Les forces chinoises ont effectué un exercice avec des tirs réels dans les environs de Taïwan

Membre du comité spécial du Sénat américain sur le renseignement, John Cornyn a été au centre d’une vive polémique après avoir affirmé, via Twitter, le 16 août, que 30’000 soldats américains étaient actuellement présents à Taïwan. Ce qui était jusqu’à présent passé inaperçu… Sauf à considérer que le parlementaire s’est emmêlé les crayons avec la situation qui prévalait dans l’ex-Formose avant 1979. En tout cas même s’il a ensuite été effacé, ce message n’a évidemment pas manqué de faire réagir à Pékin. Et notamment le quotidien Global Times, qui suit la ligne du Parti communiste chinois [PCC].

« Si cela est vrai, le gouvernement et le peuple chinois ne l’accepteront jamais. On pense que la Chine appliquera immédiatement la loi anti-sécession, détruira […] les troupes américaines à Taiwan […] et réalisera en même temps la réunification par la force », a écrit le journal dans un éditorial dédié à cette « affaire ». Et d’ajouter : « Nous exigeons une explication immédiate du gouvernement américain sur le tweet de Cornyn, ainsi qu’une explication immédiate des autorités taïwanaises. S’il y a vraiment 30’000 soldats américains à Taïwan, ou même moins, ce serait une situation extrêmement grave dépasserait la la ligne rouge » pour Pékin.

Quoi qu’il en soit, les seuls contacts récents au niveau militaire qu’ont pu avoir les États-Unis et Taïwan ont eu lieu la semaine passée, avec une rencontre entre des gardes-côtes américains et taïwanais afin de voir comment il était possible d’améliorer leur coopération. Cette réunion s’est tenue alors que l’administration Biden venait de rendre un avis recommandant au Congrès d’accepter la vente à Taipei de 40 obusieurs automoteurs « Paladin » pour 750 millions de dollars.

A priori, et même si l’importance de cette vente – encore potentielle – a été relativisée par des analystes militaires chinois, Pékin y a sans doute vu une « provocation » de la part de Washington. D’autant plus que, ont rappelé les autorités chinoises, les États-Unis s’étaient engagés à réduire progressivement leurs livraisons d’armes à Taïwan en signant, le 17 août 1982, un accord négocié pendant de longs mois avec la Chine.

Et ce n’est donc pas un hasard si, le 17 août [soit le jour du 39e anniversaire de ala signature de cet accord], l’Armée populaire de libération [APL] a donné le coup d’envoi à des manoeuvres navales et aériennes dans le proche environnement de Taïwan, avec des tirs réels au programme.

« L’Armée populaire de libération a mené des exercices avec des tirs réels, impliquant […] notamment des navires de guerre, des avions anti-sous-marins et des avions de chasse dans les environs des espaces maritimes et aériens du sud-ouest et du sud-est de l’île de Taïwan, dans le but de tester la capacité des troupes à mener des opérations conjointes », a ainsi fait savoir le colonel Shi Yi, le porte-parole du « commandement du théâtre oriental ».

« Les États-Unis et Taïwan ont récemment multiplié les provocations » et ces manoeuvres sont une « réponse solennelle » face à l’ingérence des forces étrangères » ainsi qu’aux « partisans de l’indépendance » de Taïwan, a expliqué le colonel Shi.  » Cet exercice est une action nécessaire basée sur la situation sécuritaire actuelle dans le détroit de Taïwan et la nécessité de sauvegarder la souveraineté nationale », a-t-il insisté.

Seulement, alors que les manoeuvres chinoises n’avaient pas encore débuté, 11 avions de l’APL [six chasseurs J-16, un avion radar KJ-500, un Y-8 ASW de lutte anti-sous-marine, un Y-8 EW de guerre élecronique et deux bombardiers H-6K] ont fait une incursion dans la zone d’identification de défense aérienne [ADIZ] de Taïwan, alors même que les forces aériennes et navales taïwanaises étaient sur le point d’effectuer un exercice conjoint dans le même secteur, a précisé le quotidien South China Morning Post.

Toujours selon la même source, cette incursion chinoise a également coïncidé avec la présence d’un avion de renseignement EP-3E et celle d’un appareil de patrouille maritime P-8A Poseidon de l’US Navy dans les environs de Taïwan. En outre, et malgré l’intervention de la force aérienne taïwanaise, le Y-8 EW de l’APL aurait ignoré les avertissements qui lui ont été adressés.

Quoi qu’il en soit, les manoeuvres évoquées par le colonel Shi pourraient être « considérées comme un entraînement pour une opération amphibie à grande échelle », a commenté Song Zhongping, un expert militaire chinois cité par le Global Times. Pour cela, il est « crucial de prendre le contrôle de l’information, du ciel et de la mer afin que les troupes de débarquement puissent mener à bien leur mission. Les exercices [du 17/08] ont visé à préparer cette étape clé », a-t-il ajouté.

Mais avant celle-ci, il est probable que l’APL ménera d’abord des opérations de guerre électronique et de cyber-guerre, puis des frappes à grande échelle contre les installations militaires taïwanaises. Ce n’est qu’ensuite qu’elle passerait à l’étape décrite par Song Zhongping.

« Lors des exercices de mardi, l’APL a encerclé Taïwan dans les directions sud-ouest et sud-est. Cela lui permet non seulement d’attaquer l’île dans deux directions, mais également d’empêcher que des forces étrangères viennent à la rescousse » de Taipei, a affirmé le Global Times, en s’appuyant sur des commentaires d’analystes militaires.

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