La Corée du Nord affirme avoir testé une arme hypersonique

Le 28 septembre, et après avoir testé un missile de croisière à longue portée et « système de missiles de combat ferroviaire », Pyongyang a procédé à l’essai d’une nouvelle arme, depuis le secteur Mupyong-ri, situé dans la province de Jagang.

Peu après, l’état-major sud-coréen a confirmé le tir d’un projectile – probablement balistique – par la Corée du Nord, sans donner plus de détails. D’habitude, en pareil cas, celui-ci livre des précisions sur l’altitude et la vitesse atteintes par l’engin, ainsi que la trajectoire qu’il a suivie. Là, il a seulement indiqué que le renseignement militaire était en train d’analyser les caractéristiques du vol effectué par l’engin nord-coréen.

Toutefois, des sources militaires sud-coréennes ont confié à l’agence Yonhap que le projectile avait parcouru environ 200 km et atteint l’atitude de 60 km. Et de souligner que ces « caractéristiques de vol étaient différentes de celles des missiles précédemment testés par la Corée du Nord ».

Puis, quasiment au même moment, à l’Assemblée générale des Nations unies, l’ambassadeur de la Corée du Nord auprès de l’ONU, Kim Song, a défendu le droit « légitime » de son pays à tester des armes et à « renforcer [ses] capacités de défense].

Pour rappel, la Corée du Nord fait l’objet de sanctions décidées par le Conseil de sécurité de l’ONU pour son programme nucléaire et ses activités dans le domaine des missiles balistiques. Ce qui fait que ses essais de missiles de croisière ne font pas l’objet de condamnations particulières.

Aussi, Paris a condamné le dernier essai nord-coréen, en disant « exhorter une nouvelle fois la Corée du Nord à se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies et à répondre aux propositions de dialogue formulées par les États-Unis et la Corée du Sud afin de progresser dans le sens d’une dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible ». Et Washington n’a pas dit autre chose.

Cependant, via un communiqué séparé, le commandement américain pour l’Indo-Pacifique a souligné que le tir nord-coréen « soulignait l’impact déstabilisateur du programme d’armes illicites de la RPDC [République populaire démocratique de Corée] » même s’il n’était pas de nature à poser une menace immédiate pour les États-Unis et leurs alliés.

La nature du projectile tiré a finalement été précisée par l’agence officielle nord-coréenne KCNA. Ainsi, cette dernière a affirmé que Pyongyang venait de tester une arme hypersonique, c’est à dire pouvant voler à une vitesse supérieure à Mach 5, appelée « Hwasong-8 ».

L’essai a « confirmé le contrôle de la navigation et la stabilité du missile » ainsi que « la manœuvrabilité de son système de guidage et les caractéristiques de vol plané de l’ogive hypersonique détachée », a prétendu KCNA. « Les résultats des tests ont prouvé que toutes les spécifications techniques étaient conformes aux exigences de conception », a-t-elle insisté.

En clair, la Corée du Nord assure qu’elle a développé un planeur hypersonique, lancé par un missile balistique [qui serait, a priori, un Hwasong-12, nldr]. La Russie dispose d’une telle arme avec l’Avangard [qui est déjà en service], de même que la Chine, avec le Wu-14 [propulsé par un missile DF-17]. Les États-Unis conduisent un programme similaire avec le « Common Hypersonic Glide Body » [C-HGB] et la France doit tester le V-MAX d’ici la fin de cette année.

Dans le détail, un planeur hypersonique [HGV – Hypersonic Glide Vehicle] se sépare du missile « porteur » au cours la phase ascensionnelle, au-delà d’une altitude de 50 km. Puis il progresse vers sa cible, en alternant des phases balistiques avec des manoeuvres de rebond. L’une des difficultés est alors de le maintenir hors de portée des systèmes de défense aérienne et antimissile. Puis, en phase terminale, et alors que sa vitesse se réduit, il peut effectuer des manoeuvres évasives avant d’atteindre sa cible.

La mise au point d’armes hypersoniques supposent de maîtriser des technologies et des savoirs clés, notamment dans les domaines des matériaux, de la propulsion, de l’aérodynamique et du guidage. La Corée du Nord les possède-t-elle? Et si tel est le cas, a-t-elle bénéficié d’une aide extérieure pour progresser aussi vite?

Ces questions se posent avec d’autant plus d’acuité que Pyongyang a réalisé des progrès notables pour d’autres armes, comme le missile KN-23 qui, comme l’Iskander russe et le DF-15 chinois, a une trajectoire semi-balistique, ce qui permet de le manoeuvrer avant de toucher une cible. Ou encore comme le missile de croisière à longue portée, récemment testé.

Comme l’explique l’Institut français des relations internationales [IFRI], un HGV de moyenne portée a « un temps de vol plus court qu’un missile de croisière ‘classique’ d’une portée équivalente ». Et en volant à Mach 6, il « mettrait ainsi un peu plus de quatre minutes avant de toucher une cible à 500 km, laissant peu de temps pour une réaction appropriée ». Ce qui, si la Corée du Nord maîtrise cette technologie, a de quoi inquiéter la Corée du Sud, le Japon et les États-Unis, leur systèmes antimissiles pouvant être contournés.

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