis au début du mois de septembre.

L’un des scénarios prévoyait l’attaque d’une frégate, en l’occurrence l’ex-USS Boone, retirée du service actif en 2012. Et pour cela, la Royal Navy [qui n’avait plus pris part à Atlantic Thunder depuis dix-huit ans] et la Royal Air Force n’ont pas lésiné sur les moyens. Ni, du reste, l’US Air Force et l’US Navy.

Ainsi, selon le compte-rendu de ce « SINKEX », l’ex-USS Boone a été simultanément touchée par trois missiles anti-navires Harpoon, dont deux tirés par la frégate britannique de type 23 HMS Westminster et un par un avion de patrouille maritime P-8A Poseidon de l’US Navy.

Puis un hélicoptère Wildcat de la Fleet Air Arm a tiré des missiles Martlet en direction de l’ex-USS Boone. Selon la Royal Navy, il s’est agi du « premier tir de cette nouvelle arme anti-navire contre une cible réaliste en mer ». Le rôle de cet appareil ne s’est pas arrêté là puisque, avec sa nacelle de désignation laser, il a illuminé l’ancienne frégate américaine pour permettre à l’un des trois Typhoon de la RAF engagés dans l’exercice de tirer des « munitions Paveway IV ».

« C’était la première fois qu’un Typhoon de la RAF larguait des munitions réelles sur un navire de guerre utilisé comme cible. Et c’était aussi la première fois qu’un hélicoptère de la Fleet Air Arm guidait des bombes Paveway IV vers une cible », a souligné la Royal Navy, via un communiqué publié le 23 septembre.

Visiblement, et bien qu’étant dans l’impossibilité de se défendre [aucune munition n’était évidemment dans ses soutes], l’ex-USS Boone était un navire robuste puisqu’il a également été visé par un missile SM-6 lancé par le « destroyer » USS Arleigh Burke ainsi que par « plusieurs » munitions de type JDAM [Joint Direct Attack Munitions] tirées par des F-15E du 494th Fighter Squadron, basé Lakenheath [Royaume-Uni].

« Atlantic Thunder a démontré que les forces britanniques et américaines peuvent travailler ensemble pour fournir une chaîne de destruction de bout en bout contre une cible maritime à longue distance. L’intégration d’armes, de capteurs et de systèmes de communications haut de gamme avec nos alliés de l’Otan est essentielle à la capacité de combat collective, comme l’a démontré cet exercice », a commenté le commandant Ed Moss-Ward, le « pacha » du HMS Westminster.

Cet exercice aura donc permis de démontrer que des munitions mises au point pour des frappes contre des cibles terrestres [Paveway IV et JDAM] peuvent être utilisées dans la lutte anti-surface.

Quant à savoir si elles peuvent se substituer à des missiles anti-navires, c’est une autre histoire… D’abord parce que trois Harpoon ont été tirés durant ce SINKEX. En outre, durant la guerre des Malouines/Falklands, il n’aura fallu qu’un seul Exocet tiré par un Super Étendard argentin pour envoyer par le fond les 4820 tonnes du « destroyer » HMS Sheffield [l’ex-USS Boone était moins imposant… et vide de munitions, ndlr]. Et plus récemment, deux missiles P360 Neptune ukrainiens auront suffi pour couler le croiseur Moskva [12500 tonnes], le navire amiral de la flotte russe de la mer Noire.

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