La France réaffirme son soutien à la Grèce, après de nouvelles menaces proférées par le président turc

Depuis quelques semaines, les tensions entre la Grèce et la Turquie prennent progressivement – à nouveau – de l’ampleur. En mai, la diplomatie turque a ainsi remis en cause la souveraineté grecque sur certaines îles de la mer Égée, objet d’un différend territorial ancien entre les deux pays. Puis Ankara décidé de rompre le dialogue avec Athènes en dénonçant un accord de « haut conseil stratégique ».

Et, dernièrement, après avoir annoncé la reprise de sa prospection de gaz naturel en Méditerranée orientale – ce qui est une autre pomme de discorde avec Athènes – la Turquie accusé la Grèce d’avoir utilisé le radar de conduite de tir d’un système S-300 [cédé par Chypre, nldr] contre ses avions de combat… Et soutenu que des F-16 grecs avaient « harcelé » des F-16 turcs. Ce que la partie grecque a démenti.

Le 3 septembre, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a encore durci le ton, en reprenant une formule auparavant utilisée pour annoncer une opération militaire dans le nord de la Syrie et en évoquant l’affaire d’Izmir, ville reprise aux forces grecques en 1922, lors de la Deuxième Guerre gréco-turque.

« Si vous allez plus loin, vous paierez un prix élevé, très élevé ! Votre occupation des îles [de la mer Égée] ne nous lie en rien. Le moment venu, nous ferons le nécessaire. Nous pouvons arriver subitement la nuit. Nous n’avons qu’un mot pour la Grèce : n’oublie pas Izmir! », a en effet lancé M. Erdogan.

C’est dans ce contexte que Catherine Colonna, la ministre française des Affaires étrangères, est arrivée en Turquie, le 5 septembre. Les relations franco-turques ayant été particulièrement tendues, ces derniers mois, ce déplacement promettait d’être compliqué…

Quoi qu’il en soit, il aura été l’occasion de faire passer – implicitement – quelques messages, comme celui sur la nécessité de ne pas laisser la Russie contourner les sanctions liées à sa guerre en Ukraine… Sanctions que la Turquie, membre de l’Otan, refuse d’appliquer. Mais Mme Colonna a surtout appelé à « éviter toute escalade verbale ou toute provocation » entre Athènes et Ankara. Visiblement, elle n’a pas été entendue.

Lors d’une visite en Bosnie-Herzégovine, le 6 septembre, M. Erdogan a répété les propos qu’il avait tenus deux jours plus tôt. Interrogé par la presse sur ce qu’il entendait par « arriver subitement la nuit » ainsi que sur l’éventualité d’une action militaire turque contre la Grèce, il a répondu : « Ce dont je parle n’est pas un rêve. [Cela signifie] que, le moment venu, nous pouvons venir soudainement une nuit ».

À Athènes, où, le même jour, Mme Colonna a rencontré son homologue grec, Nikos Dendias, on prend évidemment les menaces de M. Erdogan très au sérieux.

« Quotidiennement, des responsables turcs font des déclarations scandaleuses contre la Grèce et le peuple grec. […] Des cartes montrant les îles grecques comme turques apparaissent. La partie turque déclare que ces îles sont ‘sous occupation grecque’. Il est dit, à plusieurs reprises, et encore aujourd’hui, qu »ils peuvent venir soudainement dans la nuit’. C’est-à-dire envahir les îles », a rappelé M. Dendias, lors de la conférence de presse donnée au côté de la ministre française.

Interrogée sur la position qu’aurait Paris en cas d’agression militaire contre le territoire grec, Mme Colonna a rappelé que la France et la Grèce sont liée par un accord de coopération stratégique, signé en septembre 2021. « Nous agissons pour ne pas nous retrouver dans une telle situation », a-t-elle dit. Cependant, a-t-elle poursuivi, si cela se produit, l’article 2 de l’accord décrit exactement ce cas et il dit que si les deux parties constatent qu’il y a une attaque armée contre le territoire de l’un ou l’autre pays, il y a une assistance mutuelle ».

Plus précisément, l’article en question dit : « Les Parties se portent mutuellement aide et assistance, par tous les moyens appropriés en leur possession, si besoin l’emploi de la force armée, si elles constatent conjointement qu’une agression armée survient contre le territoire de l’une d’entre elles, conformément à l’article 51 de la Charte des Nations unies ».

« La France a toujours été du côté de la Grèce – et de Chypre – lorsqu’il le faut et lorsque les atteintes à la souveraineté peuvent faire partie des tentations de pays voisin », a encore insisté Mme Colonna.

Plus tôt, dans un entretien accordé au journal grec Kathimerini, Mme Colonna a déclaré que « sur certains sujets, l’attitude turque interroge » et qu’il « est normal et utile, avec un pays allié et voisin, d’entretenir un dialogue ouvert, qui permet de parler de tout ». Et d’ajouter : « Je tiens à redire, comme la France l’a déjà exprimé à de nombreuses reprises, y compris par la voix du président de la République, que la France est toujours très claire et solidaire dès qu’il s’agit des atteintes à la souveraineté de la Grèce et cela ne changera pas ».

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