Estimant que la Russie est « dangereuse » et « imprévisible », Oslo accentue son effort militaire

Quand il était président des États-Unis, Donald Trump ne fut pas épargné par les critiques ainsi que par les soupçons concernant une possible collusion avec la Russie. Pourtant, ce fut son administration qui autorisa la cession de missiles antichars FGM-148 Javelin à l’Ukraine, rompant ainsi avec la position affichée par celle de Barack Obama, celle-ci ayant constamment refusé de livrer des « armes létales » aux forces ukrainiennes.

Par ailleurs, M. Trump ne cessa de critiquer les pays de l’Otan qui n’avaient pas encore porté le niveau de leurs dépenses militaires à 2% du PIB, conformément à l’engagement pris lors du sommet de Newport, en 2014. L’Allemagne eut notamment à subir ses admonestations, d’autant plus que celle-ci entendait poursuivre le projet Nord Stream II afin d’augmenter les importations de gaz russe vers l’Europe.

D’autres membres, qui avaient pourtant fait un effort budgétaire en faveur de leurs forces armées, s’attirèrent aussi les foudres de M. Trump. Tel fut le cas de la Norvège, « seul pays de l’Otan limitrophe de la Russie n’ayant pas de plan crédible pour consacrer 2% de son PIB à sa défense », avait-il affirmé en 2018, en soulignant qu’elle était « les yeux et les oreilles » des Alliées sur le « flanc nord » de l’Alliance.

Pourtant, la Norvège n’était alors pas forcément un « mauvais élève » en matière de budget militaire. N’ayant pas eu à subir les rigueurs de la crise de 2008 [suivie, au sein de l’Union européenne, par celles de la dette et de l’euro], Oslo ne tailla pas dans ses dépenses de défense, contrairement à beaucoup… Mieux même : le gouvernement norvégien les augmenta, afin de protéger ses ressources en hydrocarbures dans le Grand Nord, région considérée comme hautement stratégique pour Moscou. Et cette tendance s’accentua après l’annexion de la Crimée par la Russie.

Auprès avoir augmenté ses dépenses militaires de +9,8% en 2015 [pour les porter à 5,45 milliards d’euros], Oslo annonça, en juin 2016, un effort de défense « sans précédent » en matière de défense, l’objectif était de porter les ressources financières annuelles de ses armées à 17,5 milliards d’euros en vingt ans.

Et, entre 2013 et 2020, les dépenses de défense par habitant ont augmenté d’environ 30%, passant de 1095 à 1492 dollars, selon des statistiques publiées par l’Otan l’an passé.

En octobre 2020, le gouvernement norvégien a présenté une nouvelle programmation militaire sur quatre ans, avec l’objectif de porter le budget de ses forces armées à près de 7 milliards d’euros en 2024, avec une première marche de 300 millions d’euros dès 2021 [1 couronne norvégienne vaut 0,1 euro, ndlr]. De quoi renouveler et acroître les capacités de ses forces terrestres [avec l’achat de nouveaux chars de combat], moderniser sa marine et financer l’achat et l’entretien des F-35A et P-8A Poseidon ses forces aériennes.

Comme pour d’autres pays [à l’exception, pour le moment, de la France, le président Macron ayant seulement indiqué qu’il porterait, s’il est réélu en avril prochain, le budget des armées à 50 milliards d’euros en 2025, comme le prévoit la Loi de programmation militaire en cours], la Norvège va accélérer la modernisation de ses forces, avec une enveloppe supplémentaire de plus de 300 millions d’euros, laquelle sera débloquée dès cette année.

« Même si une attaque russe contre la Norvège n’est pas probable, il faut que l’on réalise que nous avons un voisin à l’Est qui est devenu plus dangereux et plus imprévisible », a justifié Odd Roger Enoksen, le ministre norvégien de la Défense, lors d’une conférence de presse donnée ce 18 mars.

« Nous devons accroître notre présence dans le Grand Nord », a-t-il ajouté, observant que la Russie y a des intérêts sécuritaires significatifs et que cette région a également une « forte importance économique » pour elle.

Cet effort budgétaire servira à accroître la présence navale dans le Nord, intensifier la préparation opérationnelle des forces d’active et de réserve, augmenter les stocks de munitions, renforcer la cyberdéfense et le renseignement et améliorer l’accueil de troupes alliées, lesquelles viennent régulièrement en Norvège, comme c’est actuellement le cas avec l’exercice Cold Response 22.

Bien que n’appartenant pas à l’Union européenne, la Norvège a pris des sanctions identiques contre la Russie après l’invasion de l’Ukraine. À la différence qu’elle n’a pas interdit les médias russes, comme Russia Today et Sputnik. Du moins pour le moment.

« Je dois admettre que c’est un dossier difficile où des principes majeurs se heurtent les uns aux autres et nous voulons nous donner plus de temps », a expliqué Jonas Gahr Støre, le Premier ministre norvégien, pour qui la « liberté d’expression est centrale » en Norvége.

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