Le F-35 porté au standard « Block 4 » aura besoin d’un moteur modernisé… qui n’est pas encore financé

L’avion de combat F-35, développé par Lockheed-Martin, disposera de l’ensemble des capacités inscrites dans son cahier des charges qu’une fois qu’il aura été porté au standard « Block 4 », dont le développement a par ailleurs déjà pris du retard, tout en générant des surcoûts

Dans le détail, il s’agit d’intégrer à cet appareil 66 nouvelles fonctionnalités, pour un montant qui devrait atteindre, selon les calculs Government Accountability Office [GAO, équivalent américain de la Cour des comptes] 14,4 milliards de dollars au lieu des 10,6 milliards initialement prévus par le Bureau du programme F-35 au Pentagone.

Seulement, l’ajout de ces nouvelles capacités supposerait également une mise à niveau du moteur F-135 de l’avion, lequel est fourni par Pratt & Whitney. Or, selon la vice-président du motoriste américain, Jen Latka, la modernisation de ce moteur n’a pas été incluse dans le standard Block 4. C’est en effet ce qu’elle a récemment expliqué dans un entretien accordé à Defense News.

Ainsi, selon elle, le F-135 serait déjà « exploité au-delà de ses spécifications » car de nouvelles fonctionnalités ont été ajoutées au F-35. Et le problème ne pourra qu’empirer avec le Block 4 dans la mesure où l’appareil sera plus lourd, ce qui nécessitera une meilleure gestion thermique et davantage de puissance. C’est ce qu’a d’ailleurs reconnu le général Eric Fick, le responsable du programme F-35 au Pentagone, lors d’une récente audition parlementaire.

Pour Jen Latka, il faudrait donc, sans tarder, définir une « exigence en matière de propulsion qui soit proportionnelle à cette masse supplémentaire ».

« Il est maintenant temps définir les exigences et de mettre en place le financement, puis de démarrer le programme », a insisté Mme Latka. D’autant que Pratt & Whitney a déjà remis une étude au bureau du programme F-35 à cette fin.

L’industriel proposerait ainsi un F-135 amélioré, offrant 11% d’autonomie en plus, une poussée améliorée de 10% et une gestion thermique 50% plus efficace. « Notre objectif est de fournir la solution la plus rentable que nous puissions identifier afin de répondre aux futures exigences » du F-35, a fait valoir Mme Latka.

Il n’est pas clair si le moteur F-135 amélioré qu’envisage de proposer Pratt & Whitney bénéficiera ou non des retombées du programme AETP [Adaptive Engine Transition Program], lancé par l’US Air Force en 2016, avec l’objectif d’obtenir un réacteur plus économique, offrant une gestion thermique « considérablement améliorée » et permettant une poussée accrue de 10%.

Pour rappel, Pratt & Whitney avait obtenu un contrat de 1,01 milliard de dollar au titre de ce programme, comme General Electric Aviation. En mai dernier, celui-ci a indiqué avoir achevé les tests du XA100, son premier moteur à cycle adaptatif qui, destiné aux avions de combat, est développé dans le cadre du projet AETP.

Selon GE, conçu avec de nouveaux matériaux [composites à matrice céramique et composites à matrice polymère], le XA100 intégre trois innovations majeures. « Le cycle moteur adaptatif offre ainsi deux modes [économie de carburant ou puissance maximale] tandis que l’architecture du moteur à trois flux permet de faire varier le flux d’air dans le moteur, et d’optimiser son efficacité en fonction du type de mission », avait-il alors soutenu.

Pour le moment, le Pentagone n’a pas d’avis arrêté sur l’avenur du moteur F-135. Le bureau du programme F-35 « évalue l’étude de Pratt & Whitney » ainsi que les « données d’autres sources », a-t-il dit à Defense News. Et il en est encore au stade de définition des futurs besoins. D’où, sans doute, l’absence de financements que déplore Mme Latka.

Quoi qu’il en soit, même si des responsables de l’US Air Force se disent « très enthousiastes » devant les performances que pourraient apporter un moteur AETP au F-35, il n’est pas certain que les moyens – financiers – soient au rendez-vous. Leur mise en service « nécessiterait un investissement important » qui ne fait actuellement pas partie des plans budgétaires de l’Air Force », a ainsi admis le général David Nahom, chef d’état-major adjoint « plans et programmes » de cette dernière. Probablement que de tels réacteurs seront surtout destinés au NGAD, l’avion de combat de 6e génération en cours de développement;

En attendant, la priorité du Pentagone est de remédier à la pénurie de moteurs F-135, laquelle pèse sur la disponibilité de ses F-35, notamment ceux de l’US Air Force. En effet, ayant fonctionné à des températures ayant atteint les « limites de leur conception », ceux-ci s’usent plus vite que prévu, à cause du revêtement de leurs aubes de turbine.

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