La Russie retire une batterie de défense aérienne S-300 de Syrie pour la redéployer dans la région de la mer Noire

En septembre 2018, et après la perte de l’un de ses avions de renseignement Illouchine Il-20 « Coot », abattu par un missile tiré par une vieille batterie de défense aérienne S-200 syrienne lors d’un raid de chasseurs-bombardiers israéliens dans la région de Lattaquié, Moscou annonça des mesures pour renforcer la sécurité de ses troupes en Syrie.

Et la première d’entre-elles consista à livrer aux forces syriennes un système de défense aérienne S-300PMU pour renforcer leur capacité dans ce domaine et, surtout, éviter toute nouvelle méprise de leur part.

Le S-300 PMU est « capable d’intercepter des appareils sur une distance de plus de 250 kilomètres et peut frapper en même temps plusieurs cibles dans les airs », avait alors commenté Sergueï Choïgou, le ministre russe de la Défense.

Cependant, ce « cadeau » de Moscou à Damas n’en était pas un… puisque le contrôle opérationnel de ce système S-300 PMU devait être assuré par les forces russes. En outre, son déploiement n’a nullement empêché les raids israéliens menés régulièrement contre les positions tenues en Syrie par les Gardiens de la révolution iraniens et les milices soutenues par Téhéran.

Cela étant, cela aurait pu arriver en mai dernier, lors de frappes contre des sites du centre de recherche scientifique syrien implantés à Masyaf et Baniyas. En effet, en juillet, le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, a confirmé que les F-16 de Tsahal impliqués dans ce raid avaient été visés – sans succès – par un système S-300. Ce qui ne s’était jamais produit jusqu’alors. En tout cas, cela n’a pas manqué de susciter des interrogations sur les intentions russes…

Cependant, M. Gantz n’a pas souhaité mettre de l’huile sur le feu. « Nous avons des liens très importants avec la Russie. […] Je pense que nous devons agir avec délicatesse et dialoguer avec les Russes », a-t-il dit.

Quoi qu’il en soit, cette batterie S-300PMU ne représentera plus le moindre danger pour les avions de combat de Tsahal.

En effet, selon l’imagerie satellitaire fournie par la société israélienne ImageSat International, il apparaît que le S-300PMU a été retiré de la base de Masyaf, où il était installé, et que ses éléments ont été transférés au port militaire russe de Tartous. Ceux-ci y ont été repérés le 12 août.

Et, d’après une série de photographies prises par satellites, ces composants du S-300PMU y seraient restés pendant huit jours… avant d’être vraisembablement embarqués à bord du cargo [russe] de type Ro-Ro « Sparta II », lequel a appareillé de Tartous le 20 août, avant de mettre le cap vers Novorossiysk [kraï de Krasnodar, Sud de la Russie], où est implantée une base de la marine russe donnant sur la mer Noire.

Le Sparta II est connu pour transporter du matériel militaire russe. Et il fait d’ailleurs l’objet de sanctions américaines à ce titre. A priori, il aurait traversé le détroit du Bosphore dans la nuit du 24 au 25 août. Actuellement, il est amarré à Novorossiysk.

Or, le 28 février, la Turquie a interdit le transit de navires de guerre dans le détroit du Bosphore et celui des Dardanelles, comme l’y autorise la Convention de Montreux de 1936. Appartenant à la société Oboronlogistika, installée à Moscou, le Sparta II n’est, a priori, pas concerné par ces restrictions imposées depuis le début de la guerre en Ukraine.

À moins de considérer un bateau transportant du matériel militaire comme un bâtiment de guerre. « En temps de guerre, la Turquie n’étant pas belligérante, les navires de commerce, quels que soient le pavillon et le chargement, jouiront de la liberté de passage et de navigation dans les détroits », précise en effet l’article 4 de la Convention.

Cependant, l’analyste géopolitique turc Yörük Işık, qui anime le site « L’observateur du Bosphore » a récemment expliqué que la Russie en profite pour « utiliser des navires marchands civils comme auxiliaires navals pour fournir la logistique à ses opérations militaires en Syrie et en Ukraine ». Ce qui a donc été encore le cas avec le cargo Spartan II.

Reste à voir les raisons du transfert de ce système S-300PMU de Tartous vers Novorossiysk. Une explication possible serait que l’état-major russe entend renforcer la protection du pont de Kertch contre d’éventuelles frappes de drones ou de missiles ukrainiens.

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