Les porte-avions chinois CNS Liaoning et CNS Shandong ont appareillé avant la visite de Mme Pelosi à Taïwan

A priori, la présidente de la Chambre des représentants du Congrès des États-Unis, Nancy Pelosi, est en route vers Taïwan, malgré les avertissements du gouvernement chinois, qui est vent debout contre une telle visite dans la mesure où elle remettrait en cause le principe de « Chine unique ». Et pour dissuader l’élue américaine d’entreprendre un tel voyage, l’Armée populaire de libération [APL] a même effectué des manoeuvres avec des munitions réelles, à environ 120 kilomètres des côtes taïwanaises, le 30 juillet.

Dans cette affaire, une visite « surprise » de Mme Pelosi à Taipei n’aurait sans doute pas provoqué autant de tensions étant donné qu’elle aurait pris tout le monde de court. L’erreur aura donc été de laisser entendre qu’un déplacement à Taïwan était envisagé… Et y renoncer conforterait Pékin dans son attitude, ce qui ne manquerait pas d’avoir des conséquences négatives, tant au niveau politique que diplomatique.

« La partie américaine a trahi sa parole sur la question taïwanaise », a encore commenté Wang Yi, le ministre chinois des Affaires étrangères, dans une allusion à l’engagement pris en 1979 par les États-Unis d’adhérer au concept de « Chine unique ».

« Les États-Unis auront assurément la responsabilité [des conséquences] et devront payer le prix de leur atteinte à la souveraineté et à la sécurité de la Chine », a également averti Hua Chunying, une porte-parole de la diplomatie chinoise.

Si Mme Pelosi visite l’île de Taïwan, « l’APL ne restera pas les bras croisés » et prendra « des contre-mesures résolues et fortes » pour protéger la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Chine », a également assuré Pékin.

La semaine passée, à l’occasion d’une conversation téléphonique avec Joe Biden, son homologue américain, le président chinois, Xi Jinping, avait prévenu : « Ceux qui jouent avec le feu finissent par se brûler ». Et d’ajouter : « J’espère que la partie américaine comprend parfaitement cela ».

Quoi qu’il en soit, Pékin montre ses muscles. Ainsi, selon la presse chinoise, et alors que des mouvements de troupes ont été signalés dans la province de Fujian, qui fait face aux côtes taïwanaises, les deux porte-avions de la composante navale de l’APL, à savoir le CNS Liaoning et le CNS Shandong, ont tous les deux appareillés de leur port d’attache pour se diriger apparemment vers le détroit de Taïwan.

Ainsi, le 31 juillet, le CNS Liaoning a quitté Qingdao [province de Shandong] et le CNS Shandong a pris la mer le lendemain, depuis la base navale de Sanya [province de Hainan], a priori au côté d’un navire d’assaut amphibie de Type 075 non précisé.

À noter qu’aucun des deux porte-avions chinois n’a appareillé avec un groupe aéronaval, généralement composé d’un navire ravitailleur, de de frégates de lutte anti-sous-marine, de croiseurs [ou de « destroyers »] de défense aérienne et d’au moins un sous-marin. Il est possible qu’ils fassent la jonction avec leur escorte en cours de route… laquelle pourrait passer par le détroit de Taïwan.

En attendant, et d’après le portail d’information Focus Taïwan, un puissant croiseur de type 055D, équipé de 112 tubes de lancement vertical, ainsi qu’une frégate de type 054 ont été repérés à 45 milles au sud-est de l’île de Lanuy, située au sud-est de Taïwan. Par ailleurs, ce 2 août, et sans donner de détails, l’agence Reuters a signalé que plusieurs avions militaires chinois ont survolé la ligne médiane du détroit de Taïwan, où « plusieurs navires de guerre » de l’APL croisaient, alors que la visite de Mme Pelosi à Taipei était quasiment confirmée.

Côté américain, l’US Navy a déployé, à l’est de Taïwan, un groupe aéronaval constitué autour du porte-avions USS Ronald Reagan, ainsi que le navire d’assaut amphibie USS Tripoli [avec des F-35B à bord]. Un autre bâtiment du même type, l’USS America, un temps signalé, serait finalement resté au port de Sasebo [Japon], selon USNI News.

C’est donc dans ce contexte que le Boeing C-40 de l’US Air Force emmenant – sous escorte – la délégation dirigée par Mme Pelosi a fini par se poser à Taipei, ce 2 août alors que, quelques minutes plus tôt, la télévison d’État chinoise venait d’annoncer que des avions de chasse Su-35 de l’APL étaient en train de « traverser le détroit de Taïwan ». Ce qui n’a pas pu être confirmé pour le moment.

En tout cas, Pékin entend bien maintenir la pression… En effet, l’agence de presse Xinhua a publié un avis concernant six zones qui, toutes situées autour de Taïwan, seront le théâtre d’exercices militaires impliquant des tirs réels. Ceux-ci commenceront le 4 août [Mme Pelosi devrait avoir quitté Taipei] et dureront trois jours. Sans doute que les CNS Liaoning et CNS Shandong y participeront.

Cela étant, ce n’est pas la première fois qu’un président de la Chambre des représentants se rend à Taipei… En 1997, Newt Gingrich avait fait un tel déplacement, alors que la troisième crise du détroit de Taïwan venait de se terminer, le déploiement des porte-avions américains USS Nimitz et USS Independence ayant mis un terme à la pression militaire qu’exerçait la Chine sur l’île, avec notamment des tirs de missiles dans les eaux territoriales taïwanaises. Si la présence de groupes aéronavals de l’US Navy dans la région avait dissuadé Pékin de poursuivre ses actions, ce n’est désormais plus le cas…

Photo : CNS Liaoning / Archive

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