Mali : L’État islamique au grand Sahara s’empare de la localité de Talataye, à 150 km de Gao

Malgré les coups portés par la force française Barkhane en 2020 et 2021 et la perte de ses principaux dirigeants, à commencer par son chef, Abou Walid al-Sahraoui, l’État islamique au grand Sahara [EIGS] demeure très actif , en particulier dans la région malienne de Menaka où, en mars dernier, il a lancé une offensive contre le Mouvement pour le salut de l’Azawad [MSA, pro-Bamako].

« L’offensive visait la population touareg et les groupes armés touaregs, à savoir le MSA-D et le Groupe d’experts d’autodéfense des Touaregs Imghad et leurs alliés [GATIA]. Les principaux villages maliens situés le long de la frontière avec le Niger ont été les plus fortement touchés par ces attaques, notamment Inchinanane, Tamalelt et Anderamboukane, dans la région de Ménaka, et Talataye et I-n-Délimane, dans la région de Gao », a ainsi relevé l’Équipe
d’appui analytique et de surveillance des sanctions visant la mouvance jihadiste, dans le 30e rapport qu’elle remis en juillet aux Nations unies.

En juin, l’EIGS a pris le dessus sur le GTIA 8 de l’armée malienne – en réalité commandé par un El Hadj Ag Gamou, un chef du GATIA – ainsi que sur les combattants du MSA avant de s’emparer de la localité d’Anderamboukane, située à la frontière avec le Niger.

Puis, ce 7 septembre, la localité de Talataye [dans les environs de laquelle Barkhane a mené l’une de ses dernières opérations avant son retrait du Mali, ndlr] a été le théâtre de violents combat ayant opposé l’EIGS à des combattants appartenant à différentes organisations armées, dont, selon l’AFP, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans [GSIM ou JNIM, affilié à al-Qaïda], cette région étant connue pour être l’un de ses fiefs.

Situé à 200 km, à vol d’oiseau, au nord d’Anderamboukane et à 150 km à l’est de Gao, Talataye occupe une position stratégique étant donné qu’elle se trouve au milieu de plusieurs zones d’influence de groupes armés.

« Les gens de l’EIGS sont arrivés cet après-midi sur des motos, les combats ont duré trois heures », a confié, à l’AFP, un combattant du MSA ayant affirmé avoir pris part aux combats. Ils « ont pris Talataye au crépuscule », a-t-il dit. Ce qu’un élu local a confirmé. « La mairie de Talataye et la ville sont aux mains de l’EIGS », a-t-il déclaré.

La localité de Talataye et ses environs avaient déjà fait l’objet d’attaques en mars dernier. Attaques qui, menées par des « éléments extrémistes », selon l’ONU, ont causé « la mort d’une centaine de civils ».

Si l’EIGS réussit à garder son emprise sur Talataye, alors il sera en mesure d’accenter sa pression sur la ville de Ménaka, qui se trouve presque à mi-chemin d’Anderamboukane. À moins que les autorités maliennes, désormais appuyées par le groupe paramilitaire russe Wagner, finissent par réagir…

Cela étant, via un communiqué publié le 6 septembre, l’état-major des Forces armées maliennes [FAMa] a évoqué une reconnaissance aérienne « offensive » contre les « terroristes auteurs d’abus et de déplacements forcés des populations dans le secteur de Talataye ». Mais il n’a pas fourni de bilan, celui-ci étant en cours d’évaluation.

« Grâce aux actions offensives menées, nos forces armées ont remporté des victoires décisives contre les groupes obscurantistes. Ces actions ont également permis à l’État de réaffirmer son autorité sur une grande partie du territoire national », a déclaré Abdoulaye Diop, le chef de la diplomatie malienne, quelques heures avant la prise de Talataye par l’EIGS.

Quoi qu’il en soit, cette situation ne peut qu’inquiéter le Niger. « Notre frontière avec le Mali est aujourd’hui sous la coupe de l’État islamique au Grand Sahara. Bamako n’a pas investi les postes militaires avancés à notre frontière. Le G5 Sahel est mort. Depuis le second coup d’État au Mali, Bamako est dans une fuite en avant qui l’isole en Afrique et nous prive d’une stratégie concertée et coordonnée pour lutter contre le terrorisme », avait ainsi dénoncé Mohamed Bazoum, le président nigérien, en mai dernier.

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