Grâce à un accord avec les Îles Salomon, les forces chinoises vont pouvoir prendre pied en Océanie

Comme l’ont montré les combats de la Seconde Guerre Mondiale dans la région Indo-Pacifique, les Îles Salomon occupent une position stratégique. À l’époque, leur contrôle permettaient de maintenir les lignes d’approvisionnement entre les États-Unis et l’Australie [ainsi que de la Nouvelle-Zélande et le Nouvelle-Calédonie].

D’où l’intérêt que leur porte la Chine, qui n’a pas ménagé ses efforts pour y accroître son influence, notamment de nombreux investissements économiques et commerciaux. Une manne pour cet État mélanésien de 700’000 habitants, qui est l’un des plus pauvres du monde. Ainsi, le marché chinois devint le principal débouché de ses exportations [pour près de 555 millions de dollars en 2017…].

Résultat : peu après avoir récupéré son fauteuil de Premier ministre [qu’il avait déjà occupé à trois reprises, pour des périodes plus ou moins longues], le chef du gouvernement salomonais, Manasseh Sogavare orienta résolument la politique étrangère de son pays vers la Chine. Ce qui se traduira, en 2019, par la rupture des relations diplomatiques avec Taïwan, la reconnaissance du concept d’une seule Chine et l’adhésion des Îles Salomon aux nouvelles routes de la soie.

Pour autant, cette proximité avec la Chine divise les Salomonais. En novembre 2021, elle a en partie été la raison de violentes émeutes qui ont contraint M. Sogavare à faire appel à l’Australie ainsi qu’à d’autres pays d’Océanie pour rétablir l’ordre. En outre, l’une des îles de l’archipel, celle de Malaita, a même menacé de faire sécession.

Cependant, même si elles se tournent volontiers vers leurs plus proches voisins quand elles sont dans le besoin, les Îles Salomon n’ont d’yeux que pour la Chine… Du moins est-ce le cas de M. Sogavare… Et cela au point de signer un accord de sécurité avec Pékin, ce 31 mars, au grand dam de Canberra et de Wellington.

« Les autorités des Iles Salomon et de la République populaire de Chine ont paraphé aujourd’hui les éléments d’un cadre de coopération bilatérale en matière de sécurité entre les deux pays », a en effet annoncé le bureau du premier ministre salomonais.

Signe, sans doute, que ce texte ne fait pas l’unaminité dans le pays, son contenu a été diffusé la semaine passée. Et, avec cet accord, la Chine seraient autorisées à envoyer des navires militaires dans Îles Salomon « pour y effectuer des réapprovisionnements logistiques et des escales ». En outre, Pékin pourra déployer, à la demande de Honiara, des forces de sécurité afin d’y assurer le maintien de « l’ordre social » ainsi que la protection « du personnel chinois » et des « principaux projets » de l’archipel.

Pour la diplomatie chinoise, cet accord est « conforme au droit international » et « aux pratiques » entre nations. Et d’appeler les pays qui seraient tentés d’émettre des critiques ou des réserves à « respecter la souveraineté » des Îles Salomon « au lieu de croire croire avec condescendance qu’ils peuvent leur dire ce qu’elles doivent faire ou pas ». Un tel propos vise au premier chef l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis.

« L’accord proposé par les Îles Salomon avec la Chine risque de déstabiliser les institutions et les arrangements actuels qui assurent depuis longtemps la sécurité de la région du Pacifique », avait ainsi déclaré le gouvernement néo-zélandais, en réaction aux fuites concernant le contenu du texte signé par Pékin et Honiara.

« L’Australie a connaissance du projet d’accord de coopération en matière de sécurité proposé entre la Chine et les Îles Salomon. Nous respectons le droit de chaque pays du Pacifique à prendre des décisions souveraines. Nous avons régulièrement et respectueusement fait part de nos préoccupations au Gouvernement des Îles Salomon et nous continuerons de le faire. Nous serions particulièrement préoccupés par toute action qui compromettrait la stabilité et la sécurité de notre région, y compris l’établissement d’une présence permanente telle qu’une base militaire », avait aussi fait valoir Canberra, le 25 mars.

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