La Slovénie va livrer ses chars de combat à l’Ukraine et recevoir des blindés allemands en échange

Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, voire même avant, l’Allemagne est régulièrement critiquée pour ses réticences à autoriser la cession d’équipements militaires lui ayant appartenu aux forces ukrainiennes, au nom de ses règles en matière de ventes d’armes. Tel a par exemple été le cas des obusiers D-30, que l’Estonie voulait céder à Kiev, au moment où le Kremlin accentuait sa pression.

Les circonstances ont conduit Berlin à revoir sa position. Et c’est ainsi que la Bundeswehr [forces armées allemandes] a déstocké de vieux missiles sol-air portables de type Strela ayant appartenu à la République démocratique allemande [RDA] afin de les livrer à l’armée ukrainienne. Ce don s’est accompagné de celui de 1000 lance-roquettes, de missiles sol-air Stinger, de 14 blindés et 10’000 tonnes de carburant.

« L’agression russe contre l’Ukraine marque un changement d’époque, elle menace l’ordre établi depuis l’après-guerre » et « dans cette situation il est de notre devoir d’aider l’Ukraine autant que nous pouvons à se défendre contre l’armée d’invasion de Vladimir Poutine », fit ainsi valoir Olaf Scholz, le chancelier allemand, le 27 février.

Cependant, du point de vue ukrainien, on estime que Berlin pourrait en faire nettement plus… D’où des tensions diplomatiques entre les deux pays, le président allemand, Frank-Walter Steinmeier, ayant été déclaré persona non grata à Kiev, le 13 avril dernier. Cela étant, cette décison a été motivée par le fait l’intéressé a eu des « relations étroites » avec la Russie par le passé. Telle est, du moins, la raison avancée par un diplomate ukrainien, selon le quotidien Bild.

« Il est clair que l’Allemagne peut faire plus, compte tenu de ses réserves », a lancé, début avril, Dmytro Kouleba, le ministre ukrainien des Affaires étrangères. Un point de vue réaffirmé par Andriy Melnyk, l’ambassadeur ukrainien en poste à Berlin, le 20 avril. « La thèse selon laquelle la Bundeswehr ne serait plus en mesure de livrer quoi que ce soit à l’Ukraine n’est pas compréhensible », a-t-il dit.

Sans doute que les rapports publiés ces dernières années sur l’état de la Bundeswehr ne sont jamais arrivés jusqu’à Kiev… Car tous ont mis en lumière les grosses lacunes des forces armées allemandes… au point que leur aptitude à fournir les capacités demandées par l’Otan a régulièrement été remise en cause. C’est d’ailleurs ce qu’a déploré le général Alfons Mais, le chef d’état-major de la « Heer » [armée de terre, ndlr], le 24 février dernier.

« La Bundeswehr est dans une situation dans laquelle elle ne peut malheureusement pas donner d’armes si elle veut continuer à garantir la défense nationale et celle de l’alliance », a encore répété Christine Lambrecht, la ministre allemande de la Défense, ce 21 avril. Son homologue des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, n’avait pas dit autre chose, la veille, lors d’un déplacement en Lettonie. « À court terme, nous n’avons rien que nous puissions livrer rapidement et immédiatement », a-t-elle dit.

Cela étant, Berlin entend mettre en place une autre solution : permettre à certains pays de l’Otan de céder à l’Ukraine les équipements militaires qu’ils ont hérités de la période soviétique en les remplaçant par des matériels de facture allemande. L’idée est de fournir aux forces ukrainiennes des capacités qu’elles maîtrisent… La livraison d’armements plus élaborés devant intervenir plus tard.

Ainsi, la Bundeswehr devrait assurer la formation des artilleurs ukrainiens qui utiliseront l’obusier automoteur PzH-2000 que compte leur fournir les Pays-Bas. « Là où nous pouvons fournir une formation, nous le ferons », a confirmé Mme Lambrecht.

Mais en attendant, l’urgence est d’aider l’Ukraine a faire face à la « seconde phase » de l’offensive russe, qui se concentre désormais dans la région du Donbass. L’armée ukrainienne « recevra dans les prochains jours » des « armes lourdes, dont des chars de combat, de la part de pays de l’est », a également annoncé la ministre allemande de la Défense. « Il s’agit de chars de combat, de véhicules blindés, ou d’autres possibilités [de matériel] que ces pays peuvent céder », a-t-elle ajouté.

C’est ainsi que la Slovénie se séparera de ses chars M-84 pour les envoyer en Ukraine. En échange, elle obtiendra des véhicules de combat d’infanterie Marder qui, n’étant plus de toute première jeunesse, sont en cours de remplacement au sein de la Bundeswehr par des blindés Puma.

Mais l’armée slovène pourrait obtenir davantage, selon des informations « provenant de cercles gouvernementaux » et obtenus par l’agence de presse allemande Dpa. En effet, Ljubljana aurait demandé des chars Leopard 2 ainsi que des blindés Boxer ou Puma en guise de compensation.

Pour rappel, le char M-84 est une version yougoslave du T-72 soviétique, produite entre 1979 et 1983 [ce qui est plus récent que les Leopard 1 que le groupe allemand Rheinmetall avait proposés de livrer à l’Ukraine…]. Lors de l’éclatement de la Yougoslavie, la Slovénie en avait récupéré une cinquantaine d’exemplaires. Actuellement, l’armée slovène n’en maintient qu’une petite vingtaine en service, le reste ayant été mis en réserve.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]