Le constructeur russe Sukhoï envisage une version navalisée de son avion de 5e génération Su-57 « Felon »

Comme au temps de l’Union soviétique, la marine russe n’a, jusqu’à présent, manifesté un intérêt limité aux capacités aéronavales, ses priorités allant plutôt vers le développement de sa flotte de sous-marins. Mais cela pourrait changer à l’avenir.

En effet, lors d’un discours prononcé à Saint-Pétersbourg, le 31 juillet dernier, le chef du Kremlin, Vladimir Poutine, a dévoilé une nouvelle doctrine navale, dans laquelle l’Otan en général et les États-Unis en particulier sont décrits comme faisant partie des « principaux défis et menace à la sécurité nationale et au développement de la Fédération de Russie » sur les mers.

Et ce document [.pdf] souligne la nécessité de « s’assurer de la capacité de l’industrie navale russe à construire des navires de grande capacité, y compris des porte-avions modernes pour la marine ».

Or, ces dernières années, plusieurs concepts de porte-avions ont été dévoilés par Moscou, comme l’ambitieux projet « 3000E Shtorm », qui proposait de construire un navire d’au-moins 90.000 tonnes, d’une longueur de 330 mètres pour 40 mètres de large et capable d’emporter entre 80 et 90 aéronefs lancés soit par des catapultes électromagnétiques, soit au moyen de des tremplins, comme cela avait été imaginé pour l' »Oulianovsk », qui auait pu devenir le premier porte-avions à propulsion nucléaire soviétique.

Seulement, ce projet est resté à l’état de maquette… Mais, en 2021, le bureau d’études Nevsky, filiale du constructeur naval United Shipbuilding Corporation [USC], dévoilé deux nouveaux concepts de porte-avions, dont le Varan [en configuration CATOBAR, c’est à dire doté de catapultes et de brins d’arrêt] et le Lamentin, une version plus modeste du « 3000E Shtorm ».

Quoi qu’il en soit, aucune suite n’a été donnée à ces concepts pour le moment. D’ailleurs, la Russie ne dispose pas, pour le moment, de chantiers navals adéquats pour le moment [sauf à mettre la main sur celui de Nikolayev, dans la région d’Odessa, en Ukraine, ndlr]. Et la marine russe devra se contenter de son unique porte-avions, « l’Amiral Kouznetsov », qui n’a plus navigué depuis sa modernisation a été lancée, en 2017.

Ayant subi maints aléas [chute d’une grue, incendie à bord, etc], ce chantier a pris du retard. Et, dernièrement, il a été avancé que cet unique porte-avions russe ne reprendrait pas la mer d’ici à 2024, des malfaçons ayant été constatées. Ce qu’a récemment confirmé Alexeï Rakhmanov, le patron du conglomérat USC, auprès de l’agence Interfax.

« À la suite de la détection de défauts, une partie importante de l’équipement a dû être remplacée ou réparée en usine », a confié ce responsable, qui évoqué des difficultés « objectives » et « subjectives » qu’il n’a pas détaillés. « De plus, des décisions ont été prises concernant le navire et je ne peux pas les commenter. Mais je note qu’après la réparation, le porte-avions Amiral Kouznetsov servira pendant au moins 25 ans », a-t-il ajouté. Ce qui reste à voir…

Si tel est le cas, et sous réserve la construction d’un nouveau porte-avions finisse par se concrétiser [un financement était à l’étude, fin 2021, selon le ministère russe de la Défense, ndlr], alors il faudra probablement de nouveaux chasseurs embarqués, sachant qu’actuellement, l’aviation navale russe dispose de MiG-29K et de Su-33.

L’été dernier, une source de l’industrie militaire russe avait assuré à l’agence Ria Novosti que le constructeur RSK MiG venant de lancer le développement d’un chasseur embarqué de « 5e génération », en vue de présenter un prototype dans les « prochaines années ». Et de laisser entendre que cet appareil serait de type VSTOL [Vertical or Short Take Off and Landing]…

Cela étant, RSK MiG n’est pas le seul constructeur à se pencher sur la question. Lors du forum Armée 2022, qui s’est récemment tenu dans la banlieue de Moscou, le directeur général du conglomérat OAK [Compagnie aéronautique unifiée], Youri Slyusar, a expliqué à l’agence TASS que le chasseur-bombardier de 5e génération Su-57 « Felon » pourrait servir de modèle à un éventuel futur avion de combat embarqué.

« La doctrine maritime russe évoque la construction de porte-avions avancés. De notre point de vue, ce qui serait le plus prometteur consisterait à bâtir un groupe aéronaval basé sur un chasseur de cinquième génération et utilisant également des drones. Les bases posées dans le cadre du programme Su-57 permettrait de le faire dans les plus brefs délais », a fait valoir M. Slyusar.

Pour rappel, présentant une envergure de 13,95 mètres pour une longueur de 19,8 mètres et une masse au décollage de 35.000 kg, le Su-57 Felon peut voler à la vitesse de Mach 2,42, à 19.000 mètres d’altitude, pour un rayon d’action de 2150 à 3500 km. Doté de 4 soutes d’armement [dont 2 sur les flancs pour les missiles air-air] et 6 pylones externes, il est équipé de radars en bande L et en bande X. Il est prévu de lui associer le drone de combat S-70 Okhotnik-B. La force aérospatial russe en a commandé 76 exemplaires à ce jour.

Cela étant, compte tenu des contraintes physiques et mécaniques qui s’exercent au moment du catapultage et de l’appontage, il ne suffira pas d’ajouter une crosse à un Su-57 pour en faire un avion embarqué…

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