Pour le général Burkhard, les mercenaires russes de Wagner tenteront de compliquer le retrait français du Mali

Le 17 février, le président Macron a officialisé le retrait du Mali de la force Barkhane et du groupement européen de forces spéciales Takuba. Et désormais, il est question de « réarticuler » le dispositif militaire français en Sahel en s’appuyant notamment sur le Niger. Ce désengagement devrait prendre entre quatre et six mois.

Cette décision était attendue, en raison des tensions entre Paris et la junte au pouvoir à Bamako, laquelle a fait appel au groupe paramilitaire Wagner [proche du Kremlin]. Pour autant, lors d’un débat sur la présence militaire française au Sahel organisé cette semaine au Parlement, la ministre des Armées, Florence Parly, n’a pas lié le départ de Barkhane à l’arrivée des mercenaires russes au Mali.

« Nous ne quittons pas le Mali à cause d’un sentiment antifrançais, d’ailleurs difficilement mesurable. Cette vision est déformée par la loupe des réseaux sociaux, qui n’est pas exempte de manipulations de la part de nos compétiteurs. Barkhane, partout où elle a été déployée, a toujours été bien accueillie par les populations locales. Si nous partons, c’est uniquement à cause de la rupture du cadre politique, imposée par la junte malienne », a en effet déclaré Mme Parly, devant les sénateurs, le 23 février.

Et d’ajouter : « Si échec il y a, c’est celui de la junte qui n’a pas la volonté politique de lutter avec détermination contre les groupes armés terroristes, et qui n’a rien obtenu sur le plan politique : il n’y a eu aucune avancée sur l’accord de paix et de réconciliation ».

Cela étant, ce désengagement du Mali doit être comme une opération militaire.

Il sera « particulièrement complexe car il s’agit d’une manœuvre opérationnelle multi-modale, terrestre, aérienne et maritime, qui nécessite une planification et une coordination des moyens matériels nécessaire très précise », a en effet souligné l’État-major des armées [EMA], dans son dernier point de situation sur les opérations en cours.

Cela étant, cette manoeuvre a d’ores et déjà commencé. Ses premières étapes « comprennent l’acheminement des matériels nécessaire au démontage des emprises françaises au mali, le colisage des matériels, les démontages des bâtiments, etc », a précisé l’EMA. Et un premier convoi logistique a quitté la plateforme opérationnelle désert [PfOD] de Gao. Mais, en même temps, il faut aussi le ravitaillement des autres bases opérationnelles avancées françaises [Menaka, Gossi], dans l’attente de leur rétrocession aux forces armées maliennes [FAMa]. Ce qui mobilise des moyens relativement importants.

À l’antenne de France24/RFI, le 25 février, le général Thierry Burkhard, le chef d’état-major des armées [CEMA], a estimé qu’il faudrait bien six mois pour mener à bien cette « réarticulation » en bon ordre en sécurité. Cette opération, « d’un point de vue logistique, est quelque chose d’extrêmement lourd et complexe, avec des élongations énormes, un terrain abrasif, des voies de communications aléatoires », a-t-il justifié. Au passage, il ne faut pas oublier que des convois auront à circuler durant la saison des pluies, qui commence fin juin/début juillet….

Au delà de l’aspect logistique, il y a également un  » véritable défi sécuritaire », a poursuivi le CEMA. Et la guerre en Ukraine pourrait avoir quelques répercussions au Mali, la Russie pouvant être tentée de gêner le retrait de Barkhane.

« Les groupes armés terroristes sont encore présents. Il y a également des manoeuvres de déstabilisation qui peuvent être conduites. On a actuellement le groupe de mercenaires Wagner, déployé en accord avec les autorités maliennes, qui évidemment cherche, ou va chercher, à nous compliquer la tâche. C’est ça que l’on va devoir prendre en compte. Je pense néanmoins que c’est quelque chose qui est à notre portée », a-t-il ainsi développé le général Burkhard . « Il faudra être extrêmement vigilant », a-t-il conclu.

Au Sénat, Mme Parly avait déjà prévenu. « Nous suivons activement le déploiement de Wagner sur le terrain et nous tenons prêts à réagir avec la plus grande fermeté à toute menace sur la force Barkhane. Nous ne tolérerons aucune provocation ni entrave durant notre redéploiement ».

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