L’armée allemande va créer les grades de « caporal » et de « caporal-chef »
L’idée de doter l’Union européenne d’une « armée commune » aux États membres revient régulièrement dans le débat, comme en 2015, quand Jean-Claude Junker, alors président de la Commission de Bruxelles, fit une telle proposition. Celle qui allait lui succéder en 2019, Ursula von der Leyen, qui était ministre allemande de la Défense à l’époque, avait affirmé que « ses petits-enfants connaîtraient des États-Unis d’Europe, avec leur propre armée ».
Pour ces responsables, il suffirait d’additionner les effectifs, les matériels et les budgets des forces de chacun des pays membres pour bâtir une armée qui serait la deuxième ou la troisième du monde. Une telle idée n’est pas simple… mais simpliste car elle met de côté des aspects aussi fondamentaux que sont la chaîne de décision et de commandement, la cohérence entre les différentes armées européennes [doctrines, règles d’engagement, etc] ou encore les traditions héritées de l’histoire.
Par exemple, les grades sont différents d’une armée à l’autre. Et il n’est pas uniquement question de passementerie… mais aussi d’équivalence. Ainsi, parmi ses sous-officiers, l’armée estonienne a des « Veebel » [grade classé dans la catégorie OR7 de l’Otan, soit entre sergent-chef et adjudant, ndlr], qui correspond aux « Epilochías » grecs… Mais à rien en France, où ce niveau n’existe pas.
En revanche, il n’y a pas de caporaux en Estonie, le galon de « Kapral » étant équivalent à celui de soldat de 1ère classe en France. En revanche, il y a des caporaux-chefs, appelés « Nooremseersant » [que l’on traduit par « sergents juniors »].
En Allemagne, il n’y a jamais eu de caporaux, ni de caporaux-chefs. Et contrairement à ce qui a est fréquemment avancé, Adolf Hitler n’a jamais été caporal durant la Première Guerre Mondiale… mais « Gefreiter », un grade qui existe, outre-Rhin, depuis le XVIe siècle. En France, il correspond au galon de soldat de première classe.
Actuellement, les militaires du rang allemands peuvent donc être simples soldats, « Gefreiter », « Obergefreiter » et « Hauptgefreiter », ces deux derniers niveaux étant assimilés, en France, au grade de caporal [ou de brigadier]. Quant aux caporaux-chefs [ou brigadiers-chefs], on les assimile aux « Stabsgefreiter » et les « Oberstabsgefreiter », lesquels ne peuvent donner d’ ordres à quiconque.
Cela étant, cela va bientôt changer, la Bundeswehr ayant annoncé l’entrée en vigueur prochaine d’une réforme visant à modifier sa hiérarchie militaire – et donc son échelle des salaires [ou de soldes]. En effet, à partir d’octobre, deux nouveaux grades vont faire leur apparition : ceux de Korporal [caporal] et de Stabskorporal [caporal-chef]. Le blog « Augen geradeaus! » a d’ailleurs publié les ébauches de ces deux futurs galons.
A priori, les grades de Korporal et de Stabskorporal devraient être équivalents à ceux correpondant au code OR-4 et OR-5 [sergent, en France] de l’Otan. Mais rien n’est définitivement arrêté à ce sujet. Et ils viendraient s’ajouter aux « Stabsgefreiter » et « Oberstabsgefreiter ». Et en cela, l’Allemagne imiterait l’Italie, où il existe sept grades différents pour les militaires du rang [soldato, caporale, caporal maggiore, primo caporal maggiore, caporale maggiore scelto, caporale maggiore capo et caporale maggiore capo scelto, ndlr].
Par rapport à son homologue française, la chaîne hiérarchique allemande est beaucoup plus compliquée [et l’apparition de deux nouveaux grades n’arrangera évidemment pas les choses].
Ainsi, pour le grade de sergent, en France et dans plusieurs autres pays, il existe deux niveaux en Allemagne, à savoir l’Unteroffizier et le Stabsunteroffizier. Même chose pour le rang supérieur [sergent-chef] qui, outre-rang, compte aussi deux niveaux : Feldwebel et Oberfelwebel.
Photo : Otan