Le Sénat dénonce la baisse de la dotation de l’Office national d’études et de recherches aérospatiales en 2022

Avec le Système de combat aérien du futur [SCAF], les ambitions dans le spatial militaire [avec, par exemple, le projet Yoda et l’évolution du radar GRAVES], le renouvellement des moyens de la dissuasion ou encore les travaux dans le domaine des armes hypersoniques, l’Office national d’études et de recherches aérospatiales [ONERA] est particulièrement sollicité dans le cadre de la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-22.

Or, ces dernières années, le Sénat a estimé, à plusieurs reprises, que la dotation budgétaire n’était pas en adéquation avec les différents défi que l’ONERA doit relever, tant les domaines civils que militaires.

Cependant, en 2021, et après un financement « exceptionnel » de 160 millions d’euros annoncé en deux ans plus tôt, celui-ci a reçu une subvention de la part de l’État d’un montant de 110 millions d’euros, soit quatre millions d’euros de plus par rapport à l’année précédente. Et, au total, le budget de l’ONERA s’est donc élevé 237 millions d’euros, la différence provenant de contrats commerciaux.

Qu’en sera-t-il en 2022? Déjà, une chose acquise : la subvention prévue pour cet organisme de recherche va légèrement diminuer, passant de 110 à 108,9 millions d’euros, alors même qu’il est appelé à jouer un rôle de premier ordre dans le volet « aérospatial » du plan « France Relance », avec notamment des recherches à mener pour réduire l’empreinte environnementale des aéronefs, en particulier civils.

Aussi, pour la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la Défense, cette baisse de la dotation de l’ONERA est « anachronique ». Elle « apparaît contre-intuitive, voire contradictoire, par rapport aux objectifs fixés par le ministère des armées de renforcement du lien entre l’opérateur et la Direction générale à l’armement [DGA], de la participation au plan de relance, mais aussi d’évolution des effectifs », ont fait valoir les sénateurs Pascal Allizard et Yannick Vaugrenard, dans leur dernier rapport pour avis remis dans le cadre des débats sur le projet de loi de finances 2022.

« Ce sujet prend une acuité particulière puisque le PLF 2022 constituera la première annuité du COP [contrat d’objectifs et de performance ] 2022-2026. L’autorité de tutelle inscrit l’ONERA dans une LPM qu’elle qualifie elle-même de ‘particulièrement ambitieuse dans laquelle l’Office est sollicité […] dans les perspectives du post-COVID [incertitudes industrielles, mais aussi le plan de relance de l’économie et le 4ème volet du programme d’investissement d’avenir]’. Ce contexte justifierait au contraire une progression de la subvention pour la mettre en accord avec les charges nouvelles de service public », ont expliqué les deux rapporteurs.

Ce 16 décembre, le Sénat a donc appelé le gouvernement à « ouvrir enfin les yeux » sur ce sous-financement de l’ONERA, qui, par ailleurs, doit batailler pour recruter et garder ses chercheurs, et à « cesser ce contresens stratégique ».

« La réduction du soutien à l’ONERA sape son action et ignore les besoins des prochaines années en matière d’innovation de défense et de recherche fondamentale sur les technologies duales », a souligné la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la Défense. Et de rappeler que « dans un contexte où les coopérations demeurent difficiles avec l’Allemagne, il est plus que jamais indispensable de préserver notre souveraineté nationale et le niveau d’excellence » de cet organisme de recherche. D’autant plus que, outre-Rhin, le Deutsches Zentrum für Luft- und Raumfahrt [DLR – Centre allemand pour l’aéronautique et l’astronautique] a vu ses moyens sensiblement progresser au cours de ces dernières années.

S’appuyant sur le rapport rendu par MM. Allizard et Vaugrenard, la commission estime que la dotation annuelle de l’ONERA devrait être augmentée d’un minimum +10 millions d’euros, c’est à dire au « prorata des charges nouvelles imposées par l’autorité de tutelle, notamment au titre de la convention ONERA/DGA ». Et d’insister : « La subvention pour charges de service public devrait progresser au-delà des 120 M€, et non régresser ».

« Il faut savoir ce que l’on veut. Si on pense que la souveraineté technologique en matière aéronautique et spatiale a du sens, ce n’est pas ici qu’il faut chercher à économiser quelques millions », a résumé Christian Cambon, le président de la commission. « Nous dénonçons depuis des années la politique à courte vue de l’Etat sur l’ONERA. C’est une pépite à préserver et encourager. Nous appelons une nouvelle fois le Gouvernement à ouvrir les yeux sur ce sujet », a-t-il conclu.

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