Au moins deux tiers des avions F-35A que veut commander la Suisse seront assemblés en Italie
Selon une enquête d’opinion réalisée entre les 16 et 18 mars par l’Institut LeeWas, 45% des Suisses seraient favorables à une hausse du budget militaire de leur pays. Et certains vont même jusqu’à estimer que son niveau devrait être porté à 2% du PIB [soit à 14 milliards de francs suisses – 13,67 milliards d’euros]. Cependant, ils sont 41% à considérer qu’une augmentation de ces dépenses ne s’impose pas… Et 8% voudraient que celles-ci soient même réduites.
Ce clivage est aussi politique : ceux qui souhaitent une hausse des dépenses militaires disent avoir une sensibilité de droite tandis que ceux qui s’y opposent sont plutôt proches des partis de gauche… lesquels, par ailleurs, mènent la fronde contre l’achat annoncé de 36 chasseurs-bombardiers F-35A auprès du constructeur américain Lockheed-Martin.
Avec le « Groupe pour une Suisse sans armée » [GSSA], les Verts et le Parti socialiste suisse espèrent qu’une votation sera organisée au sujet de cette commande. Pour cela, ils doivent réunir 100’000 signatures, un objectif qu’ils ne sont pas loin d’atteindre [ils en ont collecté près de 90’000 au 24 mars, nldr]. En outre, l’appel que leur a lancé Viola Amherd, la cheffe du département fédéral de la Défense, pour retirer leur initiative a fait chou blanc.
Cela étant, le choix du F-35A pour moderniser les forces aériennes suisses ne suscite pas des réticences uniquement au sein de la gauche. La semaine passée, un comité « bourgeois », appelé « Groupe pour une Suisse sûre » et composé notamment de militaires, d’entrepreneurs et d’élus alémaniques, a fait connaître son opposition à ce projet d’achat d’avions américains, via une lettre ouverte et un site Internet.
Ce comité, dont on ne sait que très peu de chose, a ainsi fait valoir au moins trois arguments : le développement du F-35A n’étant pas terminé [le block 4, la version définitive, n’est pas encore opérationnel, nldr], la facture risque d’augmenter sensiblement, le coût de possession des appareils aurait été sous évalué et la réduction des heures de vol [grâce la simulation] serait un facteur de risque pour les pilotes.
Quoi qu’il en soit, selon le sondage réalisé par l’Institut LeeWas, trois personnes interrogées sur cinq seraient prêtes à rejeter l’initiative contre l’achat des F-35A. L’un des explications que l’on peut avancer est qu’opinion publique suisse redoute de voir ses forces aériennes disparaître, faute de « plan B », comme l’avait affirmé Mme Amherd. Cependant, l’achat de nouveaux avions de combat avait été approuvé in-extremis, lors d’une votation organisée en septembre 2020…;
En attendant, et pendant que le débat sur l’opportunité de cet achat a lieu, Armasuisse, l’office fédéral de l’armement, a indiqué qu’au moins 24 F-35A sur les 36 devant être commandés par Berne seront produits à l’usine d’assemblage [FACO – Final Assembly and Check Out] que Leonardo et Lockheed-Martin avait inaugurée à Cameri, en 2013. Et les huit premiers seront assemblés aux États-Unis.
« Sur les 36 avions de combat F-35A destinés à la Suisse, 24 au moins seront produits dans la ville italienne de Cameri. Des clarifications sont en cours afin de déterminer si le montage final de 4 autres appareils pourrait avoir lieu en Suisse dans le cadre d’un projet d’affaire compensatoire. Les 8 premiers seront fabriqués aux États-Unis, l’instruction initiale des pilotes suisses se déroulant là-bas », a en effet expliqué Armasuisse, via un communiqué publié ce 24 mars.
Si Lockheed-Martin estime que le groupe Ruag en a les capacités, quatre F-35A seront effectivement assemblés en Suisse. Si ce n’est pas le cas, alors ils le seront en Italie.
« L’Italie a participé au programme F-35 dès le début et possède à Cameri une des deux lignes de production du F-35 hors des États-Unis – et la seule en Europe. L’armée de l’air et la marine italiennes exploitent des avions de type F-35A et F-35B. À Cameri, Leonardo produit en outre des F-35A pour l’armée de l’air néerlandaise », a rappelé Armasuisse, précisant que le ‘ »prix et le calendrier » prévus restent inchangés, les premiers avions devant être livrés en 2027.