Le Kosovo demande aux États-Unis d’établir une base permanente sur son sol et veut hâter son adhésion à l’Otan

La question du Kosovo fait partie des contentieux qui opposent Moscou aux Occidentaux. Pour rappel, cette ancienne province serbe a pu proclamer son indépendance à l’issue d’une intervention militaire de l’Otan, lancée en mars 1999 sans mandat des Nations unies, faute de pouvoir obtenir un consensus au Conseil des États-Unis, la Russie et la Chine ayant un droit de veto de par leur statut de membres permanents.

À l’époque, les diplomates des pays membres de l’Otan avaient estimé que les résolutions de l’ONU précédemment adoptées au sujet du Kosovo et qui prévenaient Belgrade d’un possible usage de la force pour éviter une « catastrophe humanitaires » étaient suffisantes pour lancer une telle opération militaire. Ce que la Russie, proche de la Serbie, contesta, par la voix de Sergueï Lavrov, qui était alors son représentant auprès des Nations unies.

En effet, celui-ci fit valoir que le droit international ne prévoyait le recours à la force que dans deux cas : la défense lors d’une agression et l’intervention dans un pays tiers avec un mandat de l’ONU. Or, avait-il estimé, le Kosovo n’entrait dans aucune de ces catégories.

En outre, il apparaîtra plus tard que la réalité de la situation au Kosovo fit l’objet d’exagérations, comme le montrèrent les journalistes américains Robert Block et Daniel Pearl, dans une enquête publiée par le Wall Street Journal en décembre 2000. Ou encore comme le révéla l’hebdomadaire Der Spiegel , qui démontra que les ministères allemands de la Défense et des Affaires étrangères avaient cherché à manipuler l’opinion en évoquant un plan qui, appelé « fer à cheval » et attribué aux Serbes, prévoyait l’épuration éthnique du Kosovo. Or, celui-ci avait été monté de toute pièce, avec la complicité des services de renseignement bulgares.

Par ailleurs, un épisode de cette intervention n’a sans doute pas aidé à instaurer un climat de confiance entre Moscou et l’Alliance atlantique. En juin 1999, des parachutistes russes, alors engagés au sein de la SFOR, en Bosnie-Herzégovine, se déployèrent sur l’aéroport de Pristina, prenant de vitesse les forces terrestres de l’Otan. À l’issue de pourparlers difficiles, la Russie de Boris Eltsine avait obtenu de tenir un rôle un Kosovo, notamment dans le nord, peuplé majoritairement de Serbes. Rôle qu’elle ne put finalement pas tenir.

Quoi qu’il en soit, cet épisode aura laissé des traces. Ainsi, dans une note publiée en juillet 2007, l’Institut français des relations internationales [IFRI] avait estimé que « le cas du Kosovo pourrait représenter un autre type de précédent qui, cette fois, pourrait être tourné par Moscou à son avantage ». Et d’évoquer « les revendications d’indépendance par les entités séparatistes non reconnues de l’ex-Union soviétique, parmi lesquelles l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie en Géorgie et la Transnistrie, en Moldavie ». Ce qui a fini par se réaliser, la Russie mettant en avant le cas de l’ex-province serbe pour justifier ses actions, tant en Géorgie que dans la région du Donbass et en Crimée.

Alors que le contexte sécuritaire en Europe est explosif, après la décision du président russe, Vladimir Poutine, d’envahir l’est de l’Ukraine, le Kosovo entend rejoindre l’Otan au plus vite et obtenir l’implantation d’une base militaire américaine permanente sur son territoire. C’est en effet ce qu’a affirmé Armend Mehaj, son ministre de la Défense.

« Accélérer l’adhésion du Kosovo à l’Otan et disposer d’une base permanente des forces américaines répond à un besoin immédiat pour garantir la paix, la sécurité et la stabilité dans les Balkans occidentaux », a en effet estimé le responsable kosovar. Sans doute que Pristina entend ainsi se prémunir d’un possible coup de force de Belgrade, grâce à la clause de défense collective prévue par l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord.

« Il y a un grand besoin pour les pays démocratiques de faire des pas décisifs et de s’unir face à un tel défi. Le Kosovo a démontré un attachement indéfectible aux valeurs démocratiques et à la paix. Nous appelons les pays qui n’ont pas reconnu l’indépendance à ne pas hésiter à le faire », a insisté M. Mehaj, dans une allusion à l’invasion de l’Ukraine.

Cela étant, le Kosovo accueille déjà la KFOR, la force de l’Otan qui y est déployée depuis juin 1999, conformément à la résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations unies. Forte de 3’700 militaires, ses missions visent à « empêcher les forces yougoslaves et serbes de reprendre les hostilités », « instaurer un environnement sûr et à veiller au maintien de la sécurité et de l’ordre publics », « appuyer l’action humanitaire internationale » et « soutenir la communauté civile internationale présente sur place et assurer une coordination avec cette dernière ».

En outre, les États-Unis comptent environ 635 soldats au Kosovo [soit la seconde contribution à la KFOR], ceux-ci étant stationnés au camp Bondsteel, construit en 1999.

Reste que l’adhésion du Kosovo à l’Otan – et même à l’Union européenne [UE] – est pour le moment illusoire étant donné que plusieurs pays membres de ces organisations n’ont toujours pas reconnu son indépendance. Tel est le cas de l’Espagne, de la Grèce, de la Slovaquie et de la Roumanie.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]