L’Ukraine espère obtenir des chars Leopard 2 auprès de l’Allemagne

Quelques semaines avant de faire face à l’offensive russe, l’Ukraine avait reproché à l’Allemagne de bloquer certaines de ses commandes d’armes passées via l’Otan ainsi que le don par l’Estonie de canons D-30 de 122 mm ayant autrefois appartenu à la République démocratique allemande [RDA].

Puis, quand Moscou lança les hostilités, le 24 février, les autorités allemandes se montrèrent d’abord réticentes à fournir une aide militaire à Kiev, expliquant que la Bundeswehr [forces armées d’outre-Rhin] devait « maintenir ses capacités d’action et être en mesure de garantir sa défense ainsi que celle de l’Alliance » et que, par conséquent, elle ne pouvait pas prélever dans ses arsenaux des armes qui pourraient lui faire défaut le cas échéant.

« Pour les livraisons provenant des stocks de la Bundeswehr, je dois dire honnêtement que nous sommes entre-temps arrivés à une limite », avait ainsi déclaré Christine Lambrecht, la ministre allemande de la Défense.

Cela étant, Berlin a depuis changé son fusil d’épaule. Après avoir livré à Kiev des missiles anti-aériens portables de type 9K32 Strela-2 [code Otan : SA-7 « Grail »] stockés depuis la réunification allemande, le gouvernement allemand a approuvé l’envoi en Ukraine de blindés anti-aériens Gepard, de lance-roquettes multiples Mars II, de sept obusiers automoteurs PzH2000 et des systèmes de défense aérienne IRIS-T SLM. Et il a annoncé, en août, une aide supplémentaire de 500 millions d’euros. De quoi financer le don de chars de dépannage [des Bergepanzer Büffel?], des munitions, des moyens de lutte anti-drones [MILAD] et des lance-roquettes.

Dans le même temps, l’Allemagne a lancé l’initiative « Ringtausch », laquelle vise à favoriser la livraison à l’Ukraine d’équipements militaires d’origine soviétique par les pays membres de l’Otan en les remplaçant par des matériels de fabrication allemande. La République tchèque, la Grèce et la Slovaquie en ont ainsi profité. Mais pas la Pologne, malgré son insistance à vouloir des chars Leopard 2 en lieu et place de ses T-72, donnés à l’Ukraine.

Justement, l’armée ukrainienne serait aussi intéressée par le Leopard 2… D’ailleurs, en juin, l’Espagne était prête à lui céder ceux que l’Ejército de Tierra avait mis sous cocon en 2012 pour des raisons budgétaires. Finalement, le gouvernement espagnol s’est récemment ravisé en expliquant qu’il lui fallait l’accord de Berlin et que les chars étaient en trop mauvais état.

Quoi qu’il en soit, Kiev pourrait bien obtenir des Leopard 2 de la part de… l’Allemagne. En tout cas, le Premier ministre ukrainien, Denys Chmyhal, devait en faire la demande auprès d’Olaf Scholz, le chancelier allemand, lors d’une rencontre prévue le 4 septembre. C’est en effet ce qu’il a affirmé dans un entretien donné à Deutschen Presse-Agentur [dpa].

« Nous avons besoin d’un changement dans la philosophie des livraisons d’armes. Ce que je veux dire par là, c’est que des chars de combat modernes doivent également nous être livrés », a dit le chef du gouvernement ukrainien. Et d’ajouter : « Nous attendons des États-Unis qu’ils nous fournissent des chars Abrams et de l’Allemagne, nous attendons des Leopard 2. Ce sont les chars modernes dont l’Ukraine a besoin sur le champ de bataille ».

L’Ukraine obtiendra-t-elle ce qu’elle souhaite? En tout cas, selon la chancellerie allemande, M. Scholz a « promis de continuer à soutenir » Kiev « non seulement militairement mais aussi politiquement et financièrement ».

« Nous avons évoqué d’éventuelles livraisons de nouveaux équipements, notamment des chars allemands », a, de son côté, précisé le gouvernement ukrainien, dans un compte-rendu de la rencontre entre MM. Chmyhal et Scholz.

Pour rappel, la Bundeswehr a prévu de moderniser ses Leopard 2 et d’augmenter leur nombre de 40% d’ici 2023. À cette échéance, elle devrait en compter 328, dont 104 portés au standard Leopard 2A7. Reste donc à voir où seront prélevés ceux qui pourraient être cédés à l’Ukraine… À moins qu’il ne s’agisse pour Kiev de mener un programme d’équipement sur le moyen ou long terme.

Quant aux Abrams américains évoqués par M. Chmyhal, et alors que le montant de l’aide militaire accordée par Washington à Kiev avoisine désormais les 15 milliards de dollars, après le récent déblocage d’une [grosse] enveloppe de 3 milliards, il n’en avait pas été question jusqu’a présent… Et il n’est pas certain qu’une telle demande puisse être satisfaite, sauf à prélever des chars dans les stocks de l’US Army : d’une part parce que la Pologne va récupérer ceux que l’US Marine Corp ne veut plus, d’autre part parce que les chaînes d’assemblage de General Dynamics Land System [GDLS] risquent de ne plus fournir, après les commandes marocaines, polonaises et taïwanaises. Et il se murmure que d’autres contrats pourraient être bientôt signés, notamment par la Roumanie.

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