La Turquie va livrer des blindés, des drones Bayraktar TB-2 et des avions d’entrainement Hürkuş au Niger

Depuis les années 2000, l’Afrique constitue l’un des axes majeurs de la stratégie d’influence mise en oeuvre par la Turquie. Stratégie qui est [un peu] éclipsée par les visées de la Russie et de la Chine sur ce continent… Au cours de ces derniers années, Ankara a su y bâtir un réseau diplomatique important, avec désormais plus de quarante représentations diplomatiques [soit trois fois plus qu’il y a vingt ans], et y multiplier les échanges commerciaux, le volume de ces derniers étant passé de 5 à 25 milliards de dollars durant la même période.

Et, le mois dernier, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a effectué une nouvelle tournée africaine, en se rendant en Angola, au Togo et au Nigéria. Et celle-ci sera suivie par un sommet « Turquie-Afrique », organisé à Istanbul, en décembre prochain.

Cela étant, depuis quelques temps, les relations nouées par la Turquie avec certains pays africains ont désormais une dimension sécuritaire. C’est ainsi le cas de la Libye et de la Somalie, où les forces turques disposent d’une base. Mais c’est aussi celui du Niger, avec lequel elle a signé un accord de coopération militaire en juillet 2020 et dont le contenu n’a pas été dévoilé, si ce n’est qu’il doit permettre le « renforcement des capacités des forces de défense et de sécurité » nigériennes, aux prises avec des groupes jihadistes venus du Mali et du Nigéria.

Cette coopération va bientôt se concrétiser, avec la livraison aux forces nigériennes, de drones Bayrakatar TB-2, d’avions d’entraînement Hürkuş et de blindés.

« Le président Recep Tayyip Erdogan a eu une conversation téléphonique avec le président du Niger Mohammed Bazoum […]. Le président Erdogan a déclaré que le drone armé TB2, l’avion de formation Hurkus et les véhicules blindés qui seront achetés par le Niger à la Turquie augmenteront les capacités des forces militaires et de sécurité de ce pays », a en effet annoncé TRT [Radio et Télévision de Turquie], en citant un communiqué officiel.

Aucune précision n’a été donnée sur le nombre d’équipements commandés par Niamey. Cela étant, en avril dernier, Temel Kotil, le directeur général de Turkish Aerospace Industries, avait indiqué, sans livrer plus de détails, qu’un premier contrat concernant l’achat de 12 avions Hürkuş-C était alors en cours de négociation.

Pour rappel, développé par TAI à partir de 2006, le Hükuş est, à la base, un avion d’entraînement doté d’un turbopropulseur Pratt & Whitney Canada PT6A-68T. Pouvant voler à la vitesse maximale de 574 km/h, il dispose d’un rayon d’action de près de 1’500 km. La version commandée par le Niger est dédiée à l’appui aérien rapproché.

Équipé d’un ordinateur de mission et d’un écran principal de vol [PFD], le Hürkuş-C a en effet la capacité d’emporter 1’500 kg de munitions, dont des missiles guidés UMTAS et des roquettes à guidage laser Cirit, ainsi qu’une nacelle de reconnaissance et de ciblage CATS et deux réservoirs largables. Ce qui lui fait des points communs avec le drone de combat Bayraktar TB-2, qui enchaîne les commandes après avoir fait la démonstration de ses capacités en Syrie, en Libye, au Haut-Karabakh et, plus récemment, en Ukraine.

Quoi qu’il en soit, avec cette commande, la force aérienne nigérienne va prendre du volume… Selon le « World Air Forces 2021 » publié par le magazine Flight Global, celle-ci ne dispose actuellement que de deux avions d’attaque Su-25 « Frogfoot », quatre Cessna 208 [dont deux dédiés aux missions de reconnaissance] et une poignée d’hélicoptères. Cette montée en puissance exigera, sans doute, l’envoi d’instructeurs militaires turcs au Niger.

Plus largement, ces commandes passées par Niamey auprès d’Ankara permettront de combler, en partie, les déficits capaciaires dont souffrent les forces nigériennes, notamment en matière d’appui aérien et de renseignement. Et elles profiteront à la Force conjointe du G5 Sahel, dont le Niger fait partie, aux côtés de la Mauritanie, du Mali, du Burkina Faso et du Tchad.

D’ailleurs, N’Djamena pourrait bien suivre les pas de Niamey… Le 29 octobre, alors qu’il recevait Mahamat Idriss Déby Itno, son homologue tchadien, M. Erdogan a affirmé que la Turquie était « disponible » pour lancer une « coopération dans le domaine militaire, de la défense et de la sécurité » avec le Tchad.

Comme l’a souligné un récent rapport parlementaire sur l’opération Barkhane, la Turquie ne cesse de renforcer son influence au Sahel, notamment dans les domaines économique [BTP, aéroport de Niamey, etc.] et culturel [écoles, coopération culturelle], « conformément à la volonté du président Erdogan d’apparaître comme le nouveau chef de file des pays de confession musulmane sunnite ».

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