L’avion « tueur de chars » A-10 Warthog fait son retour en Europe

Avant la chute du Mur de Berlin [novembre 1989], l’US Air Force disposait en Europe d’environ 140 avions d’attaque A-10 « Warthog » [ou « Thunderbolt II »], soit l’équivalent de six escadrons. Et cela afin, le cas échéant, d’être en mesure d’anéantir les colonnes blindés des forces du Pacte de Varsovie.

Conçu autour du canon Gatling de 30 mm GAU-8 Avenger, capable de tirer jusqu’à 3.900 projectiles à la minute, l’A-10 « Warthog » est un avion affichant une très grande maniabilité à basse vitesse et à basse altitude. Ce qui en fait un système redoutable pour les blindés ennemis, comme il a pu le démontrer contre les forces irakiennes, lors de l’opération « Tempête du Désert », en 1991, avec 900 chars, 2000 véhicules et 1200 pièces d’artillerie détruits à son actif.

Quoi qu’il en soit, la menace soviétique écartée et, aussi, pour des raisons budgétaires, le nombre d’escadrons d’A-10 « Warthog » affectés en Europe diminua progressivement. Et le dernier fut désactivé en 2013. Il s’agissait du 81st Fighter Squadron qui, alors qu’il était basé à Spandahlem [Allemagne], venait alors de prendre part à l’opération « Odyssey Dawn », prélude à la mission « Unified Protector », menée par l’Otan en Libye.

Qui plus est, depuis maintenant plusieurs années, l’US Air Force cherche à retirer du service les derniers A-10 qui lui restent. Et cela pour deux raisons : cela lui procurerait des marges de manoeuvres budgétaires supplémentaires pour financer d’autres programmes [F-35A, par exemple] et ces avions seraient plus vulnérables dans un environnement contesté que par le passé, même s’il a démontré qu’il pouvait voler avec un seul moteur… et la moitié d’une aile.

Seulement, le « Phacochère », comme on le surnomme, a de nombreux partisans parmi les militaires [en particulier ceux qui ont auxquels il a fourni un appui aérien en Afghanistan et ne Irak, nldr] et les parlementaires américains, qui ont toujours le dernier mot… Ce qui fait que, malgré la volonté du Pentagone, cet avion est toujours exploité… Et qu’il a même bénéficié d’une remise à niveau afin de lui redonner du potentiel.

Depuis la désactivation du 81st Fighter Squadron, survenue un an avant l’annexion de la Crimée par la Russie et le retour des tensions sur le flanc oriental de l’Otan, l’US Air Force a ponctuellement déployé une poignée d’A-10 en Europe, en particulier en Estonie, pour des missions de courte durée. Et, sauf erreur, plus aucun de ces avions n’a été vu sur le Vieux Continent depuis au moins 2017.

Cela étant, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a changé la donne. D’ailleurs, à ce sujet, plusieurs ex-responsables militaires américains, et non des moindres, comme le général Philip Breedlove, ancien commandant suprême des forces alliées en Europe [SACEUF], ont suggéré de livrer des A-10 à la force aérienne ukrainienne, pour qu’elle puisse décimer les colonnes blindés russes… Une suggestion rapidement écartée par l’administration Biden.

Toujours est-il que, dans le cadre des mesures de réassurance prises par l’Otan, l’US Air Force a annoncé, la semaine passée, l’arrivée en Europe de dix A-10 Warthog appartenant au 104th Fighter Squadron de l’Air National Guard, basé dans le Maryland. Ayant transité par l’Islande, quatre de ces avions ont ensuite pris la direction de la Norvège tandis que les six autres ont mis le cap vers la Macédoine du Nord, afin de prendre à l’exercice Swift Response, de l’Otan.

La durée de leur mission en Europe n’a pas été précisée. Cependant, l’US Air Force a indiqué que ces dix A-10 « Warthog » seront déployés en Pologne, en Lettonie, en Lituanie et en Estonie. Les capacités de cet avion « fournissent un soutien essentiel à la composante terrestre d’une force interarmées et permettent aux forces américaines de projeter leur puissance dans des régions très disputées », a-t-elle souligné.

Cette annonce a coïncidé avec celle concernant des essais ayant consisté à vérifier la capacité des A-10 Warthog à détruire des chars dotés d’un blindage réactif explosif, censé réduire l’impact d’un projectile et d’empêcher toute perforation. Ces tests ont été réalisés avec succès au Nevada Test and Training Range, entre les 14 et 25 février, a fait savoir l’Air Combat Command [ACC], le 6 mai dernier.

« Les analystes ont pu évaluer les dommages infligés aux chars et déterminer qu’ils étaient devenus inopérants », a résumé l’ACC. Pour détruire un blindé, un A-10 utilise 120 obus perforants, ce qui signifie qu’il peut en viser neuf ou dix avant d’épuiser ses munitions, a-t-il précisé. Et d’insister : « Contre des forces importantes en campagne, une formation de A-10 est capable d’engager près de 40 véhicules blindés avec des munitions de 30 mm. C’est une puissance de feu importante ».

Photo : US Air Force

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