Les forces chinoises utilisent des répliques de navires américains pour améliorer la précision de leurs missiles

Quand il était chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], l’amiral Christophe Prazuck s’était montré sceptique à l’égard des missiles balistiques anti-navires présentés par la Chine comme étant des « tueurs de porte-avions ».

« Mettre en avant un missile de nature balistique, qui volerait à une vitesse faramineuse et serait doté d’un autodirecteur me paraît étonnant du fait des phénomènes d’échauffement créés par de tels niveaux de vitesse. De plus, a-t-il continué, guider un objet qui irait à très grande vitesse vers une cible mouvante comme un bateau me paraît plutôt compliqué et, pour tout dire, je n’y crois pas », avait en effet affirmé l’amiral Prazuck, lors d’une audition parlementaire.

Son prédécesseur, l’amiral Bernard Rogel, missilier de formation, était tout aussi sceptique. « Je n’ai pas d’éléments précis sur les missiles antinavire chinois. J’en entends parler mais il me paraît difficile […] d’atteindre un bâtiment en mouvement avec un missile balistique. Mais pourquoi pas? Les Chinois ont montré qu’ils étaient capables d’aveugler des satellites avec des lasers. Cependant, je me méfie », avait-il eu l’occasion de dire.

Pour rappel, la Chine a développé au moins deux missiles balistiques présentés comme étant « anti-navires » : le DF-21D, d’une portée de 1800 km, et le DF-26B, capable de parcourir 4000 km. Et on y peut même y ajouter le missile aérobalistique – et hypersonique – « CH-AS-X-13 » qui, basé sur le DF-21D, est emporté par les bombardiers H-6K.

Jusqu’à présent, aucune image montrant un tel missile atteindre un navire en mouvement n’a été produite par l’ Armée populaire de libération [APL]. Et on ignore leurs réelles capacités… En tout cas, ces engins servent à faire passer des messages. Ainsi, en août 2020, un DF-21D et un DF-26B ont été tirés lors de manoeuvre en mer de Chine méridionale, en direction de position où, quelques semaines plus tôt, deux groupes aéronavals américains avaient manoeuvré. Et, plus récemment, des bombardiers H-6K auraient apparemment simulé l’attaque du porte-avions USS Theodore Roosevelt, qui naviguait alors au sud de Taïwan.

Quoi qu’il en soit, il apparaît que les forces chinoises s’exercent effectivement à attaquer des navires américains. C’est en effet ce que suggèrent des photographies satellites qui, diffusées par la société Maxar Technologies, ont été prises au-dessus du désert de Taklamakan, situé dans la région du Xinjiang [ouest de la Chine]. Ces clichés montrent la réplique à l’échelle d’un porte-avions américain [l’USS Gerald Ford, visiblement] ainsi que celles de deux « destroyers » appartenant à la classe Arleigh Burke.

Selon Reuters, qui a publié ces photographies, des rails de 6 mètres de large sur lesquels une cible de la taille d’un navire ont été repérés. Ce dispositif, à l’évidence, sert à simuler un bateau en mouvement.

À en croire la société de renseignement géospatial All Source Analysis, ce site a déjà été utilisé pour des tests de missiles par le passé. La réplique du porte-avions aurait ainsi « subi de nombreuses reconstructions et été en partie démantelée en décembre 2019 », avant d’être reconstruite récemment.

L’existence d’un tel site pourrait suggérer que les missiles DF-21D et DF-26B n’ont pas encore atteint la précision nécessaire pour menacer un groupe aéronaval. C’est, en tout cas, l’hypothèse de Collin Koh, chercheur à la S. Rajaratnam School of International Studies de Singapour. En outre, a-t-il ajouté, même s’il ne reflète évidemment pas l’environnement marin, ce complexe permettrait de réaliser des tests de ciblage à l’abri des regards indiscrets…

L’an passé, un expert militaire chinois avait expliqué au quotidien Global Times [qui suit la ligne du Parti communiste chinois] que l’APL disposait des moyens nécessaires pour « détecter, suivre et atteindre des vaisseaux ennemis », grâce à un système comprenant des « avions de reconnaissance, des radars, des satellites et des navires de guerre, entre autres, pour trouver des cibles en mouvement et communiquer leurs coordonnées aux missiles pour qu’ils puissent ajuster leurs trajectoires lors de leur lancement ».

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]