Le nombre de munitions tirées en opération par les avions de l’armée de l’Air mis sous le boisseau?

Depuis 2020, le taux de disponibilité des aéronefs de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] et de la Marine nationale ne sont plus rendus publics, le ministère des Armées ayant ainsi rompu avec une pratique qui avait cours depuis que le député François Cornut-Gentille les lui demandait via des questions écrites. Et cela, en vertu d’impératifs « renforcés de confidentialité ». Va-t-il en en être de même pour les munitions tirés lors des opérations extérieures [OPEX]?

En effet, tous les ans, le Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes [CDAOA] publie le bilan des activités menées par l’AAE au cours du précédent exercice. Ce document, assez copieux, livre toute une série de chiffres, dont ceux concernant les OPEX.

Ainsi, le bilan pour l’année 2020 indiquait que les Mirage 2000 [et sans doute les drones MQ-9 Reaper] avaient tiré 206 munitions dans le cadre de l’opération Barkhane. Un chiffre alors en hausse de +148% par rapport à l’année précédente. Cette augmentation s’expliquait notamment par l’intensification des opérations dans la région dite des trois frontières, en particulier contre l’État islamique au grand Sahara [EIGS].

Or, la rétrospective que vient de publier le CDAOA pour l’année 2021 [.pdf] ne dit rien au sujet du nombre de munitions tirées par les sept Mirage 2000 et les six drones Reaper engagés dans Barkhane. Si ce n’est que les chasseurs-bombardiers ont assuré quatre sorties « chasse » par jour, que 110 convois ont été sécurisés et que 50% de l’activité aérienne a été réalisée au profit des forces armées maliennes [FAMa].

Ce document, dans lequel le mot « munition » n’est pas une seule fois cité, évoque cependant une seule frappe : celle effectuée par un MQ-9 Reaper porté au block 5 le 17 août 2021, au moyen d’une bombe guidée laser GBU12.

S’agissant de l’opération Chammal, les Rafale engagés depuis la Jordanie et les Émirats arabes unis ont effectués au moins une frappe contre une position de l’État islamique [EI ou Daesh]. Mais l’État-major des armées [EMA] n’a pas précisé le nombre de munitions utilisés. Et le bilan 2021 du CDAOA n’est guère plus loquace à ce sujet.

Cela étant, lors de sa dernière audition parlementaire en tant que chef d’état-major de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE], le général Lavigne avait évoqué le sujet du stock de munitions, sans attendre les questions des députés.

Ainsi, revenant sur l’exercice Atlantic Trident, effectué en mai 2021 depuis la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan, avec des Rafale et des F-35, il avait indiqué que sur une mission ayant duré 1h30, « 75 missiles » avaient été « fictivement tirés et 25 avions ennemis abattus ». Aussi, en avait-il conclu, cela « laisse présager un fort risque d’attrition dans ce type de conflit » et « souligne le besoin de disposer de stocks de munitions comme le prévoit le troisième axe d’ajustement de la LPM [Loi de programmation militaire], avec des armements permettant d’agir dans la profondeur et avec précision ».

Plus tard, lors de cette même audition, le général Lavigne insista encore sur le fait que « tous nos entraînements démontrent que les conflits de haute intensité entraîneront une utilisation massive de munitions »… mais que la LPM allait permettre de « faire face à ce besoin ».

Quatre mois plus tard, son successeur à la tête de l’AAE, le général Stéphane Mille, fit l’impasse sur le sujet des munitions lors de ses auditions à l’Assemblée nationale et au Sénat. Du moins, les comptes-rendus publiés n’en firent pas mention.

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